𝐋𝐞𝐬 𝐝𝐨𝐮𝐭𝐞𝐬 𝐝𝐮 𝐝𝐞́𝐦𝐨𝐧.

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   Parvenir à endiguer le Grand Terrassement avait été la plus grande victoire du bataillon d'exploration. Au prix de millions de vies, cet exploit avait un goût amer pour ceux qui avaient abandonné leur identité ainsi que leur rêve dans le but de sauver l'humanité. Afin de garantir à l'Homme de beaux jours à venir, une innombrable quantité de sang avait été versée et coulait sur les mains de chaque soldat.

A quoi bon célébrer la vie lorsque l'on a soi-même tué? Livai, Mikasa, Armin, Jean et Connie étaient à présent, des enveloppes charnelles presque vides de vie et de sens. Chacun remettait en cause leur légitimité à être encore sur terre alors que nombreux de leurs camarades s'étaient sacrifiés pour leur permettre de rester sur terre... Seul le temps pourrait panser leurs plaies et, peut-être, leur redonner goût à la vie.


   Celui dont l'esprit s'avérait être le plus tourmenté, était Jean Kirschtein. Depuis son retour à Eldia, cela faisait un mois qu'il n'était pas sorti de sa chambre ni fait entendre le son de sa voix. Connie et Mikasa, qui lui déposaient quotidiennement ses repas, avaient tenté à de nombreuses reprises de le faire ne serait-ce qu'entre ouvrir sa porte. Les innombrables tentatives de communication, même en la présence de sa mère, s'étaient chacune soldées par un cuisant échec.


« Le monde souhaite revoir le plus valeureux soldat... » A un jour soupiré Mikasa, en espérant réveiller le fougueux combattant aux côtés duquel elle avait jadis combattu.


   Jean Kirstein, derrière cette porte en chêne massif, serrait les dents à l'entente de ce surnom. Être considéré comme étant le soldat le plus brave de l'humanité n'était en rien un compliment à ses yeux : ce qui faisait de lui un homme courageux n'était pas son mental, ni sa force au combat mais bel et bien sa peur de la mort.

Depuis Trost, bien que terrifié, il n'avait cessé défier la dame noire au nom de la vie... Jean niait être courageux, il était un égoïste qui voulait vivre.

Alors que les Ackermans étaient invincibles, le spectre de la mort tournoyait sans cesse au-dessus de Jean, telle l'épée de Damoclès. Le fait que cette dernière ne se soit pas abattue sur lui était un miracle, mais un miracle à double tranchant : en effet, il vécut au prix de la disparition de ses pairs. La Mort avait emporté sous son bras Marco, Sacha, Eren et bien d'autres. Dans sa cruauté, elle l'avait également forcé à voir chacun d'entre eux être supprimé sous ses yeux.


   Si seulement la perte de sa famille était l'unique cause de ses maux... Assis dans la pénombre, Jean fixait la lune en songeant. Comme tous, il avait été manipulé par les besoins de liberté d'Eren et les souvenirs de Mikasa. Pour les libérer de cette éternelle prophétie et sans en être conscient, il avait participé à l'euthanasie de millions d'âmes innocentes. Cette pensée fit rouler une perle salée le long de la joue de celui qui se considérait être un démon.


« Jean! »  Une voix lumineuse, cachée par la porte, extirpa avec force le jeune homme de ses songes cauchemardesques.

« Je ne vais pas pouvoir tenir debout encore longtemps! Pourrais-tu m'ouvrir pour que je puisse m'asseoir quelques secondes? » Avait-elle poursuivi.


A l'extérieur de sa chambre, se tenait {Reader} appuyée contre sa béquille ; lors du dernier affrontement qui avait opposé les mahrs aux eldiens, l'éboulement de la caserne provoqué par Porco Gailliard avait broyé les os de la jambe droite de la soldate. Ce jour-là, avant de sombrer inconsciente dans les bras de Jean, elle le questionna quant à ses sentiments, désireuse de l'entendre enfin s'exprimer.

{ Jean x Reader } Evil's doubts | 悪魔の疑いOù les histoires vivent. Découvrez maintenant