Le seul élément différent par rapport aux autres rencontres résida de façon quasi exclusive dans le choix de l'hôtel. Tout le reste fut comme d'habitude. La question de se revoir avait été posée juste au moment de la séparation pendant la rencontre antérieure.
Dans une étreinte très serrée, quelques minutes avant le départ pour la Gare qui se trouvait à cinq minutes de marche, de sa voix tendre comme une douce supplique, elle lui avait chuchoté : je te vois quand ?
Il aurait aimé pouvoir lui répondre par « un maintenant et pour toujours » si lui, il pouvait exécuter sans aucune contrainte le vœu le plus cher du cœur. Mais imbue de la réalité et du contexte et en honneur à la réalité elle accepta quand il lui répondit :
- Très vite, mon amour. Très vite. Elle l'avait encore désarçonné en lui disant avec raison « très vite c'est maintenant ».
Encore très réaliste, elle refusa sa proposition d'annulation du billet retour contre une prochaine rencontre dans la quinzaine.
Ainsi, avant même de se séparer d'elle, il débuta un compte à rebours. Comme les fois d'avant, l'épuisement du temps des deux semaines permit l'installation chez lui d'un mélange à parts inégales d'anxiété et d'euphorie : l'euphorie produite par l'idée de la retrouver, l'anxiété le fruit d'une éventuelle sollicitude d'annulation de sa part.
L'atmosphère était habituelle. Elle pourrait être considérée comme tendue si lui, il n'en était pas conscient et s'il avait cherché à savoir pourquoi elle prenait automatique et systématiquement du recul à l'approche du jour J. Pour lui, il préférait le risque de faire le déplacement en vain.
La joie de la rencontrer, d'être avec elle ne ressemblait à aucune autre joie parmi toutes celles qu'il avait vécues jusque-là. Ce jour-là, elle ne répondit pas aux échanges courtois de début de conversation de début de journée.
Ainsi, quand il lit « - Entendu Monsieur » comme réponse à son « Monsieur est dans le train », il se convainc qu'elle ne prônait pas une annulation de ces retrouvailles et avec ces deux mots disparurent l'angoisse pour laisser tout le champ à une euphorie presque paralysante.
A cet instant, le choix de l'hôtel à peu de distance de la Gare, pouvait être qualifié de judicieux. En effet il avait tout prévu pour faciliter la tâche à Demoiselle dont la résidence se trouvait à plus de quatre-vingt-dix minutes de la gare moyennant un trajet long hargneux en transport publique.
Il avait vu cet hôtel une fois de passage dans la ville lumière, pendant un déplacement d'une gare à l'autre. Vu de l'extérieur, il était remarquable par son architecture plutôt quelconque dans une des plus belles villes du monde. Puis, sans présager des services et des conforts, le prix abordable guida et légitima le choix. Vu de l'intérieur on comprit vite que cette construction correspondait à un concept en la matière : des éléments discrets pour un confort acceptable, placés dans des boîtes jointives. L'attraction principale reste la salle de bain avec la possibilité d'une vue feutrée de l'intérieur par la réflexion d'une lumière changeante en couleurs et en intensité à travers des vitres opacifiées et un jeu de luminosités.
Il apprécia moins le positionnement du lit au fond de la chambre, plaqué dans l'espace délimité par les trois pans de murs. Il regrettait surtout l'accès unique par le seul côté libre et dégagé.
Le temps de l'installation fut beaucoup moins court que l'attente qui débutait depuis son dernier message.
Il sortit de son sac, une bonne bouteille de Saint Emilion et déposa à côté le tire-bouchon. Mais pour elle, il fallait de la bière. Il se proposa, le masque sur le nez de sortir. Il lui fallait de la bière et des fleurs.
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RENCONTRE ET RATES
RomanceHistoire d'une rencontre insolite marquée par des ratés entre deux personnes que beaucoup de choses rendaient incompatibles.