*Chapitre 23*

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Sakura était allongée sur son lit, l'air pensive. Elle fixait inlassablement le plafond, sans véritablement y faire attention. Elle se ressassait les événements de la veille : cela faisait maintenant une journée qu'Aimée avait disparue. Alors que le reste de l'équipe était paniqué à l'idée que la jeune fille se soit faite enlevée, elle voyait les choses d'un autre œil : à son humble avis, son amie s'était quelque peu laissée faire, car l'enlèvement était sa seule excuse valable pour rejoindre son amant, autrement personne ne l'y aurait autorisé. Ses pensées se dirigèrent vers Dio, pour qui elle ressentait à présent un peu de pitié. Elle savait qu'il n'était pas amoureux d'elle- ou du moins elle l'espérait grandement- mais il se faisait pas mal de soucis pour Aimée, qui quant à elle ne devait pas être malheureuse le moins du monde. Elle hésitait à lui dire toute la vérité, mais elle compris finalement que ce n'était certainement pas à elle de le faire.
- N'empêche, c'était assez brusque...
Soudain, la tirant de ses réflexions, l'espace sembla se fissurer, et une étrange poche noire s'y forma. Un homme en queue-de-pie suivi par une adolescente qu'il tenait par la main en sortirent. Ils ne la remarquèrent pas immédiatement.
- Alors c'est ça ta chambre ? C'est pas vraiment le grand luxe... Souffla l'homme, presque écœuré.
- C'est un internat Tyki, évidemment que ce n'est pas le grand luxe.
- Tss, quand je pense que je t'ai laissé dormir ici pendant tout ce temps ! Si j'avais su, je t'aurais emmené beaucoup plus tôt.
Sakura se redressa, abasourdie.
- A-Aimée ?!
L'intéressée fit volte-face, surprise, puis offrit un sourire gêné.
- Je suis de retour...
La grande brune s'extirpa de son lit, apparemment remise de ses émotions.
- Tu nous en auras fait, une frayeur ! Enfin bon, tu es revenue, c'est l'essentiel...
Elle se tourna vers Tyki, intriguée.
- Et vous ? Que faites-vous ici ? Je veux dire... vous n'aviez vraiment aucun intérêt à la ramener.
- Ça c'est bien vrai. Et ça ne m'enchante guère d'être ici... grommela-t-il. Mais maintenant que je suis là, je veux parler à vos supérieurs, les deux hunters...
Sakura échangea un regard avec Aimée, qui semblait elle aussi approuver.
- Monsieur Morales doit être entrain de s'entraîner. Les informa-t-elle. Allons le rejoindre.
Ils acquiescèrent et quittèrent la petite chambre. Ils longèrent les longs couloirs formant le labyrinthe qu'est Saint Gabriel, mais que les deux amies semblaient déjà connaître par cœur. Aimée lança un regard à Tyki, qui n'était apparemment pas à son aise : il avait la désagréable impression de s'être jeté dans la gueule du loup. Ce qui n'était pas très éloigné de la vérité. Ils finirent par arriver à la salle d'entraînement, où se trouvait, seul, un homme d'une quarantaine d'années maniant une lance avec force et agilité. Sakura se racla la gorge, et Morales se stoppa dans son effort pour leur faire face. Lorsqu'il vit Aimée, ses yeux s'écarquillèrent.
- Aimée... tu es revenue ?
A la vue de Tyki il se braqua, prêt à attaquer. L'accusé leva les mains en l'air, signe de sa capitulation.
- Pour l'instant, je ne suis pas votre ennemi. Mais dépêchez-vous de rassembler votre équipe, je n'ai pas une seconde à perdre. Lança-t-il, exaspéré.
- S'il vous plaît monsieur... Insista Aimée.
Sans trop comprendre le pourquoi du comment, il sortit un téléphone de sa poche et sembla envoyer un message. Quelques minutes plus tard, tous déboulèrent dans la grande salle. Ils se ruèrent tous sur la revenante, et Natalia fit immédiatement apparaître son arme, la pointant sur l'homme qui l'accompagnait.
- Ça c'est un accueil des plus chaleureux. Remarqua-t-il, amusé.
- Que fait cette raclure ici ?! S'écria la hunter, tremblante de rage.
Aimée voulut s'interposer, mais son amant prit la parole avant.
- Ne vous en faites pas, je ne suis que de passage. Simplement, je suis venu vous faire une... demande.
Natalia sourit.
- Ça te coûte de dire que tu as besoin de notre aide, pas vrai ?
- Tss, je n'ai pas envie de répondre à vos petites provocations puériles, j'ai plus urgent à faire.
Elle rengaina.
- Je t'écoute, mais fais vite.
Il se frotta l'arrière du crâne, cherchant ses mots. Par où commencer ? Il y avait tellement à dire.
- Je ne peux pas tout vous expliquer en détails, mais en gros, le but d'Irène est de créer une pierre aux pouvoirs inimaginables, et elle a pour cela besoin de sacrifier Aimée.
Le silence tomba. Il était lourd, pesant, signe que tous avaient du mal à encaisser le coup. La jeune femme n'avait pas encore seize ans qu'elle était déjà menacée de mort par des personnes dont on ne savait rien. Il y avait de quoi s'inquiéter.
- Et qui nous dit qu ce n'est pas un mensonge ? Questionna Rin. C'est peut-être l'une de vos petites manigances pour obtenir ce que vous désirez de nous.
Tyki soupira.
- Pensez ce que vous voulez, ce n'est pas mon problème. Tout ce que je souhaite, c'est que vous protégiez Aimée. Le reste n'a pas d'espèce d'importance.
Ils étaient tous bouche bée, ne sachant pas comment réagir. Cet homme qu'ils voyaient comme un monstre sans cœur prenant un malin plaisir à manipuler leur jeune amie, semblait en réalité énormément se soucier de la sécurité et du bien-être de celle-ci. Même Dio n'avait rien à en dire. Morales s'avança, un air bienveillant et reconnaissant sur le visage.
- Eh bien je vous remercie de nous avoir prévenu pour ce qui est des plans de votre collègue. Et pour Aimée, si l'une de nos élèves est menacée par une quelconque puissance extérieure, il est bien évidemment de notre devoir de la protéger. Vous pouvez être rassuré.
Tyki parut satisfait. Il pivota vers Aimée, et lui caressa la joue.
- Bien, je peux partir l'esprit tranquille maintenant.
- Hein ?
Il s'éloigna et créa un portail, prêt à s'en aller. Mais l'adolescente le saisit par le bras, l'empêchant de faire le moindre pas.
- Tu ne vas quand même pas partir ? S'indigna-t-elle, la gorge nouée.
- C'est ce qu'il y a de mieux à faire : Irène est rancunière, elle cherchera avant tout à se venger de moi. En m'éloignant de toi, je te fais gagner du temps.
- N-ne dis pas n'importe quoi... « Gagner du temps » ? Tu as l'intention d'y laisser la vie ?
- Seul contre Irène et son acolyte, je vais y laisser la vie.
Tout s'écroula autour de l'adolescente. Il avait l'intention de se sacrifier pour qu'elle puisse vivre. Elle ne pouvait pas le laisser faire. Il fallait qu'elle l'en empêche. Elle avait besoin de lui, il ne pouvait pas mourir. Il en était hors de question.
- Tu ne peux pas faire ça ! Je te l'interdis ! Tu ne peux pas m'abandonner comme ça !
Elle fondit en larmes. Tyki se crispa, attristé par la scène qu'il venait de provoquer.
- Aimée...
- Et si je t'embauchais ?
L'homme sursauta et releva la tête, plantant ses petits yeux noisette dans ceux bleu océan de Natalia, qui venait de parler.
- Je vous demande pardon ?
- Tu as parfaitement entendu, ne me le fais pas répéter.
Il émit un rire nerveux.
- Je crois que vous ne réalisez pas l'effort surhumain que j'ai fait pour venir demander votre aide. Je hais les hunters, je vous hais tous autant que vous êtes, et si vous ne comptiez pas pour Aimée, je vous aurais déjà tous les sept tués depuis longtemps.
- Et ça m'en fait une belle. Répondit la femme avec toute l'indifférence du monde. Je ne te demande pas de nous prêter main-forte pour déjouer le plan de ton amie, mais uniquement d'assurer la protection d'Aimée. Ça nous permettra de nous concentrer sur notre véritable objectif.
Il fronça les sourcils.
- Et qu'est-ce que j'y gagne ?
- Mine de rien, le travail de hunter paie bien : j'ai amassé une fortune plutôt conséquente. Tu seras grassement rémunéré. De plus, tu sais sûrement que les compatibles refusant de devenir des hunters et prenant la fuite sont condamnés à mort par l'Église. J'obtiendrai l'autorisation pour Aimée de quitter nos rangs, à ses dix-huit ans bien évidemment, pour que vous puissiez vivre sans être traités comme des fugitifs toute votre vie.
Tyki reconsidéra sa proposition un moment, puis il souffla.
- Très bien, j'accepte. Mais j'assurerai uniquement la protection d'Aimée. Je ne vous aiderai en aucun cas.
Elle lui tendit sa main.
- Ça me va.
Il s'en saisit après une brève hésitation.
- Alors marché conclut.

Last Stardust || Inspiration D.Gray ManOù les histoires vivent. Découvrez maintenant