Je m'appelle Keisha.
Et quand j'étais petite, je rêvais d'avoir la peau plus claire.
Je me regardais dans le miroir, et je me disais : "si seulement j'étais un peu moins foncée, peut-être qu'on me trouverait plus belle."
J'enviais les filles avec leurs cheveux longs, qui dansaient dans le vent, les cheveux qui bougent quand elles rigolent.
Moi, j'avais mes boucles serrées, rebelles, que je cachais souvent sous un foulard ou des tresses trop tirées.
Je me souviens de la première fois qu'on m'a appelée "chocolat noir" dans la cour.
Tout le monde a ri, alors moi aussi j'ai ri.
Mais le soir, dans mon lit, j'ai pleuré.
Pas parce que c'était méchant - enfin si, un peu - mais parce que j'y ai cru.
J'ai cru que ma peau était un problème.
Et puis, la vie a continué.
J'ai grandi avec cette idée que pour plaire, fallait ressembler à un certain type de fille.
Les filles de clip, les filles que les gars repostent, les filles à la peau caramel, pas trop foncée, pas trop claire.
Un "entre-deux parfait".
Et puis, un jour, il est arrivé.
Wassim.
Le genre de mec que tout le monde remarque sans qu'il parle.
Reubeu, beau, un peu froid, le regard qui en dit long mais la bouche qui parle peu.
Au début, je me disais qu'il ne me calculerait jamais.
Je n'étais pas son "style", j'en étais sûre.
Mais Wassim, il m'a regardée différemment.
Pas comme les autres.
Il m'a dit un jour, sans détour :
> "Toi t'as un truc, Keisha. Pas comme les autres. Ton regard, on dirait qu'il cache des tempêtes."
J'ai ri, nerveusement. Parce que moi, mes "tempêtes", c'était mes complexes, mes doutes, mes cicatrices invisibles.
Mais lui, il a continué à me regarder comme si j'étais une œuvre d'art.
Et c'est peut-être ça, le plus fou :
J'ai commencé à me voir à travers ses yeux.
Aujourd'hui encore, j'apprends.
J'apprends que ma peau raconte une histoire.
Que mes cheveux, mes traits, tout ça, c'est pas un défaut.
C'est une force, une fierté, une racine.