Et ils tombèrent amoureux pour la seconde fois.

Ce jour là, ils tombèrent amoureux pour la seconde fois.

            Erwin ne savait pas pourquoi il courait.

Il ne savait pas d'où venait le besoin imminent d'ouvrir cette porte, au fond du couloir.

C'est comme si celle-ci l'appelait.

Mais c'est ridicule n'est-ce-pas ? Les portes, ça ne parle pas.

Et c'est au fur et à mesure qu'il s'approchait de l'auditorium de son lycée, que la musique emplissait ses oreilles, que son cœur se mit à palpiter. La dernière fois que son cœur s'était emballé ainsi, c'était lorsqu'il l'avait aperçu, lui.

Vraisemblablement, si cette porte massive lui avait fait de l'œil, ce n'était pas par pur hasard ; ce qui devait être derrière celle-ci devait être incroyable.

Mais il ne savait pas, lui qui voulait tout savoir.

Lorsqu'il arriva à bout de souffle devant la lourde porte, il eut un moment d'arrêt. Il n'était pas essoufflé, mais son cœur était pourtant déchaîné dans sa cage thoracique. La musique s'échappant de l'auditorium était agréable à l'oreille, incroyablement douce, mais effroyablement triste et nostalgique. Bien sûr qu'il la connaissait. Cela le mettait en colère d'ailleurs. C'était leur musique. Celle qu'il avait partagé avec lui. C'était leur agape.

En effet, il ne comprenait pas.

Et c'est lorsqu'Erwin ouvrit la porte qu'il comprit.

Le spectacle s'offrant à lui était purement incroyable.

C'est lorsqu'il vit le danseur se mouvant sur leur musique qu'il le reconnut. Il le reconnaîtrait toujours.

Son monde se mit en pause. Tout autour de lui évoluait au ralenti. Il n'y avait que lui et le danseur, dans sa bulle entourée d'obscurité.

Erwin mourrait d'envie de se précipiter vers lui et de l'enlacer, mais cinq années s'étaient écoulées, peut-être que l'artiste ne se souvenait plus d'Erwin, ou pire, qu'il l'avait oublié.

A cette seule idée, ses yeux étaient devenus sombres, semblables à une mer houleuse et tourmentée. Sa main s'était tendue par automatisme vers le jeune homme, comme s'il voulait l'attraper avant qu'il ne s'échappe. Erwin l'avait toujours trouvé magnifique, avec son corps androgyne, même si en grandissant ses muscles s'étaient taillés, un équilibre s'était établi entre les muscles et la finesse, comparable aux modèles des peintures anciennes qu'Erwin aimait tant observer au musée. Les cheveux noirs et fins du bel homme bougeaient en coordination avec sa danse, son corps fin et musclé était moulé dans un tee-shirt et un legging noir. Il pouvait paraître si calme et détendu sur le moment, mais il dégageait une telle force, il avait acquis une si forte présence, que même Erwin en était bouleversé et en frissonnait. Oui, cet homme était bien Levi. Et il était toujours aussi beau.

Et ce jour-là, Erwin tomba amoureux de lui pour la seconde fois.

          Levi dansait.

Lorsqu'il avait des états d'âmes, lorsque ça n'allait pas, il dansait.

Levi ne savait pas s'exprimer ; alors il dansait.

Cette journée-là, il n'avait pas cours, et en voulant fuir, il était venu ici.

Fuir quoi ? Son oncle alcoolique ? Sa routine ? Fuir sa vie morne et ennuyeuse ?

Non. Il ne savait pas.

Levi ne faisait pas partie de ceux qui croyaient au destin. Ou alors, s'il existait, il s'acharnait sans relâche sur lui.

Quoiqu'il en soit, destin ou non, il se retrouvait à danser sur la scène de l'auditorium.

Il avait lancé sur sa radiocassette le morceau "agape" de Yuri on Ice. Il aimait cette chanson, même si elle le rendait triste et joyeux à la fois. Mais après tout, la mélancolie est la joie d'être triste non ? Il était attaché à ce morceau tout comme à la personne avec qui il l'avait partagé.