J'écris ces paragraphes le cœur lourd mais lucide. Ce livre est né d'un besoin profond : celui de mettre des mots sur ce que tant de personnes traversent en silence. Longtemps, j'ai porté un fardeau invisible un poids que je ne savais ni nommer, ni expliquer. Depuis l'enfance, j'ai été enfermée dans la comparaison : "Moi, à ton âge, je savais déjà faire ça", "Tu fais exprès, ce n'est pas possible d'être comme ça à ton âge". Ces phrases, répétées comme des mantras, m'ont enseigné une seule chose : je n'étais jamais assez. Ni assez forte, ni assez intelligente, ni assez conforme. Peu à peu, j'ai appris à me taire, à minimiser ce que je ressentais, à camoufler mes émotions pour éviter d'être encore une fois jugée, moquée, ou ignorée. La santé mentale, dans ma culture comme dans tant d'autres en Afrique, reste un sujet tabou. On ne parle pas de mal-être, on ne parle pas d'anxiété, encore moins de dépression. On balaie tout sous le tapis, on spiritualise les douleurs, on ridiculise ceux qui osent demander de l'aide. Pourtant, la souffrance psychique est bien réelle. Elle prend racine dans l'enfance, elle se nourrit du rejet, du harcèlement, de la pression sociale, des traumatismes familiaux... Et elle grandit dans le silence. Ce travail n'est pas une leçon. C'est une libération. C'est mon témoignage, mais aussi le reflet de milliers d'autres voix qui n'ont pas encore trouvé le courage ou la sécurité pour s'exprimer. C'est un cri d'alerte, un geste de tendresse pour toutes celles et ceux qui se sentent seuls dans leur combat intérieur. C'est un espace pour comprendre, pour déconstruire les idées reçues, et pour reconstruire des ponts entre nous dans la compassion et la vérité. Parler de santé mentale, c'est refuser de laisser la honte dicter nos vies. C'est refuser que la douleur reste un sujet interdit. C'est surtout, et avant tout, un acte de survie. Et d'amour.