15h00. La sonnerie de la Springfield High School résonna à travers les couloirs du bâtiment. Une horde d'élèves se précipita à l'extérieur. Parmi eux, Tess, une jeune fille maigre et mesurant bien une tête de moins que la plupart des ses camarades. Elle sortit de sa poche son téléphone ainsi qu'une petite boîte blanche. Tess dégagea ses cheveux derrière ses oreilles afin d'y glisser la paire d'écouteurs et démarra sa playlist. Elle adorait la musique, elle lui permettait, pendant quelques minutes, d'échapper à la réalité aussi dure et froide qu'elle ne la voyait.
Back in black du groupe ACDC, c'est ce qu'elle écoutait tout en marchant vers ce qui, pour elle, se rapprochait le plus de l'enfer sur terre : l'appartement de sa nouvelle famille d'accueil. Depuis toute petite, Tess était baladée de foyer en foyer. En général, elle ne restait pas plus d'une semaine, elle finissait toujours par fuguer, fuyant toute forme d'affection et préférant la solitude à une fausse famille.
D'ailleurs, celle dans laquelle elle était tombée était certainement la pire. Une femme obèse dont elle avait oublié le nom, ne buvant que du Coca et qui s'empiffrait d'autant de burgers qu'elle ne le pouvait. Un mari toxico qui passait la plupart de son temps à traîner dans des bars, rentrant ivre mort à l'aube.
Tess avait toujours eu ce « don » - si on pouvait appeler ça un don - ou du moins cette facilité à analyser les gens. Elle arrivait à déchiffrer leurs comportements et à comprendre ce qui se passait dans leurs têtes. En bref, elle lisait en eux. Par exemple cette femme, là, de l'autre côté de la rue, qui venait de sortir précipitamment d'une maison, avait l'air de cacher quelque chose. Elle regardait partout autour d'elle, comme pour vérifier que personne ne l'avait vu, reboutonnait le haut son chemisier et réajustait les quelques mèches folles du dessus de sa tête. Son rouge à lèvres avait légèrement débordé sur le côté droit de sa lèvre supérieure, et elle avait un petit sourire en coin, comme celui d'un enfant venant de faire une bêtise. Elle fouilla dans son sac à main et en sortit un petit anneau qu'elle glissa à son annulaire. Elle descendit les marches du perron et regagna sa voiture. Grâce à tous les éléments que Tess avait pu observer, elle en déduisit que cette femme trompait son ou sa partenaire. Déchiffrer et comprendre le comportement des personnes était devenu un jeu d'enfant pour Tess.
C'est pour cela qu'elle connaissait si bien le mode de vie de sa nouvelle famille d'accueil. Elle n'était arrivée qu'il y a 3 jours et pourtant, elle savait que le quotidien de ces gens ne se résumait qu'à se goinfrer, se saouler et dormir. Elle ne comprenait pas d'ailleurs comment ils pouvaient être autorisés à accueillir un enfant.
Après avoir marché pendant 15 minutes dans les rues délabrées et mal famées du quartier Sud de Springfield, Tess arriva enfin au pied de l'immeuble qu'elle cherchait. Elle poussa la porte du hall et monta cinq étages avant de se retrouver face à la porte de l'appartement 3E. Elle hésita un moment avant de se décider à entrer. En passant le pas de la porte, elle revit la même image qu'elle voyait en boucle depuis trois jours : une femme avachie dans son fauteuil, une cannette de Coca à la main, la pièce faiblement éclairée par la lumière de la télé branchée sur un programme de télé-shopping. La femme se retourna vers Tess :
«T'es déjà rentrée, toi ? , lui demanda-t-elle de façon ingrate, ah oui c'est vrai, tu parles pas.»
Tess lui lança un regard noir et partit dans sa chambre.
Effectivement, Tess ne parlait pas. Elle ne parlait devant personne, que ce soit devant ses professeurs, devant sa famille d'accueil, devant les personnes des services sociaux ou même toute seule devant un miroir. Depuis ses 2 ans, elle n'avait jamais prononcé un seul mot. Son mutisme était apparu suite au décès de ses parents. Les médecins avaient d'abord pensé à un autisme non détecté mais il s'agissait d'un traumatisme lié au manque parental. Cela faisait tellement longtemps qu'elle n'avait pas utilisé ses cordes vocales que Tess avait en quelque sorte oublié comment les utiliser. Elle s'était enfermée dans une bulle que personne n'avait réussi à éclater, ce qui rendait les choses compliquées pour elle et pour toutes les personnes de son entourage. Au lycée, elle ne parlait à personne et n'avait aucun ami, elle passait ses pauses à écouter de la musique, cachée dans un vieux placard à balais vide dont elle avait volé la clé au gardien. En résumé, Tess était muette.
Assise sur son lit, elle regardait son reflet dans le miroir. Elle remarqua que quelque chose n'allait pas : ses cheveux. Elle détestait quand ils étaient trop long, mais n'ayant pas assez d'argent pour aller chez le coiffeur, elle se les coupait elle-même. Elle fouilla dans son sac à dos et trouva dans sa trousse une paire de ciseaux qu'elle prit. Tess se dirigea dans la salle de bain, y verrouilla l’accès et commença par mouiller ses cheveux. Elle prit une brosse afin de se les démêler puis coupa environ 3 cm. Une fois sa coupe terminée, elle retoucha un peu sa frange. Ses cheveux noirs de jais lui arrivaient désormais au-dessus de ses épaules.
Étant satisfaite, elle retourna dans sa chambre. Elle s'allongea sur son lit, fixant le plafond rempli de tâches d'humidité. Il était hors de question qu'elle reste plus d'une soirée dans cet appartement pourri jusqu'à la moelle. Tess était désormais prête à faire ce qu'elle faisait si bien : fuguer.
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Psychamagia
Science FictionUn groupe d'orphelins aux dons mysterieux. Une organisation qui les épie depuis leurs tendres enfances. Des yeux qui brillent et des capacités psychiques hors-normes. Ajouté à cela, les joies de l'amour... ou de la haine. Comment Tess réussirait-ell...