Chapitre 19.

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Je me réceptionnais dans l'herbe, et tombais nez à nez avec les parents Maxwell. Je m'excusais et m'enfuyais sous leur regard ébahis. Heureusement, nous étions au rez-de-chaussée et je ne m'étais pas fait mal en sautant. Je me mis à courir dans la rue, ne sachant où j'allais. Mes pas me menèrent au parc où nous nous étions promenés avec les jumeaux et leurs parents. Je m'arrêtais, à bout de souffle. Je m'affalais dans l'herbe, et me laissais le droit de pleurer. Mais aucune ne larme ne vint. Donc, pour des choses plus futiles, je pleure, mais pour ça, non, alors que c'est important ? Mais quelle logique. J'arrachais rageusement l'herbe autour de moi, me blessant volontairement les doigts en creusant la terre. Moi qui me posais la question de ce qu'ils penseraient de moi quand j'allais être en France, j'en avais maintenant une idée très précise. Ils se souviendraient de moi comme la fille avec qui ils s'étaient disputés, ils me verraient comme quelqu'un qui est venue juste pour tenter de les séparer, comme quelqu'un qui faisait de sa vie un drame. Et ils avaient peut-être raison sur ce point-là. Je surréagissais peut-être. Certainement même. Mais je ne pouvais pas m'en empêcher. J'avais été stupide de penser que si je voulais revenir à Londres, il y en aurait toujours un qui m'ouvrirait sa porte, de penser que ces deux dernières semaines avaient été les plus belles. Mais non, c'était un passe-temps pour eux, de s'occuper de l'ado rebelle et dépressive que j'étais, puisque j'allais disparaitre dans la nature quelques temps après. En plus, dans la précipitation de mon départ, j'avais laissé mes affaires chez les Maxwell, et si je voulais les récupérer, j'allais devoir leur faire face à nouveau. Quelle débile !

- Clélie ! entendis-je.

C'était Adam, qui arrivait, à l'entrée du parc. Aussitôt je me relevais me remis à courir. Il était plus rapide que moi, mais je tentais quand même ma chance. Pourquoi m'avait-il suivie ? J'entendis ses pas derrière moi, et tentais d'accélérer, mais j'avais muscles et poumons en feu. Je n'étais pas assez sportive, et de toute façon, une cause désespérée. Il me ceintura et je vis l'herbe sur ma droite se rapprocher, et la violence du choc m'assomma quelques secondes. Une douleur aigue fusa dans mon épaule qui avait percuté le sol.

- Tu n'étais pas obligé d'être si violent, fis-je.

- Désolé, s'excusa-t-il en grimaçant. Mais je voulais être sûr que tu ne te débattes pas. On doit parler, je crois.

- C'est bon, je ne bouge pas, promis. De toute façon, je n'ai plus de forces.

Il ne me lâcha pas pour autant, et s'assit en silence.

- Je suis trop bête. Dis-je.

- Quoi ?

- On s'est échauffées, juste parce que je ne voulais pas dire que mon père m'avait abandonnée, avec une mère qui déclare haut et fort qu'elle ne veut pas de moi, et qui ne trouve rien de mieux de se remarier à quelqu'un qui me déteste et me traite comme une ordure, au point où j'ai choisi de partir vivre chez mes grands-parents. Et quand l'un est mort, l'autre a décidé de se laisser mourir, sans penser à ce que je ferais ensuite. Et en plus, j'ai insulté Ella.

- Parfois, elle le mérite. Ce qu'elle ne mérite pas, c'est que tu lui as dit qu'elle se nourrissait du malheur des autres. Elle en a bien assez du sien.

- Hein ?

- Ses parents travaillaient à Médecins sans frontières, en Afrique. Un jour, il y a eu un coup d'état, et ses parents ont été appelés pour soigner des gens qui avaient été enfermés dans un stade. Les clôtures avaient été électrifiées et de nombreuses personnes ont été électrocutées en voulant les escalader pour fuir. Parce que d'autres tiraient dans la foule, et se servaient de gaz lacrymogènes. Elle a passé la soirée enfermée avec Tom, son grand-frère, à attendre que ses parents rentrent. Pendant ce temps-là, il y avait des habitants qui se faisaient fusillés et égorgés en bas de son immeuble.

19 DaysOù les histoires vivent. Découvrez maintenant