Chapitre 6

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Cécile

J'avais vraiment eu une chance inouïe qu'Allan n'ait pas appelé la police quand il m'avait reconnue. J'ai eu beaucoup de chance qu'il soit la personne avec qui j'ai échangé mon sac. Et j'ai pu protéger Allan de l'O.3. Je leur avais rendu un beau rapport dans lequel j'expliquais en détail comment je l'avais éliminé. Je leur ai même indiqué l'endroit où j'étais supposé l'avoir enterré, en leur précisant que j'avais recouvert le corps de chaux vive pour le décomposer avant de le recouvrir de terre. J'étais à peu près certaine que personne ne prendrait la peine de vérifier, car j'avais volontairement indiqué un endroit difficile d'accès.

Maintenant, avec mon portrait-robot placardé dans toute la région, je ne sortais plus que la nuit. Même si le portrait n'était pas super ressemblant, on pouvait quand même me reconnaitre. Ou du moins, me suspecter. À chaque fois que je sortais, je prenais garde de me différencier le plus possible du portrait. J'avais demandé à l'Organisation 3 de m'aider, mais ils avaient refusé. J'avais proposé de changer à nouveau d'identité ou de repartir à zéro dans un autre endroit. Normalement, ça devrait être dans leurs compétences, mais ils répondu que comme ils n'y étaient pour rien, c'était à moi de me débrouiller. Donc, je ne pouvais rien faire. Il y a quand même une chose qu'ils ont faite pour moi : ils m'ont proposé deux vols de voitures. C'était facilement faisable de nuit. Ils me fournissaient un double des clés et ensuite, mon travail se résumait à conduire la voiture jusqu'à une place en campagne où quelqu'un viendra la chercher. Après ce travail, j'ai reçu d'autres renseignements sur Judikael. Le document le plus important que j'avais reçu pour l'instant était le programme de ce qu'il avait fait le jour précédent sa mort. Il faudrait que j'analyse ça pour trouver des indices potentiels. L'avantage des vols de voiture était que ça me laissait plus de temps, pour l'instant ils avaient demandé un vol par semaine.

Allan

Depuis Vaduz, j'approfondis mes recherches sur l'Organisation 3. Peu importe ce que Céline en pensait, ils ne me paraissaient pas nets. Après avoir fouillé Internet pendant des heures, je finis par trouver un lien pour les contacter. Comme j'étais supposément mort, je me fis passer pour un ancien agent secret français qui avait entendu parler de leur agence et qui voulait les aider. C'est comme cela que j'eus la confirmation qu'ils n'étaient pas une vraie agence de renseignements. D'abord, je crois que le profil de l'ancien espion français les a vraiment intéressés. Ils ont demandé que je leur envoie une photo de ma carte d'identité, mais je n'ai même pas dû prouver que j'avais bien été un espion français. Ils devaient vraiment manquer de moyens. En plus, pour la carte d'identité, j'ai fait un photomontage de mauvaise qualité à partir d'une photo de carte française trouvée sur Internet. Quelques jours plus tard, j'ai reçu mes instructions : je devais améliorer leurs techniques de renseignement. Je travaillerais depuis chez moi et nos communications se feront par mail. Je suis en quelque sorte devenu leur conseiller pour tout ce qu'ils sauraient s'ils avaient vraiment été une agence de renseignement.

Cela faisait maintenant deux semaines que je travaillais pour l'O.3. Ils semblaient parfaitement satisfaits de la qualité de mon travail, qui reposait essentiellement sur ma carrière d'adolescent fan de films d'espionnage. Je décidai d'appeler Cécile pour lui faire part de la nouvelle. Nous avions convenu de nous contacter le moins possible pour que je ne sois pas associé à ses vols, même si j'imagine que ne pas l'avoir dénoncée faisait de moi un complice. Je devais la prévenir qu'elle se faisait avoir.

Cécile

Le vieux téléphone d'Allan sonna. C'était évidemment lui puisque c'était la seule personne à avoir mon numéro. Il me raconta tout ce qu'il avait appris sur l'Organisation 3. Je ne pouvais pas croire ça. L'O.3 était la seule solution que j'avais pour découvrir ce qui était arrivé à Judikael. D'après Allan, ce n'était pas une arnaque, ils étaient trop investis pour cela. C'étaient probablement juste des amateurs qui se faisaient passer pour des professionnels. Mais dans ce cas, je me suis fait avoir avec leur tarif trop élevé et leurs conditions trop strictes. En plus, je pouvais moins me fier aux informations qu'ils me donnaient.

Après de longues réflexions, je choisis de les contacter pour fixer un rendez-vous avec eux. Je voulais mieux comprendre qui ils étaient avant de continuer de leur faire confiance. J'étais prête à sacrifier ma vie pour venger Judikael, mais pas pour des personnes qui mentent et me donne que des demi-informations. Je leur écrivis un mail assez direct et leur dit que j'avais appris que leur agence n'était pas exactement ce qu'ils prétendaient qu'elle soit. J'eus leur réponse le jour d'après. Apparemment, ils étaient désolés que quelqu'un m'ait fait douter et le directeur de l'agence serait content de m'accueillir dans ses locaux pour mettre cela au clair. Le rendez-vous se déroulera le lendemain. Je me réjouissais de voir ce qu'il me dirait.

Allan

Cécile m'avait expliqué ce qu'elle comptait faire. Je me connectai à la messagerie de l'O.3 pour voir si j'avais du nouveau travail. Ce soir, je démissionnerai, car je n'aurais plus l'utilité de faire ça. En attendant, j'avais un mail. Il ne provenait pas de la même adresse que d'habitude. De base, je reçois les mails d'Organisation 3. Cette fois, c'était « Organisation 3 couverture ». Visiblement, mon adresse avait été ajoutée aux destinataires par erreur. Je lus le mail et mon sang se glaça. Il disait : « Rendez-vous prévu cet après-midi, elle en sait trop, on l'élimine. » J'essayai immédiatement d'appeler Cécile, mais elle ne répondit pas. Elle devait déjà être partie. Je pris la voiture de mon oncle et quittai Vaduz à toute vitesse. Toutes les cinq minutes, j'essayai d'appeler Cécile, mais elle ne répondait pas. Je n'aurai jamais le temps de la rejoindre à temps, j'avais la moitié de la Suisse à traverser, ce qui prenait environ trois heures.

Cécile

J'avais pris beaucoup de temps pour me préparer. Il ne fallait pas qu'on me reconnaisse dans la rue. J'étais soulagée d'avoir ce rendez-vous. Je pourrais prévoir comment continuer mes recherches et tenir la promesse que j'avais faite à Judikael de le venger. J'arrivai à l'agence « le Pays du Soleil » avec un peu d'avance. J'étais déjà venu au tout début, pour me renseigner avant de collaborer avec eux. Une secrétaire me fit entrer dans un bureau et me prévint que le directeur allait arriver. Je patientai une dizaine de minutes. J'entendis la porte derrière moi s'ouvrir. J'allai me lever quand la personne plaqua un mouchoir contre mon visage. Je reconnus l'odeur douceâtre caractéristique du chloroforme. Je savais que d'ici une minute ou deux je m'évanouirais si je ne faisais rien. Je me débâtis de toute mes forces et essayai de frapper mon agresseur. Il était plus fort que moi. Il me frappa la tête contre le bureau et m'ordonna d'arrêter de me débattre. Je commençai à avoir la tête qui tournait. Je voyais des points noirs qui s'étendaient dans mon champ de vision. Ensuite, je ne fus plus consciente de rien.

Je revins petit à petit à moi. Je ne voyais rien. Je ne pouvais pas bouger. Mes poignets et mes chevilles étaient liés. Des lancées de douleur partaient de mon nez et se propageaient dans mon crâne. Je devais me trouver dans le coffre d'une voiture, le bourdonnement du moteur me donnait la migraine et j'avais la nausée à cause des mouvements de la voiture sur la route accidentée. Je sombrai à nouveau dans l'inconscience. Plus tard, dans un état de semi-conscience, je sentis qu'on me trainait sur le sol. J'avais un sac noir sur le visage, mais je voyais des formes abstraites danser devant mon regard. Des branches et des pierres écorchaient mon corps. Quelqu'un me poussa. Je ne sentis plus la résistance du sol sous moi, comme si je volais. Je perdis à nouveau conscience, définitivement.

Portée DisparueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant