Les Trahisons

7. Celle qui revient du passé

Lexa.

Lexa se tenait devant elle .

Lexa.

Ce ne pouvait être vrai.

Lexa ici ?

Lexa reine d'Omb ?

Lexa revenue la hanter ?

Son cœur commença à battre la chamade.

Lexa était bien ici.

Son ventre se tordit.

La jeune femme était habillée d'un vêtement complexe et sombre, laissant apparaître ses bras fins et musclés et sa gorge blanche. Elle avait changé en sept ans, mais ses yeux émeraude ourlés de noir restaient les mêmes.

Ils rencontrèrent ceux de Clarke qui commença à avoir très chaud. Tandis que des sentiments tous plus contradictoires les uns que les autres lui tordaient le ventre, une myriade de pensées lui traversa l'esprit sans aucune logique. Etonnées : Mais que fait-elle là ? Physiques : Elle est toujours aussi belle... Rageuses : Comment peut-elle se pointer ici après ce qu'elle a fait ? Chaudes : Tout le monde doit ressentir la tension qu'il y a entre nous... Meurtrières : je vais la tuer ! Observatrices : Elle n'a pas l'air surprise. Haineuses : je ne la veux pas ici ! Attirées : je la veux dans mon lit ! Pratiques : Elle n'était pas censée habiter à TonDC ? Coupables : Mais j'aime Finn... Résignées : Elle me hait aussi de toute façon.

Clarke se dit que le sourire qu'elle arborait toujours sur son visage avait légèrement vacillé.

Les gardes qui entouraient Lexa s'arrêtèrent à une dizaine de mètres de Clarke, claquant des talons dans un ensemble parfait. Les yeux de la brune n'avaient pas quitté ceux de Clarke depuis qu'elle était rentrée dans la salle et son visage ne laissait passer absolument aucune émotion. Un sentiment étrange la prit aux tripes. Ce sentiment que procurait le risque inconnu.

Clarke sursauta légèrement lorsque l'homme à la droite de Lexa pris la parole. A sa réaction, un fin sourire étira imperceptiblement la bouche de Lexa.

« Lexa Woodensen dite « l'Indomptable », première reine de l'île d'Omb, cinquante-et-unième porteuse de la Pierre, libératrice des infidèles et gagnante des épreuves initiatiques ! fit-il d'une voix claire et assurée.

Un murmure se fit entendre dans la pièce à l'annonce de la Pierre, qui restait gravé dans les esprits comme un mythe.

Quant à Clarke, elle fronça légèrement les sourcils. Les arrivées grandiloquentes n'étaient pas une habitude sur l'Arche, mais il était hors de question qu'elle perde la face contre Lexa. Elle adressa un léger signe de tête à Finn.

« Clarke de l'Arche, reine de l'Arche, euuuuh, reine aimée le jour, et amante passionnée la nuit » finit-il en un sourire, fier de sa trouvaille.

Clarke sentit son cœur s'arrêter à ses mots et elle dut se retenir de se frapper le front de la paume de la main. Qu'est-ce que Finn pouvait être bête, parfois ! Le mot aurait fait rire en présence uniquement de gens de l'île, mais les différences de culture semblaient être énormes avec Omb.

La voyant presque impassible, le peuple présent dans la salle n'osa pas rire. Ils devaient aussi être intimidés par la prestance de la garde et de la reine d'Omb. Clarke remarqua néanmoins que le léger sourire de Lexa semblait s'être étiré d'un demi-millimètre. Comble du comble, elle se fichait d'elle !

« Clarke, » dit Lexa d'une voix claire et forte qui fait vibrer le ventre de la blonde alors qu'elle l'entendait parler pour la première fois depuis sept ans. « Peuple de l'Arche. Nos deux îles n'ont été jusqu'alors que trop séparées. Je viens aujourd'hui vers vous pour remédier à cette distance qui n'aurait jamais dû exister. J'espère pouvoir découvrir les merveilles de vos terres, et que demain vous découvriez les nôtres. »

En parlant des merveilles de leurs terres, pensait-elle à cette crique inondée de soleil que Clarke lui avait montré, il y avait si longtemps ? Pensait-elle à leurs baisers enfantins ou était-elle fausse quand elle se donnait à elle ? Toutes ces questions auxquelles Clarke espérait ne plus jamais penser tournaient dans son esprit. C'était injuste de revenir la torturer ainsi.

« Lexa, » fit-elle avec un faux sourire, alors qu'elle ne croyait ne plus jamais avoir à prononcer ce nom, « et garde rapprochée de la reine, bienvenue sur l'Arche. Je ne peux que trop approuver vos désirs de réunion. Je me ferai un plaisir de vous faire découvrir Numa, notre capitale, ainsi que la campagne alentour. Mais d'abord, tous les habitants de l'île sont heureux de vous convier à un banquet dans la grande cour du château, autour de nos artistes du spectacle qui se feront un plaisir de vous étonner et vous faire rire : mesdames et messieurs, voici Skaikru ! »

Une poignée d'hommes et femmes vêtus de combinaisons moulantes sortirent de la foule en agitant la main sous les hourras et les applaudissements du public. On entendait le rire cristallin de quelques enfants, et cette fois un vrai sourire barra le visage de Clarke. Etre artiste était considéré sur l'Arche comme l'un des métiers les plus exceptionnels et ils étaient très appréciés. Chacune des parutions de Skaikru déchaînait les foules. Les enfants disaient : « Quand je serai grand, je veux être un Skaikru ! », comme Natahel, le plus âgé des petits frères de Clarke. Puis la plupart, quand ils grandissaient, se rendaient compte de la difficulté et devenaient agriculteurs, marchands, ou pire ! financiers.

Nat, lui, n'avait pas abandonné et faisait partie du groupe qui se trouvait devant elle. A seize ans, il était déjà un beau jeune homme élancé et l'une de ses fiertés. Elle lui lança un clin d'œil.

« Si le soleil montre la voie vers l'ouest, Skaikru montre la voie des réjouissances. Peuple d'Omb, je vous invite à les suivre ! »

Clarke avait conscience que cette phrase était d'un ridicule affligeant, mais son peuple avait toujours apprécié lorsqu'elle déclamait de jolies phrases. Les habitants de l'Arche étant bien élevés (et légèrement repoussés par ses gardes) une haie se forma pour laisser le passage. Lexa lui adressa un signe de tête et le groupe traversa sans encombre la salle, Skaikru en pirouettant et les Ombiens en cadence. Clarke ne put s'empêcher de chercher à deviner les pensées de la jeune femme. Elle n'avait pas l'air surprise, ce qui voulait donc dire qu'elle savait que Clarke était reine. Depuis combien de temps ? L'avait-t-elle appris lors de son passage sur l'Arche ou en prenant ses fonctions ? Mais surtout : que faisait-elle sur l'Arche alors que son peuple avait toujours été contre le mélange social ?

La blonde fronça les sourcils, toujours assise sur son siège, alors que le reste de son petit monde se dirigeait avec joie vers le banquet. Elle les rejoindrait plus tard, dans une vingtaine de minutes, le temps de les faire attendre et que son arrivée soit associée à un soulagement – le repas est servi. Même les gens complexes sont amadoués par des choses aussi simples – alors, que dire des Arcadiens ?