Maudit

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Paris, samedi 13 mai, 14:43 ; le ciel est parsemé de quelques nuages et le soleil rayonne. Les voitures klaxonnent comme à leurs habitudes à ce carrefour pourtant pas si important. Un magasin fait l'angle de l'avenue qui se prolonge après ce fameux carrefour. Un magasin de vêtement chic situé sur deux étages dans cet immeuble.
Un jeune homme arrive de la rue qui fait face à la boutique. Élégamment habillé, d'un milieu social plutôt très aisé, faraud et au regard méprisant. Il se dirige vers l'entrée en regardant à peine les passants qui doivent se mouvoir pour ne pas se faire bousculer par cet ingrat personnage. Il rentre et regarde de tout coté de sorte à ce que quelqu'un le repère et vienne s'occuper personnellement de lui. Une femme s'avance alors prestement:
« Bonjour monsieur, que puis-je f... »
Elle n'eut même pas le temps de terminer sa phrase pourtant si polie que le vilain l'avait coupée d'un geste désinvolte de la main sans même ne l'avoir ne serait-ce qu'un instant regardé dans les yeux.
« Je n'ai pas le temps, voyez-vous? Il me faudrait une tenue tout à fait charmante, à la hauteur de mon envergure et de mon élégance pour le gala de ce soir. Pouvez-vous me trouver cela dans la minute ou bien vais-je donc devoir attendre une seule seconde de plus?
- Bien monsieur, si vous voulez bien me suivre, lui dit-elle, affectée par ces propos. »
Le jeune impétueux la suivi à l'étage afin qu'elle puisse lui présenter les éléments qui constitueraient sa tenue. Il se comporta par la suite comme à son arrivée, sans considérer la moindre part d'humanité qui se dégageait de ces vendeurs qui courraient et transpiraient pour assouvir ses désirs d'homme riche.
Après de longues minutes et des centaines de tenues refusées, le jeune se décida finalement à ne rien acheter. Il fit un scandale avant que tous les vendeurs et vendeuses ne le laissent seul, tant il avait été odieu. Il s'avança alors vers le balcon de l'étage (qui se trouvait dans l'enceinte du magasin) tout en bougonnant. Il regarda tout le monde de haut, comme à son habitude et projeta ensuite son regard vers la rue, qui se figea alors: un lion doré à la crinière teintée partiellement de bleu marchait lentement sur le trottoir entre les passants sans que ces derniers ne semblent le voir.
« Quelle hideuse créature, réagit aussitôt le jeune homme, toujours imbus de lui-même qui ne s'était même pas demandé un seul instant ce qu'un lion pouvait bien faire dans les rues de la ville. Un tel animal ne devrait pas vivre plus longtemps que pour voir un seul instant la lumière du jour. Sa vile apparence pourrait rendre aveugle un lépreux. Je ne peux supporter cette horreur une seconde de plus! Sur ces mots, l'homme prit les escaliers. »
Ce lion majestueux s'arrêta net et tourna aussitôt la tête vers l'homme qui était trop occupé à s'énerver une fois de plus contre le personnel pour ne le remarquer. Son pelage se hérissa et changea de couleur pour passer du doré et bleu au noir et rouge. Ses yeux luisant semblaient s'être embrasés alors qu'il continuait de fixer intensément celui qui l'avait insulté quelques secondes auparavant. Son pelage repris sa couleur originelle peu de temps après et le lion repris son chemin.
« Vous aurez de mes nouvelles! Hurla l'homme tout en sortant du magasin. Gredins! »
Il se dirigea alors vers le passage piéton pour traverser. Sur les clous, son oeil se posa alors sur ce qu'il supposait être une statue mais n'en était en fait pas du tout une. C'était en réalité une lionne vivante qui descendit alors de son muret afin de rejoindre le trottoir. Elle s'assit alors tout en fixant le jeune, qui s'était arrêté en plein milieu de la route. Une voiture le klaxonna soudain et des jurons sortirent par la fenêtre. L'homme s'avança alors au niveau du terre plein pour piéton qui séparait le passage clouté en deux tout en suivant la voiture des yeux un court instant et redirigea son regard dans la direction de la lionne. Elle n'était plus là. L'homme fit alors demi-tour et se redirigea vers le trottoir du magasin. Il marcha vers l'avenue et n'entendit soudainement plus que des cliquetis qui résonnaient derrière lui. Il n'y avait plus personne dans l'avenue subitement et l'anxiété le saisit si brusquement qu'il en devint aussi pale que de la porcelaine. Le ciel se teinta d'un violet sombre et les nuages devinrent aussi lugubres et ténébreux que l'Enfer (enfin je suppose que si l'Enfer existait il arborerait certainement cette noirceur profonde). Il se retourna alors, et constata avec horreur que la lionne s'avançait à pas lents vers lui, tout en le scrutant de ses yeux verts intenses. Le jeune prit alors la fuite, en hurlant de frayeur cette fois-ci et en bousculant un couple bourgeois qui avançait face à lui.
« Mais qu'est-ce qui lui prend à cet imbécile? Lança la bourgeoise.
- Vous l'avez très bien dit ma chère, c'est un imbécile. Et j'ajouterais même que cet espèce de fou furieux ne sait même pas quelle erreur effroyable il vient de commettre, lui répondit son mari qui semblait photographier du regard l'homme qui s'éloignait dans la rue. »

Rêve égyptienOù les histoires vivent. Découvrez maintenant