Aujourd'hui, le ciel était découvert et nous avions profités toute la journée des rayons du soleil. Nous nous étions baladés toute la journée, au grès des envies de chacun, recueillant les citations écrites dans les métros, sur les panneaux où se trouvaient habituellement des publicités, les sourires des gens, une bonne journée. C'était agréable de se laisser porter comme ça, dans l'insouciance et la bonne humeur de tous. Pour une fois, j'avais le cœur léger et la faciliter à converser avec tous sans me vexer. Ma susceptibilité semblait avoir pris des congés, et tant mieux, qu'elle y reste le plus longtemps possible. Nous étions sortis à la station de London Bridge, pour aller sur la promenade qui longeait la Tamise. En sortant, un homme habillé comme au XVII ème siècle nous avez abordés, faisant la promotion de London Bridge Experience. Le regard de Charlie s'était éclairé et il nous avait suppliés d'y aller. Nous lui avons promis de le faire le lendemain. Excellente idée. Ou pas. J'étais le genre de personne à flipper au moindre petit truc. Il en fallait peu pour que je sursaute, et j'avais déjà eu des réactions exagérées. Un jour, quand je vivais encore chez les Johnson à plein temps, Tony s'amusait à se cacher et à me sauter dessus dans les couloirs de la maison. Sous la panique, je m'étais retournée et je l'avais giflé, avant même de comprendre ce qu'il venait de se passer. Mon bras avait agi tout seul.
La promenade, nommée Queen's Walk, était presque déserte, malgré le beau temps. A droite comme à gauche s'étendait un sol pavé, bordé par les magasins d'un côté, et d'un muret en pierre surmonté d'une rambarde de bois de l'autre côté, nous séparant du fleuve, dont les eaux étaient vertes. Des petites vagues faisaient mousser la Tamise. Sur le fleuve, des mouettes et des poules d'eau se laissaient porte au rythme des flots. De temps en temps, un bateau passait. Aussitôt, Jimmy, Elliot et Adam, toujours les trois mêmes, se mirent debout sur le muret, un pied de chaque côté de la barre de bois. Je m'armais de mon appareil photo, c'était précisément le genre de moment que je ne voulais pas oublier, et, avec ma mémoire, c'était possible que le souvenir s'estompe et se modifie. Elliot vacilla, tenta de se rattraper à Jimmy, qui lui-même fut entraîné par le poids de son frère, et s'agrippa à Adam. Evidemment, il ne pouvait pas les rattraper, les deux étant déjà à moitié dans le vide. A travers l'objectif, je les vis basculer de l'autre côté. Un bruit de poids dans l'eau retentit. Paniqués, nous avions couru jusqu'à un escalier – dont l'accès était normalement interdit - qui s'enfonçais dans l'eau de la Tamise, et nous les avions retrouvés trempés, hilares. Sacha et Ella étaient parties leur acheter des vêtements, puisque personne ne voulait rentrer le temps qu'ils se changent.
- C'était futé ça, fit Jimmy à l'intention de son frère, agitant son téléphone détrempé qu'il venait de tirer de sa poche.
- Avoue, c'était quand même drôle, répliqua son jumeau.
- Bof, ironisa le troisième garçon. Maintenant, je suis tout décoiffé.
- Ah, parce que tu te coiffes d'habitude ? me moquais-je, de concert avec les frères Maxwell.
Faisant mine d'être vexé, le garçon tenta de m'attirer dans l'eau. Si lui était trempé et n'avait plus rien à perdre, ce n'était pas mon cas. Je me mis à hurler, et Charlie vida mes poches et récupéra mon appareil photo. Je ne savais si je lui étais reconnaissante de sauver mes affaires ou si je lui en voulais à mort puisque, maintenant, Adam n'avait aucune raison de me laisser au sec. Je me débâti comme je pouvais, mais il me tira tout de même tout au bord de la Tamise. Alors que quelques instants plus tôt, je faisais tout pour lui échapper, je m'accrochais à présent à lui comme si ma vie en dépendait. S'il voulait me faire faire un tour dans les eaux polluées et vaseuses, au moins il viendrait avec moi. Il essaya de me détacher pendant un moment, puis, d'un coup, un des jumeau – je n'eu pas le temps de voir lequel – nous poussa. L'eau était glacée et transperça ma peau, me pénétrant jusqu'aux os. Qui avait l'idée de se jeter dans la Tamise en plein mois de novembre ?! J'eu le reflexe de fermer la bouche, je ne voulais pas être contaminée par la saleté du fleuve. J'émergeais en frissonnant, et me mis à pourchasser Adam, ne m'arrêtant que lorsque les filles revinrent, les bras chargés de vêtements. Charlie les avait prévenus de mon plongeon, et sa copine me tendit un jean, un débardeur et un pull crop. Elles avaient même pensé à prendre des sous-vêtements.
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19 Days
RomansDepuis des mois, Clélie déménage de foyers en familles d'accueils, après avoir fuit le domicile maternel. Ne sachant plus quoi faire, l'assistante sociale chargée de son dossier lui demande de retourner passer deux semaines chez sa mère, à Londres...