je t'attendrai

2.

     Mon réveil résonne pendant quelques instants dans ma chambre. J'arrête cette musique dès que je le peux, elle m'est insupportable. Malheureusement, c'est la seule technique qui marche pour que je ne me rendorme pas. 

     Je reste un moment, étendue dans mon lit, sur le dos, observant les moindres détails du plafond. Je regarde les simples défauts, donnant de l'importance à des choses inutiles. 

     Je me redresse après un bon moment et aperçois la boîte de médicaments posée sur mon bureau. Je l'attrape, bien sans mal et dépose un comprimé dans le creux de ma main. Je l'observe quelques instants avant de me munir de ma bouteille d'eau et de l'avaler. 

     Je prends ensuite une tenue plutôt confortable dans ma pile d'habits fraîchement lavés. Je m'habille en prenant tout mon temps et descends dans le salon. 

     Je serais seule tout le week-end. J'aime bien cela, après tout j'adore la liberté. Pourtant, j'aurais souhaité passer un peu de temps en famille, comme au bon vieux temps. Il faut que je me fasse à l'idée que cela n'arrivera plus. Bien que ca me plaise d'être seule et de suivre mon propre rythme, je déteste le silence. Mais je pense pouvoir trouver une solution.

     Je vois, dans le coin de la pièce, mon piano, je m’assis donc sur le siège si peu confortable de celui-ci et observe avec attention chaque touche qui se trouve devant moi. Mes mains commencent alors à caresser le clavier avec douceur, sans but précis. Les touches sont froides mais c'est pourtant si agréable. Je joue quelques notes, avec assurance. Mes yeux se ferment d'eux-mêmes. Je me sens comme emportée par ces notes si douces. Mon stress s'envole, tout comme les peines que je ressens. J'improvise, tout simplement, sans prise de tête. C'est exactement ce que j'aime, parce que je ne contrôle rien, et je suis libre. 

     Je joue un moment, sans pensées négatives, cet instant  si pur et magique me procure un bonheur intense. 

     Je sens que, pour une fois, ma journée commence bien. 

     Je n'avais plus joué depuis mon accident. J'avais oublié le bonheur que cet instant peut apporter. Pourtant, ce n'était pas pour autant comme avant. Il manque quelque chose.

     Un appel interrompt soudainement mes pensées et la pureté de cet instant. J'attrape mon téléphone et m'apprête à refuser puisqu'il s'agit d'un numéro que je ne connais pas. Mais le message qui s'affiche devant mes yeux m'interpelle. 

     « Téa, s'il te plaît, réponds moi, c'est très important. Je sais que tu ignores mes appels pour une raison compréhensive mais j'ai besoin d'entendre ta voix juste un court instant. » 

     J'ai pris bien trop de temps à regarder le message, il est donc trop tard pour répondre. Je m’apprête à reposer mon téléphone sur la table mais ce fameux numéro m’appelle une seconde fois. Alors, sans trop réfléchir, je réponds, en ne me posant pas la moindre question. J’entends un souffle à l’autre bout du fil avant que quelqu’un ne prenne la parole:

     -       Allo ?! Téa ?! Tu... c'est vraiment toi ? 

     -      Oui... 

     Ma voix se brise, je n'arrive plus à réfléchir. Des images, des paroles me reviennent à l'esprit sans que je n'y sois préparée. Je connais tant cette voix, j'avais l'habitude de l'entendre tous les jours. Je veux raccrocher, c'est encore bien trop difficile. Je ne m'attendais pas à ça. 

     -      Je te connais, tu étais ma meilleure amie après tout. Je sais que tu veux raccrocher. Mais, s'il te plaît, Téa, je veux savoir si tu vas bien...