Le château de Berry

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Joséphine dépose ses maigres bagages dans le large hall d'entrée de son nouveau chez elle. Toute excitée, elle contemple l'escalier monumental qui lui fait face, les larges portes en bois  sculptée donnant sur les différentes pièces du rez-de-chaussée, le superbe lustre en cristal éclairant la salle.  

Grisée, elle ne remarque pas le décollement des tapisseries, les marches éventrées et les larges dalles en pierre, couvrant les sols, éclatées par endroit. Les quelques ampoules en moins du fabuleux lustre n'altèrent en rien sa joie. 

Elle est bien consciente du travail herculéen qu'elle devra accomplir afin de lui rendre sa prestance d'antan. Heureusement que l'héritage, en plus du château, comprenait une belle somme d'argent. Bien que "belle somme d'argent" soit un euphémisme, Il y avait largement de quoi abattre et reconstruire deux fois cette bâtisse. 

Elle décide de commencer son expédition par la première porte à sa gauche. Munie d'un bloc-notes et d'un stylo, elle entame le début d'une longue todo list. Elle entre dans ce qu'il fût, jadis, une salle à manger. Une énorme table en bois entourée d'une douzaine de chaise domine l'endroit. Quelques meubles couverts de draps blancs et une sublime cheminée, noircie avec le temps, complètent le tableau. 

- Bonjour, Madame. 

Joséphine laisse échapper un petit couinement en faisant volte-face à une dame d'un certain âge. 

- Oh, je suis désolée de vous avoir fait peur, dit-elle en s'approchant de la jeune femme, j'ai pourtant frappé à plusieurs reprises. 

Joséphine tente de faire abstraction des palpitations de son cœur. Pour se donner une contenance, elle tend la main vers la veille femme.   

- Je n'ai rien entendu. Les pièces sont très grandes, vos coups ont dû se perdre, dit-elle en lui souriant, je m'appelle Joséphine Buck. 

La vieille femme prend la main tendue et la garde un instant entre ses robustes menottes. 

- J'attendais votre arrivée avec impatiente. Je m'appelle Maggie Prince, l'intendante du château. Je suis venue vous aider à trouver vos marques. J'habite le petit cottage dans le parc.

- Je suis enchantée de vous connaître. C'est une sublime demeure. J'ai tellement hâte de commencer les travaux. Oh, mais j'y pense ! Peut-être pourriez vous me conseiller quelques artisans du coin ? 

- Ce sera avec joie, mademoiselle. Mais avant tout,  je vous ai apporté de quoi vous restaurer. La cuisine date un peu, je doute fort que vous sachiez allumer une cuisinière à charbon. 

- Et vous avez raison, dit la jeune femme d'un rire léger. 

Suivant l'intendante, Joséphine tente de mémoriser  le chemin vers la cuisine. C'est un vrai labyrinthe. 

- Prenez place autour de l'îlot, mademoiselle, je vais vous préparer du thé pour accompagner votre repas. 

Elle y dépose un énorme panier contenant différents pâtés du pays, des énormes tranches de pain et quelques fromages à croûte. 

- Je fais le pain moi-même, dit-elle fièrement, le fromage provient de la ferme d'à côté et les pâtés ...  du supermarché. 

Elle lui fit un petit clin d'œil tout en allumant le vieux fourneau. Quelques minutes plus tard, elles entamèrent le copieux repas. 

- Pourriez-vous me parler un peu de ce château ? Je ne comprends pas pourquoi les anciens propriétaires l'ont laissé dans un tel état, ils avaient pourtant les moyens de le moderniser.
La vieille femme semble légèrement mal à l'aise.

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