partie unique

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𝘪 𝘭𝘰𝘷𝘦𝘥, 𝘢𝘯𝘥 𝘪 𝘭𝘰𝘷𝘦𝘥, 𝘢𝘯𝘥 𝘪 𝘭𝘰𝘴𝘵 𝘺𝘰𝘶... 𝘢𝘯𝘥 𝘪𝘵 𝘩𝘶𝘳𝘵𝘴 𝘭𝘪𝘬𝘦 𝘩𝘦𝘭𝘭

Soobin referma la porte de sa chambre, un soupire s'échappa de ses lèvres gercées alors qu'il envoyait d'un geste usuel son sac de cours à côté de son bureau. D'un pas lent, il se laissa tomber sur sa chaise roulante. Le froid, la fatigue – morale comme physique –, l'envie de mettre le monde sur pause, l'espace d'un instant, juste une petite minute, qu'il se repose, c'est tout ce que le noiraud demandait, alors que son corps un peu trop fin s'enfonçait dans son siège. Mais il savait pertinemment que le monde ne s'arrêterai pas de tourner pour sa petite personne, il le savait parce que ça faisait trois mois maintenant que cela durait, trois mois que l'hiver le frigorifiait, treize semaines qu'il rentrait épuisé avec encore une pile de devoirs à faire, quatre-vingt-onze jours qu'il se sentait doucement sombrer dans une mélancolie terrifiante. Il jeta un œil à la petite horloge posé sur son meuble de travail.

Deux-milles-cent-quatre-vingt-dix heures qu'il ne faisait plus partie de sa vie.

Il se redressa, il ne voulait pas y penser. Il ne devait pas y penser. Il devait continuer sa routine, faire ses devoirs sans se poser plus de question, sinon il craquerait, et c'était la dernière chose dont il avait besoin. Il essuya ce sentiment amer qui commençait à lui prendre le cœur et sorti le travail qu'il avait à faire. Il y passa deux heures, deux heures environs, sept-mille-deux-cent-quarante secondes à donner ce qu'il restait de son corps et de son âme à des matières qu'il n'appréciait pas pour la plupart. Mais ça non plus, il ne devait pas trop y penser, s'il se répétait que plus rien n'allait, il allait finir par s'en rendre réellement compte, ignorer que sa vie lui plaisait de moins en moins semblait bien plus facile que d'accepter cette réalité. Il se persuadait que dès les premiers rayons de printemps, tout cela ne serait plus qu'un mauvais souvenir, ses doigts incapables de bouger à cause du froid, ses paupières lourdes de fatigue, les souvenirs de son sourire, les images de leur fin, de ses yeux qui le cherchent et ne le retrouveront plus jamais comme ils le faisaient autre fois.

Il s'étira, incertain du réel bien que ce geste pût lui procurer. Il tourna la tête vers la fenêtre de sa petite chambre pour s'apercevoir qu'il neigeait dehors. Il lui sembla que les flocons tombaient au ralenti, comme s'ils tentaient de lui faire garder espoir, que le temps passait plus doucement l'espace d'un instant, qu'il puisse reprendre son souffle. Mais cette vision ne fit que lui rappeler les fois où il avait lancé des cailloux à cette même fenêtre, ces après-midis où il se précipitait au bord de celle-ci, l'ouvrait et découvrait qu'en bas, il était là, un sourire aux lèvres. Ce sourire qui n'avait jamais cessé de le faire tomber encore plus amoureux, ces lèvres qu'il avait tant de fois cueillit des siennes d'un geste naturel, doux, chaleureux, passionné et même désespéré quelque fois. Ces bras qui l'avaient tant de fois étreint, souvent pour lui montrer ô combien il l'aimait, une seule fois pour lui demander pardon, la dernière fois...

Poc.

Soobin cligna des yeux.

La fatigue lui pesait trop, il devait rapidement enfiler un pyjama avant de se glisser sous ses couettes. Il n'avait pas le temps pour un dîner, s'il venait à avoir des illusions auditives, c'était certainement qu'il venait d'atteindre un niveau d'épuisement conséquent.

Poc.

Son cœur se serra.

Il n'avait pas rêvé.

Doucement, il se leva, et se dirigea à pas de loup jusqu'à sa fenêtre. D'un geste hésitant, il posa ses mains sur le rebord de cette dernière, il ne respirait plus, il cru réellement que le temps s'était arrêté.
Il était là.

╺╸LOST YOUOù les histoires vivent. Découvrez maintenant