Une lune à l'envers marqua le jour de sa naissance. Une lune, qui inaugurait déjà des tourmentes à venir. A chacun de ses pas, l'espoir gagnait un peu plus son coeur, comme si par ses seuls mots, elle serait capable de déjouer l'atmosphère. Nous avons chanté ses louanges jusqu'à ce qu'elle s'endorme. Alors qui pourrait dire...
Qui pourrait dire, je vous le demande? Pourquoi ses yeux devaient s'éteindre.
Nous avons dit "ce sera l'histoire" lorsque son regard s'est posé pour la première sur le monde. Elle ne parlait pas. Elle observait. Elle attendait. Elle était là, et ce monde s'étendait devant elle sans pudeur. Elle avait peur mais ses yeux ne se refermaient pas pour autant. On a voulu dire "ce sera l'histoire de". Alors qui pourrait dire...
Une petite rêveuse qui étend ses bras. De celle qui pense plus à Pagnol et ses amours, à l'épouvante de Shakespeare et au malheur de Stendhal. Une petite rêveuse, oui, qui n'entend pas le blâme. Elle ne mettait qu'un pied devant l'autre chaque matin pour savoir ce qu'il adviendrait. Elle regardait avant de faire. Elle observait. Elle attendait. Et puis enfin, elle souriait. Alors qui pourrait dire...
Chaque couleur, chaque teinte, si pâle fut-elle, illuminaient ses songes de l'intérieur. Jamais ses pensées n'auraient pu imaginer, qu'un jour lui serait enlevé, ce droit de lumière. Elle les attendait, vous dis-je, ces cris de jouissance en peinture! Elle voulait les voir ces pigments fleuris, à tout jamais! Aucune justice en ce monde qui voudrait la faire vivre un tel sacrifice. Alors, qui aurait pu dire...
Qui aurait pu dire que la sentence allait tomber?
J'envie tous ces malheureux qui pensent que les promesses n'ont pas de poids.
J'envie tous ces malheureux qui pensent avoir le droit de partir au moment où la guillotine tombe.
J'envie tous ces malheureux qui ferment les yeux sur la souffrance de celle qui espère pouvoir encore les ouvrir.
