Chapitre 1

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Il fait noir, j'ai faim, j'ai froid, je suis mouillé. C'est le genre de nuit infinie et solitaire, les premières nuits froides d'automne. Je dois courir m'abriter chez moi, je le sais, mais je préfère errer sans but en attendant le soleil, dans les rues de cette ville que je connais bien maintenant. Je vis dans ces pauvres ruelles depuis toujours, toujours seul. J'ai trouvé un endroit où loger à force, dans un vieil immeuble délabré où vivent les gens qu'on a oublié. Nous nous sommes tous rassemblés en ce lieu, où personne ne vient et ne demande de loyer. Même s'il me permet de vivre abrité et dans un espace personnel, je le déteste profondément, le fuis et ne me presse donc pas de rentrer.

J'avance toujours, doucement, les yeux fixés sur le sol, les pieds traînant dans la rue devenue torrent ; mais déambuler ainsi n'est pas mon seul passe-temps. Un autre, plus dangereux, est devenu ma seule source de distraction. C'est également comme une sorte de travail où je récupère l'argent que je peux. Je passe la nuit à me balader innocemment pour espérer récolter des informations ou observer. Observer et entendre quoi ? Les macros qui hantent cette ville. Ces dizaines de gangs organisés, spécialisés dans plusieurs domaines d'illégalité, de la simple délinquance, les plus nombreuses, en passant par le trafic en tous genre, le vol et l'infiltration, jusqu'à l'assassinat. Moi, je me plais à les détruire, non pas pour jouer aux justiciers, mais tous bêtement pour m'amuser, et cela depuis un an. Une année que je récolte et note des informations sur toutes les macros connaissable, et je compte passer à l'acte d'ici deux ans, le temps de me créer une couverture et des plans qui m'amuseraient. En attendant, je vends mes informations pour survivre, mais j'ai terriblement hâte de commencer à toute les détruire.

Après une bonne heure de marche sous les flots, j'atteins enfin le bâtiment où quelques lumières sont encore allumées. Elles éclairent le sol devant moi comme pour me guider. Je pousse la lourde porte et entre dans le hall ; personne n'habite le rez-de-chaussée par soucis de sécurité, mais aussi, car les fenêtres ont toutes été brisées par des délinquants, je ne dirais pas par des squatteurs, parce qu'ici, nous sommes tous des squatter d'une certaine manière, occupant ce bâtiment plus ou moins illégalement.

Je monte lourdement les escaliers, avec à chaque pas un bruit d'éponge imbibée d'eau provenant de mes baskets, mon vieux sweat kaki, tout aussi trempé, me pèse sur les épaules et ralentit encore plus mon allure. Des gouttes tombent de mes longs cheveux bleus foncés et de ma capuche pour atterrir sur ma peau noire et luisante d'humidité. Mes yeux gris clair brillent dans l'obscurité des longs escaliers en colimaçon où je me traîne, jusqu'au cinquième et dernier étage. De là, j'aperçois la dernière ligne droite, j'avance dans le corridor, devant les dizaines de portes avant la mienne, à l'aveugle. Les murs sont terriblement fins et on peut entendre les bruits obscènes, auxquelles je ne fais même plus attention maintenant, c'est un peu comme si je vivais avec des dizaines de prostituées et de gros porcs, sans compter mon voisin d'en face qui est probablement un criminel, et, pour dire vrai, je l'ai déjà vu à l'œuvre dans une ruelle plus loin... Je rentre finalement, me déshabille et me sèche les cheveux en même temps de me diriger vers mon vieux canapé, presque seul meuble de mon petit 9m². J'aimerais dormir, mais je ne peux pas, ou plutôt pas complètement, pour plusieurs raisons. D'abord, car cet endroit est loin d'être sûr, il n'y a qu'à citer mon voisin de pallier. S'il le veut, il peut casser la très fine porte censée me protéger et m'assassiner, et personne ne retrouvera jamais mon corps dans ce trou et d'ailleurs, qui me chercherais, qui sait que j'existe ? La deuxième raison est les incessants bruits de mes voisines, mais aussi les coups de feu, parfois même juste au pied du bâtiment, qui réveillent en sursaut. Je finis par légèrement m'assoupir, somnolant ainsi toute la nuit jusqu'au petit matin, bercé par la pluie, les coups de feu, les cris...

J'ai pris l'habitude de me lever au moment où les premières lueurs de l'aube apparaissent pour rapidement quitter cet endroit où je me sens mal-à-l'aise et à l'étroit. Je me dirige donc vers la sortie, faisant le chemin inverse à celui d'hier, mais cette fois courant presque. Je cours, car je vais m'acheter mon repas de la journée avec mon peu d'argent. Une fois par semaine, je m'achète du nattô (Nda: plat connu au Japon, c'est du soja fermenté), j'adore ça, mais achète toujours le moins cher, à une centaine de yens. Je me demande comment est celui des restaurants. Pendant que je m'avance vers le centre de la ville, j'entends un long cri derrière moi auquel je réagis en me retournant puis en me mettant en position de défense. Je me maudis pendant une seconde d'avoir oublié mon couteau de poche, avant de me rendre compte qu'il n'y a personne en vue. Le hurlement ayant repris, je me dirige prudemment vers sa source. Derrière le coin du bâtiment, j'entrevois une petite silhouette gigotant et me rends vite compte de la présence d'un enfant d'à première vue environ 3 ans. Il est étalé dans des feuilles mortes, cherchant on ne sait quoi en se courbant et en roulant, bientôt à bout de forces, si bien qu'il ne peut plus marcher. Je suis d'abord surpris d'en voir un ici en si mauvaise posture, du moins je crois que ce n'est pas la place d'un enfant, et l'assois. Je pense qu'il est rassuré de voir quelqu'un, car il a cessé de pleurer quand il m'a remarqué. Il me regarde étonné avec ses grands yeux vert. Je dois réfléchir posément. C'est probablement un fils non voulu qu'on a fini par abandonner, et je n'y connais strictement rien à l'amour maternel, mais je pense pouvoir dire que faire ça est inhumain. La question désormais, est : que faire de ce petit être maintenant que je l'ai trouvé ? Je pense en être responsable désormais mais ne peux pas l'élever. Il existe bien ces foyers pour orphelins... mais je connais bien ces camps de concentration qui te détruisent à petit feu. Ils ont un lien particulier avec les macros et ne respectent donc pas les lois. La souffrance que les enfants endurent, que j'ai endurée, m'a forcé à fuir, inlassablement, espérant qu'ils ne me retrouveraient jamais. Hélas, j'ai passé toute ma vie à fuguer, me cacher dans les ruelles sombres, être retrouvé, ramené, recommencer, comme un cycle. J'ai l'impression qu'ils se sont enfin lassés de partir à ma recherche, ça doit aussi être parce que j'ai 17ans, je dois être assez grand pour survivre. Maintenant, je n'ai plus qu'une solution pour cet enfant, j'espère que c'est la meilleure. Je dois le prendre avec moi et le protéger de ce monde. Peut-être qu'avoir un petit frère égayera un brin cette vie ennuyeuse ? Je suis vraiment d'une grande bonté aujourd'hui...

À SUIVRE


Pour rappel, je l'ai mis dans les mots clés, mais on se trouve au japon et à notre époque :3

Prévenez moi si vous voyez des fautes, j'ai essayé de me corriger au maximum.

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⏰ Dernière mise à jour : Jul 25, 2021 ⏰

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