Chapitre 1

1K 77 18
                                    

Le jour où la princesse naquit, le roi et la reine, heureux d'avoir une héritière, organisèrent une fête d'une grandeur inimaginable en l'honneur de la princesse.
Malgré la pauvreté du pays, ils célébrèrent grandement la naissance de leur petite fille, et invitèrent tout les sujets du pays à venir y assister.
Les festivités durèrent une, deux semaines, puis tout redevint comme avant.
Quelques semaines plus tard, alors que la princesse fêtait ses deux mois, une épidémie de peste se déclara, et la population fut ravagée : plus d'un tiers fut emporté par la faucheuse, qui se saisit de plus de cinquante personnes présentes à la cour au passage.
Le deuil fut long et terrible pour ce royaume désormais privé de ses meilleurs chevaliers et conseillers du roi.
Tandis que le royaume s'affaiblissait, les sujets restants étaient écrasés sous le poids des impôts qui augmentaient considérablement au fil du temps. En 10 ans le royaume tomba dans la déchéance.

Mais revenons à notre princesse. Née le dixième jour de printemps au beau milieu du jour, elle était dotée de cheveux blonds magnifiques, et ses yeux, verts comme la forêt printanière, reflétait toute la joie et la naïveté de ce regard enfantin.
Elle était, d'après les devins, promise à un grand avenir, rempli de joie et de prospérité.
Mais les signes mentent souvent ; le jour de son premier anniversaire, alors que la nuit se faisait noire d'encre, une sorcière entra dans le château, elle était peut-être jeune, mais sa peau blafarde était maintenant ridée par les années, comme si elle eu été usée avant l'âge. Elle était vêtue d'un long manteau noir qui battait derrière elle à chaque pas, comme l'aurait fait une chauve-souris. Elle traversa les longs couloirs sombres telle une ombre, avant de s'arrêter devant la chambre royale. De là, elle sortit une main, puis un bras de son vêtement, déplia ses longs doigts, et inséra un ongle dans la serrure.
Elle tourna un coup sec vers la droite, et son doigt se brisa dans un craquement sec. Elle retint un cri, fronça les sourcils, avant de lorgner son doigt désormais inutilisable. Elle sortit un petit couteau, le brandit dans les airs et l'abattit sur son doigt quelques secondes après. Celui-ci se sectionna d'un coup sec et tomba dans un bruit mou sur le sol.
Puis la sorcière se glissa dans la chambre royale désormais ouverte.
Elle s'approcha du lit, scrutant avec un regard carnassier le couple endormis, glissa sa main aux quatre doigts dans sa cape, et sortit des pans de son vêtement noir comme la nuit un long poignard à la lame effilée.
Et enfin, l'empoignant à deux mains, le planta dans le coeur de la reine endormie.

Elle le remua quelques instants dans la plaie, et fourra sa main dans la bouche de la reine qui poussa un râle silencieux d'agonie.
Sa besogne accomplie, la sorcière se dirigea alors vers la chambre de la petite princesse qu'elle découvrit endormie le pouce dans la bouche. Sans prendre le temps de s'attendrir devant son visage angélique et ses cheveux d'or, celle-ci s'empara brusquement de la petite fille et disparue dans la nuit dans un bruissement de cape.

Le lendemain, quand le roi découvrit sa femme morte et sa fille disparue, sa douleur fut telle qu'il sombra peu-à-peu dans un désespoir sans fond qui le conduit à la folie.

+*+*+*+*+

La petite princesse, elle, fut élevée à l'écart, dans une haute tour d'où elle ne pouvait pas sortir. C'est ici que sa sois-disant mère la retenait captive. La sorcière, contrairement aux autres mères, aimantes et attentionnées, était l'exact opposé : méchante et psychopathe, elle retenait celle qu'elle avait prénommée Raiponce pour se venger du roi qui l'avait brisée des dizaines d'années auparavant.
Elle avait été belle, c'est ce qu'elle disait : le roi l'avait séduite, lui-même subjugué par sa beauté, lui avait fait partager son lit, avant de lui brûler le visage, de lui infliger les pires tortures puis de la rejeter quand il avait appris qu'elle pratiquait les forces obscures de la sorcellerie.
C'est donc Raiponce, princesse innoncente, qui subissait pour son père.

Raiponce fut battue et torturée chaque jour. Ce jeu sadique dura quinze ans, et jamais la sorcière ne se décidait à arrêter, ni ne manquait d'imagination.

Quand Raiponce eut dix ans, la sorcière fut tentée de lui couper ses beaux cheveux qu'elle lui jalousait.
Mais, contre toute attente, ceux-ci repoussèrent encore plus épais et longs le jour suivant. Une autre fois, Raiponce se brûla la main en voulant attraper je ne sais quel substitut dans le poêle. Pour la punir, la sorcière attacha un seau au ventre de Raiponce. Devinez ce qui se trouvait dans le seau ? Un rat affamé.
Et où va un rat affamé ? Vous l'avez sûrement deviné.
Raiponce hurla plusieurs heures, le ventre petit-à-petit dévoré, avant que la sorcière ne daigne lui enlever le seau.

Raiponce tenta alors à plusieurs reprises de fuir, sans succès.
La première fois à ses huit ans ; après être descendue à l'aide de ses cheveux, exceptionnellement longs au beau milieu de la nuit, elle se perdit dans les bois, avant d'être trouvé par un bûcheron malhonnête qui l'enferma dans sa cabane. Elle fut retrouvée quelques jours après par sa belle-mère qui tua le chasseur avant de lui infliger le châtiment qu'elle avait reçue de son père : le visage de Raiponce fut brûlée, et ses yeux n'y réchappèrent que par miracle.
La seconde fois à ses dix ans ; Raiponce revint d'elle-même, trop terrifiée à l'idée de se perdre et que sa belle-mère la retrouve pour lui infliger on ne saît quelle torture.
La troisième et dernière fois à ce jour fut le jour de ses quinze ans ; Raiponce s'enfuit par la fenêtre au beau milieu de la nuit, glissa à terre à l'aide de ses cheveux, et s'enfonça dans la forêt le plus loin possible, bien décidée à ne jamais revenir. Sa peau lui faisait mal, ses muscles lui faisaient mal, son cœur lui faisait mal. Quand le jour se leva, sa marâtre se rendit compte de son absence et partit alors la retrouver, folle de rage qu'elle lui ai échappé une fois de plus.
Raiponce avait eu le temps de sortir de la forêt apres avoir demandé son chemin à un chasseur à peu près honnête, et était arrivée en ville, où elle connu son plus bel anniversaire, loin de sa marâtre et de ses supplices sans fin.
Car le roi célébrait chaque année l'anniversaire de sa fille, malgré les dettes et la crise qui assaillaient le pays et malgré le fait qu'elle est disparue.
Il priait pour qu'un jour, malgré ses quinze années écoulées, elle revienne. Elle réussit à dormir à différents endroits sans trop de soucis, et se nourrit sans difficulté grâce aux quelques économies qu'elle avait pris en partant.
Le troisième jour, tandis que sa marâtre la cherchait toujours avec cet empressement des bêtes furieuses, Raiponce réussit à aller dans la bibliothèque royale, curieuse comme elle l'était, et, par un hasard de conte de fée, elle croisa le roi qui y était aussi.
Le sentiment qu'elle eu en croisant son regard fut indescriptible. De la joie, du soulagement et un bonhneur indescriptible en reconnaissant celui qui avait été son géniteur : les années n'effacent pas les souvenirs.
Puis le roi s'avança, les yeux baignés de larmes et Raiponce se jeta dans ses bras en pleurant, soulagée et sûre que son supplice se terminait enfin.

L'histoire aurait pu s'arrêter là, mais nous ne sommes pas dans un conte de fée.

Bloody Popular Story / RaiponceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant