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On disait souvent que les garçons avaient la vie plus facile que les filles.
Parce que les filles elles, elles devaient être d'une certaine manière. Douces, délicates, polies, obéissantes. C'étaient sur elles qu'on se reposait le plus souvent au sein d'une famille. On s'accommodait d'elles pour les tâches ménagères, pour la garde d'enfants. Elles devaient répondre à tout plein d'exigences. En plus de cela, elles faisaient l'expérience de choses que les garçons ne connaîtraient jamais. La grossesse, l'accouchement, les règles.
Mais Jisung, lui, n'était pas du même avis. Oui, les filles avaient la vie dure, il en avait conscience. Mais elles au moins, elles avaient du soutien. On en parlait beaucoup. Mais pour les garçons, c'était tout autre.
Là où il se trouvait, et sûrement partout ailleurs comme il le pensait, les garçons étaient pareils. Ou du moins, ils devaient être pareils. Forts, virils, intrépides. Il venait même à se demander si leur société ne voudrait pas plutôt qu'ils soient insensibles. Quand il pleurait, un garçon qui pleure, on le regardait avec tant de mépris, on riait tellement de ces garçons. On leur imposait tellement de choses, comment ils doivent s'habiller, comment ils doivent s'exprimer, qu'est-ce qu'ils doivent aimer, qu'est-ce qu'ils doivent ne pas aimer... comment ils doivent vivre finalement.
Étrangement, sur ce point là, les filles avaient l'air d'avoir plus de tranquillité. Quand une fille se démarquait des autres, par son comportement ou même son style vestimentaire, cela provoquait de l'étonnement, parfois du dégoût mais sans plus. Parfois, ce genre de filles réussissait même à devenir populaire auprès de quelques personnes, grâce à sa différence qui devenait une originalité. Mais chez les garçons, jamais.
Jamais un garçon qui sortait du lot ne pouvait espérer recevoir de l'admiration ni même de l'indifférence. Parce que les garçons différents, eux, ils étaient mal vus. Si mal vus qu'ils ressemblaient davantage à une race à exterminer qu'à autre chose. Alors on les isolait et essayait de faire en sorte qu'on ne les voit plus, comme s'ils gênaient, comme s'ils gâchaient le paysage.
Jisung était homosexuel. Et il se détestait pour ça. Il se demandait et se questionnait toujours, voulant savoir ce qui n'allait pas chez lui. Pourquoi est-ce qu'il n'était pas comme les autres. Il aurait tant voulu être normal. Il avait l'impression d'être malade. D'être fou.
Alors toute sa vie, il avait cherché à dissimuler son secret. À faire comme s'il était comme les autres. Il s'obligeait à s'intéresser aux filles, devait supporter les remarques déplacées de ses amis, éviter le plus possible de les regarder, de les toucher, de peur de se trahir.
Mais après plusieurs années à vivre de la sorte, ça s'était finalement retourné contre lui. Ses réactions étaient si peu naturelles, son regard était si fuyant avec les garçons, qu'on avait fini par savoir. C'était au collège que ça s'était passé. Ce jour-là, il avait perdu ses amis, sa réputation pourtant bonne s'était complètement dégradée, et plus que tout... Il avait perdu son meilleur ami. Son meilleur ami dont il était tombé amoureux.
