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Le vent me baffes violemment le visage, je cours avec agilité, épée à la main prête à égorger la première personne qui se mettrais en travers de mon chemin. Mes longues bottes de cuirs empêche les ronces de m'atteindre. Mon ample chemise blanche est coincée dans un corset à lacets, d'épais cuir afin de protéger de quelconques sortes d'attaques . Malgré tout je sais qu'ils sont à mes trousses. Seule contre un dizaine d'hommes avides de revanches je n'ai aucune chance. La seule option est de trouver un coin sombre où se camoufler le temps qu'ils passent. Alors je cours, espérant trouver une crevasse, une grotte ou même un buisson. Leurs cris retentissant semblent venir de loin, ce qui me rassures. Là au loin, enfin une grotte sombre qui me semble une excellente cachette. J'accours et m'enfonce dans l'obscurité, toujours l'épée à la main. Je me colles contre la pierre froide en espérant que la horde enragée passe assez loin, sans me remarquer. Tout devient silencieux je retiens ma respiration et peu à peu ma vision s'adapte à l'obscurité. Puis une voix grave s'élève, brisant le silence. Mon cœur manque un battement.

-On se terre dans une grotte? Ça ne te ressembles pas.

Lui. Je me retourne brusquement pour distinguer plus loin un jeune homme appuyé nonchalamment contre le mur de pierre. Ses cheveux noirs sont en bataille, sa peau est pâle et son sourire narquois agaçant. Il me dépasse d'une tête et j'ai appris par le passé qu'il ne faut pas le sous-estimer. Ses yeux sombres m'observent. C'est mon ennemi juré, un mercenaire, un tueur professionnel tout comme moi. Deux dans la même région ne font jamais bon ménage. Surnommé depuis de nombreuses années "le Démon", il est sans pitié, sans âme disent même certains.

Je tiens mon épée pointée vers lui de façon à le défendre d'approcher.

-Ne t'adresses pas à moi comme si on se connaissait.

Il ne prend pas la peine de me répondre et se contente seulement de sortir son épée à son tour de son fourreau situé dans son dos. Impossible pour moi de quitter la grotte, il me poursuivrait je n'en doute pas et les autres ne sont sûrement pas loin. Je hais cette impression d'être faites comme un rat. Avec rapidité j'analyse du regard la grotte, au fond on distingue une faible lueur, une sortie? Sans réfléchir je m'élances et cours, priant pour ne pas tomber sur une impasse. A mon plus grand soulagement, un long couloir irrégulier fait de pierre s'y trouve et sans aucune hésitation je le traverse le plus vite possible.

Il est surpris de ce mouvement ce qui me fait gagner de l'avance. Puis je m'arrête bouche-bée par ce qui se trouve devant moi. L'intérieur de la grotte est très large, le plafond est très haut avec un trou qui laisse passer une grande quantité de lumière ainsi qu'une petite cascade. Descendant le colimaçon tout le long du mur un élégant escalier toujours taillé dans la pierre. Au centre de ce tourbillon tout en bas une sorte de mare artificielle où l'eau claire de la cascade se dépose. Il n'y a plus d'échappatoire, je n'ai aucun idée d'où est la sortie, il me faut l'affronter. Un sifflement d'acier traverse l'air et je me retourne d'une traite pour parer le coup de mon adversaire. J'enchaîne avec vitesse, j'attaque et il bloque mes coups en retour. En même temps je m'efforce de descendre prudemment les marches. Je n'ai aucune idée du lieu où je me trouve mais si il y a un moyen d'éviter de finir en morceaux je ne manquerais pas de sauter sur l'occasion. Malgré notre différence de taille la principale raison pour laquelle lui et moi avons du mal à régler nos différends est car nos forces, elles, sont égales. Pourtant ce n'est pas faute d'avoir essayé de l'éliminer.

Voilà six mois que ce duel a commencé et pourtant deux déjà que le nom de "Démon" flotte, silencieux dans la région, terrifiant ses habitants. Il est rare que d'autres mercenaires trouvent le courage de s'installer ici, la peur est trop forte. Mais moi, je suis une femme et beaucoup me sous-estiment, un net avantage. Mais jamais, je n'ai douté de mes capacités. Avec l'expérience acquise au fil du temps, il n'y a aucune arme que je ne sais pas manier. Voilà trois ans maintenant, que mon surnom glace et horrifie quand il est prononcé: "L'Ombre". Je suis parfaitement consciente de la terreur que j'inspire et celle-ci, nourrit ma force. L'Ombre est invisible, elle agit puis disparaît sans laisser de traces. Peu sont capable de me décrire physiquement, et sur ces cas exceptionnels, baigne la menace d'une mort douloureuse si l'un d'eux se décide à parler. Personne ne connais mon prénom cependant. La discrétion d'un mercenaire est indispensable, c'est probablement l'une des raisons pour lequel le brun et moi nous sommes rencontrés si tard. Dans le passé, on entendait seulement parler de l'autre sans trop savoir à qui se référencer et après un mois entier échafaudant des plans, pièges pour assassiner l'autre chacun s'en est remis à simplement éviter que nos chemins se croisent. Alors lors des rares rencontres, l'un des deux s'en tirait de justesse, alimentant sa haine pour l'autre, devenu son ennemi juré. En résumé, la présence de l'un ruine aux affaires de l'autre.

Il tente de m'atteindre à l'épaule, j'esquive le coup et parvient a le toucher légèrement à la jambe. Il grogne et redouble d'efforts. Aïe, le fer est passé si près de mon visage qu'il m'a griffé. Je sens l'adrénaline bouillonner dans mes veines. Je recule toujours, seulement mon adversaire se fait beaucoup plus violent. Les quelques coupures que je lui ai infligé ont du le mettre en rogne. Il ne m'a pas raté non plus, une partie de ma chemise est déchirée et tâchée de rouge. Mon dos heurte quelque chose de dur, c'est le garde-fou en pierre de l'escalier. Le Démon s'avance victorieux, un grand sourire affiché sur son visage pâle. Ses cheveux bruns sont collés à son front en sueur. L'eau en dessous brille malicieusement, suggérant une dernière option. Je me sais coincée alors je monte sur la rambarde. Il fronce les sourcils un mélange d'agacement et d'incompréhension. Il ne m'en croit pas capable? Très bien. Je le regarde droit dans les yeux avant de lui faire un clin d'œil puis un grand sourire. Ensuite, la gravité fait son travail. Pendant que je me laisse tomber, il se penche au dessus du vide et lève les yeux au ciel. Dans un grand bruit mon corps atterris dans l'eau, alors au moment même où il décide de sauter pour me rattraper, je me dépêche de sortir de l'eau et atteindre la porte de fer qui se trouve là. Je réalise trop tard que ma stratégie n'était pas très maligne, le cuir trempé pèse lourd et mon épée glisse dans mes mains. Mes cheveux et ma chemise me collent au corps, j'atteins la porte essoufflée et pousse la poignée. Il ricane:

-Fermé. Quel dommage.

Quelque chose de dur heurte mon crâne, une grosse vague de douleur m'envahit puis tout devient noir.

L'Ombre et le DémonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant