La relation que Chahinaz a avec son père, elle n'oserait jamais la qualifier de chaleureuse, si d'ailleurs de relation, on peut parler. Sa première décision lorsqu'elle fut majeure était de changer de nom, c'est dire la tension entre eux. Cela dit, de tous les maux qu'elle pouvait accuser le bonhomme, à aucun moment bigame n'avait effleuré son cerveau. Et pourtant, avec sa mort, le secret se dévoile enfin : toutes ces années, il avait entretenu deux familles et cela de manière très différente. Chahinaz, elle, avait eu le malheur de grandir dans celle où il jouait le méchant. Et en face d'elle, ces trois enfants si arrogants et impertinents, étaient sans aucun doute ceux qu'ils choyaient. Que d'importance ! Il s'en était allé, bon débarras !... Mais pour une raison qu'elle-même a du mal à s'expliquer, la voilà qui accepte d'être la tutrice légale de ses demi-frères et sœurs. Après tout, ce n'était pas leur schizophrène de mère qui pourrait faire grand-chose. Seulement, en étant aussi différents que pouvaient être la nuit et le jour, cette nouvelle vie fonctionnerait-elle ? Chahinaz pour qui la vie se résumait à sa religion et son métier, tout irait-il vraiment bien avec des adolescents aussi en colère que capricieux ? Qui sait ! Ne restait plus qu'à accomplir cette longue marche pour devenir une famille. Après tout, chacun se doit d'y mettre du sien.