The only one awake

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Elle ne sut jamais si les entités se croisaient réellement par hasard. Elle ne sut jamais si le hasard était réellement une question de perception, comme elle l'avait toujours pensé. Ou si l'écriture des choses était figée comme des mains à l'intérieur d'une photo en noir et blanc. Ce qui est beau ne l'est qu'à travers la façon dont on le perçoit, et la perception est un concept qui n'a le droit d'être défini que par des vagues de pensées et de mots, parce que, chacun de ces mots dépend lui aussi d'une certaine perception. Ces préceptes ne sont ni inaltérables ni dignes de la moindre attention, mais ce sont les siens et elle avait confiance en eux.

Le soleil cet après-midi grillait les insectes sur le bord des fenêtres. sans doute cela l'aurait-elle préoccupée si la scrutation des passants n'était pas aussi absorbant que cela. Elle du d'ailleurs basculer en arrière, car elle était en train de se faire happer par l'aura des dizaines de personnes qui marchaient d'un pas lent, et rapide à la fois, au beau milieu de l'allée piétonne. Ils ne sont même pas vraiment là, personne n'existe. Elle à tout inventé, ce monde n'existe que parce qu'elle le veut bien. Sans même qu'elle s'en soit rendue compte, elle était également en train de s'enfoncer la moitié de l'esprit dans le caniveau. Le bas de son jean sentait les gouttes d'eau qui remontaient en longs filaments obscurs jusqu'à ses mollets. Elle s'empressa donc le retirer et le lança sur la tête d'une personne, qui n'avait ni sexe ni âge, et qui essayait de se mêler à la foule. Elle ne pouvait pas la voir. Personne ne la voyait. Elle était là depuis des heures, peut-être plusieurs années qui sait. Le temps a bien assez de souffle pour qu'on le fasse courir un peu. Tous les êtres qu'elle observait passer semblaient différents, mais pourtant l'ennui noyait l'intérieur de ses yeux tant ils se ressemblaient tous. Décidemment tout le monde essayait de la noyer aujourd'hui. Elle n'avait rien vendu, personne ne semblait comprendre qu'ils en avait le droit, de lui parler de la voir de la toucher, et de la comprendre. Elle se demandait si c'était réellement interdit ou si c'était juste une question de bon sens de faire comme si elle n'existait pas. Oh il y avait bien des gens qui faisaient semblant, car elle essayait de capter l'attention autour d'elle. Avec des gestes, des sourires, elle parlait souvent, elle parlait beaucoup, et bien que la plupart du temps la meilleure conversation était celle qu'elle tenait continuellement avec elle même, il lui plaisait de tester les autres. Elle allait elle venait, questionnant les passants, sur leur passé, leur point de départ, mais jamais sur leur destination. Car pour elle, pousser quelqu'un à dévoiler son but n'était pas très poli, surtout si cette personne n'en avait pas. Cela risquerait de la déstabiliser et pire encore, cela pourrait altérer sa perception. Lorsqu'elle parlait, les gens regardaient dans le vide, bercés par leurs faux sourires ,pressés de mettre un terme à cette perte de temps. Personne n'avait jamais accordé la moindre valeur à ses mots. Pourtant elle n'en démordait pas. Elle continuait de chercher. Ce qu'elle cherchait? Cette question n'est pas franchement intéressante, mais lorsque qu'elle trouvera, ce le sera pour sûr. Ses pieds nus, rougis par le soleil et l'humidité des sols, remuaient dans l'espoir de décoincer les orteils d'entre les lourdes dalles de pierre, elle tendait vraiment à prendre racine en ce moment c'est fou. Elle avait trop observé, elle n'arrivait plus à se concentrer, et son regard se perdait dans la foule sans même la voir. Elle s'assit à une table qui s'était approchée sans un bruit, et cria pour qu'on lui apporte du thé. Comme personne ne se manifestait, elle cria plus fort, et on lui lança une théière. elle se brisa sur son épaule dans un doux fracas, mais eut la décence de se reconstruire rapidement pour lui permettre de boire une dernière fois. Elle porta la théière fissurée à ses lèvres, le thé était froid, mais il sentait l'aventure et les champignons, elle le but d'une traite, et put respirer à nouveau. Sitôt que la dernière goutte fut tombée au coin de ses lèvres, la porcelaine disparu en un million de petits fragments épars qui faute de vent recouvrirent la table. Le soleil était maintenant en train de faire sortir les gens heureux, ceux qui ne sortaient que pour montrer qu'ils profitaient des derniers instants de lumière dont ils souhaitaient être au coeur. C'est le signal pour Noa, car oui elle avait un prénom. Elle traversa la rue en évitant les troupeaux de papillons qui égaraient les âmes de leurs chemins, et commença à rassembler ses affaires, elle emballa toiles, carnets et chevalet dans un grand drap qui restait toujours blanc malgré tous les soucis qu'il voyait passer. Elle prit le très lourd paquetage à bout de bras, et se mit à marcher, ignorant le fait qu'il faisait un peu froid pour se passer de pantalon. Le mois de Novembre, elle ne l'appréciait guère. Il ressemblait bien trop au mois de février, excepté que celui ci était encore pire. Elle marcha, longeant de plus en plus de rues, dont les maisons s'étiraient toujours plus haut, couvrant presque totalement le ciel avec leurs minces toits en triangles. Il n'y avait personne ici, elle était sûre que personne n'habitait dans ce quartier, ces maisons n'avaient aucune raison d'être là, et elle trouva ceci bien triste mais qu'à cela ne tienne, elles n'avaient pas qu'à se laisser construire. Le soleil avait presque disparu, ses derniers rayons s'étiraient dans un râle, et il profitait de ses derniers instants pour tenter de séduire la ronde et belle lune, qui prenait déjà sa place, attendant modestement de pouvoir offrir son éclat au silence hypocrite de la nuit. Elle ne prêtait guère attention au soleil, celui ci avait le visage contrarié, et pour montrer à la lune qu'elle ne brillerait pas sans lui, il brilla une dernière fois avec la force de tout un cycle de midis puis s'éteignit complètement. La lune versa une larme, elle ne pourrait pas exister cette nuit. Aussitôt le ciel se couvrit de lourds nuages bruns et chargés de pluie mais sans éclairs. Le grondement du tonnerre était éteint Noa ne se mit pas à courir, quelle importance puisque la pluie s'abattrait de toute façon. Elle sentit une infinité de gouttes s'écraser sur elle sans préavis, l'averse était brutale et était arrivée sans douceur. La peinture des toiles se mêla aux gouttes, et ensemble elles dansèrent un ballet, redessinant tout le tracé et toutes les lignes du tableau à travers le drap blanc. Elle avait hâte de voir ou est-ce-que cet évènement avait transporté ses toiles, et dans quel univers est-ce qu'elle les retrouveraient. Mozart jouait dans sa tête, couvrant presque totalement le bruit de la pluie, c'était effectivement l'un des plus beaux alliages qu'elle n'ai jamais entendu. Sa peau, glacée et frissonnante, se teinta de bleu, et se mis à briller au travers de la nuit. Elle ne savait pas ou est-ce qu'elle était censé habiter, et de toute façon, elle était sûre que ses affaires l'avaient suivie. Elle s'arrêta devant une porte, à bout de souffle d'avoir tant marché, puis elle ferma les yeux, et elle demanda à la porte d'être déverrouillée. Ensuite, elle entra. Et elle dit merci. Elle monta les marches, et s'arrêta au deuxième étage, poussa la lourde porte de bois et s'écroula dans l'appartement vide. Cela faisait trop longtemps qu'elle n'était pas revenue, les jours duraient des années en ville. Ses affaires l'avaient sûrement oubliée et sont parties voir ailleurs, où elles ont disparu, les objets n'aiment pas la solitude. Mozart avait arrêté de jouer dans son esprit, cela faisait du bien, elle pouvait se concentrer uniquement sur le bruit des gouttes de pluie qui s'écroulaient sur les grandes baies vitrées de l'appartement. Elle s'est allongée sur le sol, imbibant le sol de toute l'humidité qui s'était accrochée à elle pendant le trajet. le plafond était blanc, les murs étaient blancs. Sa peau était redevenue blanche aussi. Elle ne voulait pas dormir. Elle avait peur de disparaître. Elle ferma les yeux en essayant de mettre un terme au flot continu de ses pensées.

D'un seul coup. Il s'arrêta de pleuvoir. Et le silence se mis à grandir. Il devient si oppressant qu'elle cru vraiment qu'elle était désormais sur le point de ne plus exister. Déjà qu'elle avait constamment l'impression d'être la seule personne du monde à exister et a être éveillée pour de vrai. Elle ne dormirait pas cette nuit c'est sur. Mais il le fallait, car l'insomnie engendre la folie. Et perdre sa lucidité était la dernière chose dont elle avait besoin en ce moment. Alors elle se leva, et tourbillonna sur elle même, pendant plusieurs minutes, de plus en plus vite, jusqu'à ce que tout devienne flou et que les contours des choses ne soient plus que des lignes dansantes qui vous font perdre l'équilibre. Elle tourna à travers toute la pièce, et fini par se heurter à un mur, tourna encore un peu, puis ses jambes se dérobèrent sous elle? elle s'écroula, et perdit connaissance. Ce n'est peut être pas la meilleure façon qui soit de s'endormir,
Mais c'était tout ce qu'il lui restait comme possibilité pour vaincre sa peur de se faire engloutir par le vide à l'intérieur du monde.

Un Regard et le Jour TombeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant