Louise passa le reste du week-end à attendre la matinée du lundi pour enfin connaître davantage la véritable situation d'Alice. Au fond, la jeune fille était partagée : elle souhaitait découvrir ce qui n'allait pas pour l'aider, mais elle ne pouvait pas non plus espérer que les choses ne se présentaient pas bien pour Alice. Étrangement, Sophie et ses parents n'avaient pas relancé le débat au sujet de l'attitude que la jeune collégienne avait eue. C'était comme si rien ne s'était passé, ou que tout le monde était passé à autre chose. Cette dernière idée attristait Louise qui n'arrivait toujours pas à comprendre pourquoi des « bonnes manières » empêchaient d'aider quelqu'un. La jeune fille avait assimilé le fait que l'on ne pouvait pas se présenter spontanément devant quelqu'un pour l'aider, alors que les situations peuvent être très délicates parfois. Cependant, pourquoi faire primer les convenances sur l'aide réelle. Une main tendue vaut-elle réellement moins que quelques courtoisies ? Pour Louise, c'était clair : elle préférait aider, quitte à légèrement surprendre une personne, plutôt que de ne rien faire.
- On peut toujours ensuite expliquer la raison de ce que l'on a fait, se dit la jeune fille.
Le dimanche soir, Louise se risqua à poser de nouveau la question à ses parents. Cette fois, son père et sa mère furent plus bienveillants en expliquant que ce que leur fille voulait faire était évidemment louable, mais que les relations sociales faisaient que l'on ne pouvait pas toujours faire comme on voulait.
- La fin ne justifie pas toujours les moyens, conclut le père de la jeune fille. Il faut que tu comprennes que ce n'est pas toujours facile d'atteindre certains résultats et, parfois, il faut accepter de voir que l'on ne peut pas trop sacrifier.
Dans son lit, Louise méditait sur cette dernière phrase. Après tout, pourquoi devrait-elle absolument suivre ce que son père pensait ? Il était évident qu'elle ne voulait pas lui manquer de respect.
- Mais finalement, c'est son avis, pensa-t-elle. J'ai le droit de penser différemment et de croire que, dans le cas d'Alice, il vaut mieux être maladroit, mais venir en aide à une maman et son bébé.
Le lendemain, Louise monta dans l'autocar, suivie de près par Monsieur le Maire qui s'installa à côté d'elle.
- Vous avez pu trouver quelque chose ?
- Oui... et c'est assez compliqué...
Le maire ne laissa persister aucun suspens et raconta tous ce qu'il avait appris à Louise. Jusqu'à il y a peu, Alice était une femme mariée, heureuse avec son bébé et son mari. Enfin... c'est ce qu'elle croyait. Le mari est parti du jour au lendemain en ne laissant qu'une lettre dans laquelle il expliquait que « c'était mieux ».
- La lettre ne disait que cela ? s'étonna Louise. On ne peut pas partir comme ça, ce n'est pas possible !
Le maire prit une expression désolée : ce n'était pas normal de partir ainsi, mais c'était ce qui arrivait malheureusement fréquemment... Après un instant, il poursuivit ses explications en indiquant que depuis Alice vivait seule avec son petit Gabin dans une maison à Sturton. L'habitation n'était plus chauffée depuis plusieurs semaines, seule la chambre du petit avait un petit radiateur qu'Alice allumait quelques heures dans la journée. La jeune femme avait également de plus en plus de mal à faire des courses : elle ne pouvait dépenser qu'une dizaine d'euros à l'épicerie, l'association venait tous les trois jours pour apporter un petit complément.
- Mais ce n'est vraiment pas beaucoup. Juste de quoi manger à peu près correctement.
- Mais... Alice ne travaille pas ? Elle n'a pas de famille qui pourrait l'aider un peu ?
- Non... malheureusement, elle a quitté sa famille pour s'installer à Sturton et elle ne peut quitter ainsi le village : ses parents ont déménagé dans une toute petite maison.
- Elle n'a pas de frère ou de sœur ?
- Tous partis à la capitale. Et tu sais que là-bas, les logements sont très chers. Chacun essaye de prendre la dimension juste adaptée à soi.
Après un instant de silence, la jeune collégienne demanda s'il n'était pas possible de retrouver le mari d'Alice, au moins pour qu'il puisse l'aider. Le maire n'était pas non plus rassurant : l'association avait aidé Alice dans la procédure pour divorcer, mais l'ex-mari ne voulait pas payer les frais que le juge avait mis à sa charge, et c'était difficile de faire une procédure pour le forcer.
- Comment peut-on s'organiser alors ?
- Je ne sais pas Louise... j'ai déjà obtenu ces informations par des connaissances, je ne vois pas comment on pourrait aider Alice sans qu'elle le prenne mal. C'est ça le problème finalement : savoir comment est-ce qu'elle réagira et surtout il ne faut pas qu'elle se sente jugée ou qu'elle pense qu'elle fait pitié à ceux qui l'entoure.
- Bien sûr que non, c'est juste qu'il faut aider et c'est tout.
- Je te l'ai déjà dit samedi, ce n'est pas aussi simple. Les personnes qui se retrouvent dans cette situation, même si elles n'ont rien fait, ont juste honte et ne souhaitent pas attirer l'attention sur elles. C'est déjà difficile au quotidien à compter le peu d'argent qu'elles peuvent avoir et gérer les soucis liés à l'argent. Et cela est pire quand il y a des enfants impliqués, d'autant plus quand ils sont encore petits.
- Et si je trouve le moyen de l'aider tout en évitant qu'Alice se sente jugée ?
- Tu auras alors toutemon soutien.
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Calendrier de l'avent 2020 - La quête de Noël
General FictionNoël, quelle belle période pour la plupart, mais pas pour Louise... Vous êtes accro aux histoires de Noël ? Celle-ci, plus originale que l'histoire de Lucy qui rencontre Matthew à la gare et l'invite au réveillon, devrait vous plaire ! Du 1er au 24...