Capítulo I

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Domenico observait avec appréhension les pilules de différentes couleurs éparpillées dans la paume de sa main. La dispute de ses parents résonnait en arrière-fond, à peine recouverte par le bourdonnement régulier du moteur qui l'emmenait loin de chez lui.

Son père pleurait silencieusement maintenant. Sa mère gardait les mains rigides sur le volant. Le garçon se mordilla la lèvre inférieure, hésitant.

La sensation de manque brûlait dans son corps. Songeur, il prit l'un des médicaments entre ses doigts, sensé l'aider à éteindre le feu qui le tuait de l'intérieur.

Il détenait une autre solution pour combattre le vide qui criait en lui. Ses parents n'avaient pas remarqué le petit sachet rempli d'une poudre blanche dissimulé dans la poche arrière de son jeans. Il essayait de ne pas trop y penser.

— Je suis certaine que ça va lui faire du bien de rester avec son abuela, hein Domenico ?

Le jeune homme détourna la tête vers la fenêtre. Le paysage aride et battu par les vents du Mexique défilait à toute vitesse. Partir dans un coin paumé, coupé de l'extérieur ne l'enthousiasmait pas le moins du monde. Cela faisait une éternité qu'il n'avait pas vu sa grand-mère ; son père et elle n'étaient plus en bons termes depuis longtemps.

— Eh Nico, yo te hablo! Tu n'es pas heureux de revoir ta cousine ?

Le garçon expira violemment et éleva la voix.

— Je ne la connais pas. Putain, mamà, on avait trois ans !

Son père se retourna et leva sa main en guise de menace.

— Tu ne parles pas sur ce ton à ta mère, Domenico !

Le garçon cracha presque de dégoût pour son géniteur.

— T'es qu'un suelto, toi.

Le regard noir de l'homme se figea, puis se radoucit en remarquant les pilules intactes dans la paume de son fils. Il amena un sourire forcé sur sa face rubiconde.

— Allez mi pequeño, prend tes compléments. Ça va aller mieux. Le docteur nous a bien dit que tu pouvais devenir violent si tu ne prenais pas ta dose de... ces choses, là.

— Cocaïne, cannabis et ecstasy, précisa le garçon, goguenard, à moitié sérieux.

Sous le regard insistant de ses parents, il soupira et gémit qu'il n'arrivait pas à avaler ces médocs sans eau. Son père lui passa une bouteille de limonade. Il les goba tout rond. Ses parents se calmèrent et le laissèrent tranquille.

Mais l'envie de fourrer sa main dans sa poche continuait de le tenailler. Il ne pouvait toutefois pas se permettre de se faire prendre ; d'autres petits sachets patientaient dans la valise. Pour que ses parents ne les lui enlèvent pas, il fallait qu'il se montre patient.

Etouffé par l'ennui, il pressa son front contre la vitre. Comme souvent, ses pensées retrouvèrent leur chemin vers Mariana, sa petite amie. Dire que ses parents n'avaient pas remarqué son addiction à elle, alors qu'ils étaient tous deux médecins !

Domenico rit de l'ironie de son sort. Lui qui avait toujours craint qu'on lui enlève sa bien-aimée pour l'envoyer dans une cure de désintox... Maintenant c'était lui qu'on exilait !

Il demanda à mettre la climatisation. Il avait chaud, d'un coup. D'une légère pression du doigt, la fenêtre s'ouvrit pour laisser entrer un air tumultueux mais frais dans l'habitacle.

Cela ne suffisait pas. Le jeune homme suffoquait. Sa main tremblante tenta de déboutonner le col de sa chemise qui l'étranglait. Son cœur, comme pris de folie, battait à toute allure.

— Papa, Mamà... No tengo... J'ai plus d'air ! haleta-t-il.

Il se laissa tomber sur le siège attenant, son corps secoué de convulsions. Ses poumons se ratatinaient, son cerveau se liquéfiait sous la douleur.

Un cri se bloqua dans sa gorge au moment où sa vision vira au noir.

Dia de los MuertosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant