Quand nos chemins se recroiseront

Adrian & Jade

J'avais 14 ans à l'époque, j'étais une étudiante moyenne avec une motivation quasi inexistante. Pourtant, je ne passais pas mon temps à courir après les garçons comme beaucoup de mes amies le faisaient. Mes parents avaient tendance à dire qu'à cet âge, c'est normal d'avoir les hormones en ébullition, et peut-être avaient-ils raison, peut-être que j'étais en retard sur les autres. De toute façon, j'étais souvent en retard sur tout. Ma croissance, dans un premier temps. Mon médecin me disait que j'avais le corps d'une petite fille de deux ans plus jeune que moi. En gros, j'ai grandi après tout le monde, j'ai eu des seins après tout le monde et j'ai eu mes premières règles après tout le monde. Quand j'étais plus jeune, c'était quelque chose qui me complexait beaucoup, d'avoir la sensation d'avoir un wagon de retard par rapport aux autres. Comme je n'avais pas de seins, je mettais des soutiens-gorge rembourrés pour donner l'illusion que j'avais un semblant de poitrine. Je me disais que ça n'avait pas vraiment d'importance, puisque ce ne serait pas demain la veille que quelqu'un me verrait nue.

Au collège, toutes mes amies avaient déjà expérimenté les relations "amoureuses" et pouvaient en parler. Je mets "amoureuse" entre guillemets car, peut-on réellement parler d'amour quand on a 15 ans ? En bref, même dans ce domaine, j'avais un train de retard sur les autres. Pourtant, ce n'est pas faute d'avoir voulu tomber amoureuse. Moi aussi j'aurais bien aimé connaître les émois des premières fois. Le premier baiser, le premier regard, le premier touché. Mais je crois que le fond du problème était surtout ma tête. J'étais ce genre de fille à paniquer dès qu'elle s'approche d'un mec... en vérité, je ne sais pas pourquoi je dis "j'étais", parce que c'est bien encore d'actualité aujourd'hui. J'ai déjà eu des histoires, mais jamais bien longues. Je suis sortie avec Quentin en 6ème, mais ça a duré en tout et pour toutes 5 heures. Il ne me plaisait pas, si je suis sortie avec lui c'est parce qu'une ancienne copine avait pris mon téléphone pour répondre "oui" au petit mot qu'il m'avait glissé plus tôt dans la matinée qui demandait si je voulais sortir avec lui et comme je n'avais pas assez de caractère pour lui tenir tête à l'époque, je l'ai laissé faire... Mais Quentin ne me plaisait pas et je l'ai quitté aussi lâchement que j'ai accepté de sortir avec lui : par sms. Je sais, ce n'est pas très gentil, mais qui voulez-vous, j'avais 11 ans. D'ailleurs, j'ai appris quelques années plus tard, quand j'étais en 4ème, que Quentin avait encore quelque chose pour moi, et je n'ai jamais compris quoi, ni pourquoi.

Ensuite, il y a eu Maxime. Lui, c'était une histoire imprévue, et mal calculée. À l'époque, j'étais en 5ème et ce mec ne m'intéressait pas. Pour être tout à fait honnête, je ne l'avais même jamais regardé. À cette époque, j'avais une amie, Victoria. Le genre d'amitié un peu toxique qui conduit souvent à des disputes et à de la rivalité. Un jour on s'aimait, le lendemain on se tirait dans les pâtes, et parfois pour des histoires sans queue ni tête, mais nous étions jeunes et à cet âge, une broutille peut avoir beaucoup d'importance. Victoria avait, depuis le début de l'année, des vues sur ce fameux Maxime que je trouvais à cet instant, vraiment pas attirant. Elle ne m'en avait pas vraiment parlé, mais je m'en doutais quand même. Pourtant, ça ne m'a pas empêchée de mal agir avec elle. Après une énième dispute avec elle, je me souviens avoir eu une conversation avec Polly, la demi-sœur de Maxime qui m'avait dit :

—    Si tu veux emmerder Vic', tu devrais faire semblant d'être attirée par Maxime. 

L'idée était trop tentante ! J'étais en colère — pour une raison qui m'échappe encore — et je voulais lui faire payer. J'étais jeune et peu mature, alors j'ai saisi l'opportunité.

Sauf que voilà, je me suis fait prendre à mon propre jeu et d'une attirance qui ne devait qu'être factice, j'en suis venue à vraiment bien aimer ce Maxime.