Nous ne pensions pas que nous serions entendus. Ce n'était pas là notre objectif. Ce que nous voulions, c'était frapper fort.
Quand tu as seize ans et que tu penses que le monde se meurt, tu comprends que l'avenir est déjà une page tournée.
Alors, une dizaine d'entre nous, on a décidé d'agir. On n'était pas des têtes brûlées. On voulait juste exprimer cette colère qui bouillonnait en nous depuis des mois, ce feu qui couvait et qui avait besoin de jaillir avant de nous consumer.
Nos discussions étaient de plus en plus animées. Bill voulait dessiner des graffitis obscènes sur les murs du ministère de l'environnement (il se prenait pour Banksy, le talent en moins). Kerry proposait de lancer des chaussures sur le Président lorsqu'il ferait une sortie en public. Madison optait plutôt pour des œufs pour-ris. Beverley, dans sa phase suffragette, voulait s'enchaîner aux grilles du Sénat. On n'arrivait pas à se mettre d'accord.
Jo, lui, ricanait à chacune de nos propositions. Ça ne changera rien, rien du tout ! répétait-il. Il faut un vrai coup d'éclat.
Tu proposes quoi, alors, Jo ? lui a-t-on demandé.C'est moi qu'il a regardée lorsqu'il nous a expliqué son plan. Je n'ai compris que trop tard pourquoi. Le problème, avec Jo, c'est qu'il était trop charismatique. Personne ne pouvait lui dire non. Alors, lorsqu'il m'a tendu la main en me disant, ce soir, on passe à l'action, je n'ai pas écouté la voix intérieure qui me disait de ne pas le suivre. Je lui ai pris la main et je l'ai suivi.
[Note: Cette nouvelle a été écrite dans le cadre du concours de nouvelles du festival "Etonnants voyageurs" de St-Malo que je n'ai malheuresement pas eu le temps de poster. (l'incipit a été écrit par l'écrivaine Ananda Devi)].
Une lettre d'une suicidée pour changer la vie de deux personnes.
Noire sur blanc, une feuille à l'intérieur d'une enveloppe fermée et oubliée dans un classier vert depuis des années. Elle a peut être dû m'oublier ou peut être qu'elle le fait exprès mais dans tous les cas j'attends qu'on me lise, je suis patiente, très patiente même car je vois de la lumière.