Chapitre 1

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 Il existait, dans un monde cruel, une jeune femme portant le nom d'Opale et dont la naissance la destinait à un heureux futur. Mais hélas, le destin et le monde se confrontent bien souvent et si bien qu'un heureux futur ne peut survivre à ce tiraillement. Opale était née d'un comte riche et respectable, nommé Comte Emile de Laviolenne et d'une femme qui fut l'une des plus belles de ce pays, mais qui hélas, mouru peu après la naissance de sa chère fille, dont elle ne put connaître que le sourire bambin et les babillements. Opale fut élevée dans un environnement des plus bienveillants, des plus riches et des plus magnifiques. Alors, élevée dans une si belle atmosphère, ainsi que par un père si aimant, elle grandit comme se doit de l'être une comtesse. En elle se mélangeait la grande et charismatique personnalité de son père, ainsi que la beauté et la joie de vivre de sa mère. On lui disait d'ailleurs bien souvent qu'elle ressemblait à cette dernière, bien qu'elle ne l'ait jamais vu autrement qu'en peinture. Elle savait alors simplement qu'elle tenait d'elle sa beauté, mais aussi son prénom. Le jour de sa naissance, sa mère, ayant vu les yeux de la petite, ne put s'empêcher de penser en tant que fille de bijoutier que ses yeux avaient la brillance des opales. Opale éprouvait un grand respect pour sa feu mère, mais était surtout très attaché à son père. Jamais on ne vit un homme aimant autant sa fille et sa femme décédée, au point que jamais il ne se remaria, le condamnant pourtant à n'avoir aucun héritier pour le nom déjà réputé de Laviolenne. Mais en admirant sa fille, le comte se rendit compte qu'elle fut le meilleur moyen pour lui de gagner en renommée. Après tout, l'enfant fut si belle et dès son plus jeune âge que déjà tant d'hommes riches et connus avaient demandé fiançailles entre Opale et leur fils.

Le comte de Laviolenne réfléchissait chaque jour à la meilleure proposition pouvant convenir à sa fille, et faire passer son nom à la postérité. Un jour, par une chance incroyable, la petite fut demandée en fiançailles par le roi Pierre II de Naville lui-même, pour son second fils, Henri de Naville. Un prince ! Emile croyait rêver ! Quoi de mieux qu'un prince pour faire de son nom un nom de prestige dont on se souviendra ? Bien qu'Henri ne serait jamais roi, Opale entrerait en tous les cas dans la famille royale. Le comte saisit cette rare occasion et dès ses huit ans, Opale fut promise à Henri. De plus, les rumeurs de la ville disaient qu'Henri était un beau petit garçon, très sage et très doux pour ses douze ans.

Malheureusement, le cruel monde dans lequel le futur brillant de la petite prenait place ne resta pas longtemps indifférent à cette chance suprême. Il frappa le jour des dix ans d'Opale, dans le manoir dans lequel une fête grandiose avait été organisée pour l'occasion. Les musiciens, les invités, les belles robes et les beaux bijoux, les gâteaux brillants et les nombreuses bougies allumées pour la soirée... Il y avait toutes ces choses que les yeux encore candides d'Opale admiraient. Elle se noyait d'amusement dans cette immensité de splendeur, qui avait été régie juste pour elle aujourd'hui ! Sans déranger son père, elle tentait souvent d'attirer son regard pour lui sourire, afin de lui dévoiler à quel point elle était émue par le fait qu'il ait organisé tout cela pour elle seule. Et puis, elle dansait aussi beaucoup, avec ses amis qui étaient venus en grand nombre. Et elle mangeait, goûtait à pleins de nouvelles choses, si délicieuses qu'une bouchée suffisait à la faire sourire. Et elle voyait de nouveaux visages, on la présentait à tant de monde qu'elle rencontrait des difficultés à se souvenir de chaque nom. Alors, tout en dansant, et en les récitant au rythme de la musique, elle chantonnait :

"Duchesse de Saint-Oise, Duc d'Héchisse, Duchesse d'Héchisse, Seigneur de Bousain... Non, plutôt Seigneur de Boussain !"

Mais vers vingt-trois heures, la fête prit un autre tournant. Un groupe de bon nombre de soldats venant d'un pays voisin frappa à la porte et s'invita dans les festivités avec comme spectacle la destruction horrifiante et complète du manoir et de ses convives. On ne sut jamais réellement les raisons d'un tel massacre, et ce flou laissa place alors à l'imagination des bavardages de la ville. Certains affirmaient que l'armée était en vérité celle de la famille royale du pays voisin nommé Fevilias, venu se venger car le roi Pierre II avait préféré marié Henri à une comtesse de son pays plutôt qu'à la fille du roi de Fevilias, une princesse pourtant ! D'autres pensent simplement à une volonté d'un seigneur d'étendre son territoire. C'est un mystère qui subsista, irrésolvable, et dont le roi de Naville s'indigna de n'y trouver de coupable. Ce que chacun savait, en revanche, c'est que la plupart des invités y laissèrent leur vie, ainsi que l'hôte, le comte Émile de Laviolenne. On le tua de deux coups de couteaux dans l'estomac, et d'un troisième dans le cœur, cette fois-ci, fatal. Ce dont personne ne se doutait cela dit, c'est que sa fille, Opale, après avoir assisté au meurtre de son père, avait survécu. Elle avait pu fuir, grâce à l'aide d'un domestique du nom d'Edwin, qui la cacha de ces soldats avant de sortir de la demeure enflammée, la petite évanouie sur son dos.

Il faut cultiver notre jardinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant