Chapitre 2

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Daniel.

Il n'est même pas 8 h que le soleil est déjà haut au-dessus des champs.

La chaleur est sans pitié dans la région. Autant dans le mas, les murs de pierre conservent la fraîcheur toute la journée, mais dans l'entrepôt, les températures grimpent vite.

Les ouvriers sont déjà en train de s'activer sur la chaîne de production et dans la zone de logistique quand je la traverse.

— Bonjour chef !

L'un après l'autre, ils relèvent la tête et saluent mon passage d'un geste de la main ou d'un sourire. Pas sûr que je m'y habitue un jour.

Dans le bureau accolé à l'entrepôt, j'ouvre en grand la fenêtre pour laisser entrer un courant d'air relativement frais avant que la chaleur ne devienne insupportable. Je mets en route la cafetière et fais courir mon doigt sur le planning pour vérifier les commandes du jour.

Quand Eva entre à son tour dans le bureau, le café est prêt et elle se sert directement une tasse avant même d'allumer l'ordinateur.

Elle trie rapidement la liasse de papiers administratifs qu'elle a prévu de traiter dans la journée et soupire au-dessus de son café.

— T'aurais pu faire un effort hier...

Je délaisse le fichier des commandes un moment pour la questionner en haussant un sourcil.

— De quoi tu parles ?

— Accueillir plus convenablement les journalistes...

Je retiens un soupir agacé, inutile de commencer une nouvelle journée en se prenant la tête avant même d'avoir pris mon café.

Eva souffle sur sa tasse et tend la main vers la boîte à sucres.

Le temps qu'elle touille sa boisson, son regard contrarié se détend peu à peu.

— Je les ai installés dans le futur gîte. J'espère qu'ils n'ont pas eu trop chaud cette nuit...

— Tu crois encore que des gens auront envie de venir s'isoler volontairement dans ce coin paumé ?

Elle secoue la tête, mais ses traits se sont radoucis. Eva ne reste jamais contrariée bien longtemps, elle s'évertue à voir le bon côté d'une situation. On ne pourrait pas être plus différents au quotidien.

— Tout le monde n'est pas aussi réfractaire à la région que toi. Et puis ça nous ferait une petite rentrée d'argent non négligeable...

Je me sers à mon tour du café et essaie de retenir les remarques amères qui me viennent.

Ce coin de la région n'a rien pour plaire. Il est aride, inaccessible et terriblement reculé. Vivre ici n'est pas une sinécure. Une fois habitué à la dureté du terrain et du climat, il faut encore s'adapter aux gens d'ici, aussi rêches que la terre sur laquelle s'enracinent nos oliviers. Que des touristes puissent choisir volontairement de venir s'isoler dans ce coin me dépasse. Que des prétendus reporters puissent porter un intérêt à l'exploitation m'échappe complètement.

— Des journalistes qui restent une semaine entière tous frais payés, c'est pas plutôt des profiteurs ?

Eva lève les yeux au ciel.

Point de fuite [MM] - À l'ombre des oliviersOù les histoires vivent. Découvrez maintenant