Sex "friends" [réecriture]

19. « Merci »

JEAN — pov

Dans une pièce à peine éclairée, lumière dorée reflétée sur les murs, Monsieur Jeager vient jusqu'à moi pour m'apporter un thé que j'accepte avec politesse, assis sur son fauteuil.
Ses lunettes lui donnent un air à la fois sévère mais serein, ce qui rend encore plus difficile d'adopter l'attitude "adéquate". Je n'arrive pas à le cerner.

— Merci.

Il fait un petit hochement de tête puis demande, assis en face de moi et d'une table vitrée qui nous distance d'un mètre:

— Alors comment vous vous êtes rencontrés avec Eren ?
— Au lycée...on avait des cours en commun.
—Au lycée ? J'aurais plutôt pensé la fac. Ça fait longtemps que vous êtes amis ?

Ami...

— Heu ça va faire presque un an.
— Interessant. Mais enfaite..votre visage me dit quelque chose...vous ne seriez pas déjà venu ici ?
— Moi ? Non...

Je crois avoir un peu trop hésité avant de répondre, ce qui me vaut un regard suspicieux de la part du brun.

— Vous entretenez une relation avec lui ?

Ma langue me brûle de manière subite, le thé est descendu d'une traite dans ma gorge, d'un geste brusque du bras que je n'ai pas pu contrôler. De toute évidence le vieux sait quelque chose. La respiration coupée, j'ai l'impression que le temps vient de s'arrêter.

— Pardon ?
— Vous et mon fils entretenez une relations intime, c'est bien ça ?
— Comm...
— Eren n'a jamais bien su cacher les choses. Surtout quand il s'agit de faire disparaître des traces.

Cette fois son regard change. Il est beaucoup plus sérieux qu'avant (si c'est possible) et j'ai l'impression d'être analysé comme un patient atteint d'une maladie grave.
J'ai envie de dire quelque chose, d'avoir le courage de lui admettre la vérité, lui expliquer le pourquoi du comment. Mais en réalité je n'ose pas, par peur d'empirer la situation—qui me gêne atrocement.
Je me contente d'affronter ses deux iris grises, me hurlant à moi-même de ne plus jamais le faire dans un salon.

— Ça aide aussi d'avoir un deuxième fils beaucoup plus responsable, ajoute-t-il d'une voix formelle.
— Écoutez Monsieur Jeager je ne vois pas où vous voulez en venir...
— Eh bien, je vous retourne la question pour l'intérêt que vous avez pour Eren.
— On s'entend bien.
— Est-il heureux ?
— Quoi ?
— Je veux dire...en général. De manière globale, est-ce que Eren est heureux ?
— Vous ne devriez pas le savoir..?
— J'ose espérer que oui. Ça fait quelque mois que je le vois se remettre à sourire.

Je sens q'un voile s'est glissé sur son visage, le voile d'une forme de tristesse à peine perceptible mais bien présente.

— Je ne suis pas dans sa tête..mais oui j'ai l'impression qu'il est heureux.

Un léger mouvement de ses lèvre donne l'impression d'un début de sourire.

— Je suis content de l'apprendre.

La situation m'est à la fois plus qu'étrange mais me soulage dans un certain sens -ce qui est très perturbant. Je suis un peu mal à l'aise de devoir faire l'intermédiaire entre deux personnes de la même famille, d'autant plus qu'il s'agit de Eren. Et de ses sentiments.
D'un autre côté, son père me fait un peu de la peine et n'a pas l'air foncièrement mauvais. Je ne sais pas jusqu'à quel degré il est au courant de la vie du brun mais en tout cas...ne semble pas être contre une relation entre hommes.
Alors que la discussion se calme pour—en fin de compte devenir totalement absente, ce qui me convient parfaitement, Eren fait apparition vers la dernière marche d'escalier. Son regard passe de moi à son père et discrètement sur le fauteuil, une expression confuse sur le visage.