Décollage

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7h35.

Jeanne le savait, elle allait manquer son vol. Cette grève soudaine des taxis parisiens allait lui faire rater le vol le plus important de sa vie, celui pour lequel elle s’est tant battue.

-          Tu ne peux vraiment pas aller plus vite ? Je ne vais pas l’avoir.

-          Ton avion décolle dans 1h30 ma chérie. Tu l’auras. Je le vois pas pourquoi tu es si pressée, tu aurais pu partir dans quelques jours.

Jeanne tourna la tête vers la fenêtre pour regarder le paysage. Que pouvait-elle lui répondre, il n’avait pas tort, mais elle avait besoin de partir. Elle ne se l’expliquait pas, comment pouvait-elle lui faire comprendre à lui ?

Son frère avait toujours été un homme calme, très peu inquiet. Il n’avait que 2 ans de plus qu’elle mais sa vie était différente. Marié, bientôt papa, il avait trouvé sa voie. Jeanne n’avait qu’une envie, trouver la sienne et c’est à New York qu’elle le ferait.

Son frère lui prit la main, habituellement cela rassurait Jeanne mais pas aujourd’hui. Aujourd’hui était SON jour et à peine commencé, il lui échappait déjà.

-          Le temps d’arriver, de trouver le terminal, de m’enregistrer, de passer la douane… je ne vais pas y arriver se lamentât-elle en le regardant à nouveau.

Son frère posa sur elle un regard bienveillant et accéléra autant qu’il le pu.

7h36.

Pour la centième fois depuis qu’elle était partie de sa petite chambre de bonne pour sauter dans la citadine rouge de son grand-frère, elle souffla.

Quand enfin elle vit le panneau « Aéroport» elle se calma. Finalement peut être allait-elle enfin avoir sa chance.

Son frère ne prit même pas le temps de se garer. Il avança la voiture au maximum devant les portes de l’aéroport, sortit les deux grosses valises du coffre, embrassa sa soeur les 30 secondes les plus courtes de sa vie et laissa partir sa jeune sœur, sa seule sœur, vers sa nouvelle vie. Dans ses yeux de son grand-frère, elle n’avait pas 22 ans. Elle était encore cette toute petite fille à qui il racontait des histoires de monstres pour la terroriser. Elle était celle qui marchait main dans la main avec lui sur le chemin de l’école. Celle qu’il a séré si fort dans ses bras quand il a fallu enterrer leurs parents. Elle était sa famille même s’il avait construit la sienne.

Jeanne ne se retourna qu’une seule fois pour le regarder. Elle mourrait d’envie de faire demi-tour, de le tenir dans ses bras encore et encore. Il était son pilier, sa bouée de secours et la vie sans lui allait être terrible. Mais elle sentait au fond d’elle que ce qu’elle vivrait à New York, la vie qu’elle allait y trouver, valait le sacrifice de la séparation avec la seule famille qui lui restait. Et puis Thomas avait sa propre famille à présent.

Dans les dédalles de l’aéroport jeanne ne put que courir. Elle arriva à la dernière minutes à chaque étapes qu’elle dû franchir pour enfin attendre son vol. Ce ne fut qu’une fois assise à sa place dans l’avion, à la dernière minute avant que les hôtesses ne ferment les portes, qu’elle souffla. Puis éclata en sanglots.

Elle y était arrivée. A seulement 22 ans, après 5 longues années d’études supérieures dans le marketing, et après avoir décroché, elle ne savait toujours pas comment, un poste dans une des plus prestigieuse agence de conseils en marketing de New York, elle traversait l’Atlantique pour vivre son rêve américain. Cet avion l’emmenait là où elle avait toujours voulu être, d’aussi loin qu’elle s’en souvienne. Pourtant elle pleurait. Secouée de sanglots interminables. Plusieurs hôtesses, surement inquiètes de la voir ainsi lui ont proposé un verre d’eau mais elle n’avait même pas la force de leur répondre. Elle n’avait que la force de pleurer. Elle n’avait pas pleuré ainsi depuis 3 ans, à la mort de ses parents. Mais cette fois les larmes étaient différentes. Elles étaient que soulagement.

8h45.

Elle sentie très bien l’avion prendre de la vitesse et se soulever, malgré les larmes qui inondaient encore ses joues et les soubresauts qui secouaient son corps. Ce que Jeanne ne vit pas, par contre, c’est le jeune homme qui dès son entrée dans l’avion ne l’avait pas quitté des yeux. Il était assis trois sièges derrière elle dans l’autre rangée et assistait, impuissant, à ses pleurs.

Dès qu’il l’avait vu, son regard s’était posé sur cette jolie brune, fluette, gracieuse, aux jambes interminables et terriblement sexy sans vraiment chercher à l’être. Elle était magnifique bien que l’on puisse deviner qu’elle venait de courir. Quand elle avait voulu mettre son bagage à main dans le compartiment au-dessus d’elle, il s’était précipité pour pour l’aider mais le passager assis à sa gauche l’avait aidé en premier. Il n’avait pu qu’observer la scène sagement assis. Il en avait profité pour voir sa jupe légère se soulever en même temps que ses bras pour laisser apparaitre la quasi-totalité de ses cuisses. Leurs regards s’étaient alors croisés 1 seconde et il avait pu admirer ses grands yeux dorés. C’est la seule fois que cela se produisit durant le vol. Il eut beau se lever plusieurs fois pour passer près d’elle, jamais elle ne le regardait. Elle était plongée dans son ordinateur ou dans un film puis dormis un peu. Une fois, qu’il revenait d’un énième faux passage aux toilettes, il prit bien le temps de la regarder. Elle était parfaite à ses yeux.

10h45.

Quand enfin l’avion toucha enfin le sol américain Jeanne eu envie de crier sa joie mais elle dû se retenir, elle avait déjà assez attiré l’attention sur elle au moment du décollage. Elle regarda autour d’elle rapidement, sans voir que quelques rangs derrière elle une paire d’yeux bleus la dévisageaient. Elle sortit de l’avion avec la même précipitation qu’elle y était montée, excitée à l’idée de découvrir sa nouvelle ville, sa nouvelle vie. La douane, la récupération des bagages et trouver un taxi lui parut simple tant son cœur était léger. A nouveau, à aucun moment elle ne remarqua le regard brulant qui était braqué sur elle en permanence.

11h15

Jensen fit tout pour ne pas la perdre des yeux. Quand elle attrapa brusquement son bagage il ne put qu’admirer de nouveau ses courbes avantageuses. Quand elle marcha rapidement entre chaque étape jusqu’à trouver un taxi du premier coup, il était encore tout près d’elle. Si près qu’il pouvait sentir l’odeur de ses cheveux, un doux parfum de miel. Il avait envie de la retenir, de lui parler. Il souhaitait plus que tout ne pas la laisser partir et quand enfin il trouvait le courage de lui parler le taxi de cette femme superbe démarrait.

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