When Night Comes

Chapitre 1: baptême de sang

J'avais imaginé les choses autrement; je ne pensais pas me retrouver en chasse à peine quelques jours après mon Baptême. Je savais que quitter ma famille m'aurait rendue triste, seulement, je ne m'étais pas attendue à ce que la séparation soit aussi précoce. Mais la fierté que je leur inspirerais gonflais mon cœur et me donnait courage. Nous étions sur la route depuis près de trois jours, moi, mon cousin Jake, mon oncle Alfred et notre ami Isaiah; la lune pleine et éclatante découpait l'ombre des arbres qui bordaient la route, tels des fantômes immobiles agitant leurs bras vers le ciel et les étoiles. La voiture était silencieuse, le moteur ronronnait, la radio chuchotait de petites voix et parfois quelques notes sourdes de musique. J'étais assise à l'arrière, essayant tant bien que mal de trouver une position confortable pour dormir, éreintée par les heures de route. Je jetais un coup d'œil près de moi, laissant s'échapper un sourire en voyant Isaiah les yeux clos, la bouche entrouverte reposant sur son torse qui se soulevait au rythme de sa respiration: Il avait toujours eu ce don de pouvoir s'endormir n'importe où, qu'importe l'inconfort. Oncle Alfred avait les yeux rivés sur la route, pas une once de fatigue dans son regard; on pouvait facilement deviner qu'il était habitué et que les années ne l'avaient en rien abîmé. Ses yeux gris et froids comme la neige se posèrent sur moi et me transpercèrent comme deux lames affûtées, et je détournais le regard par reflexe vers la route plongée dans l'obscurité. Il me fit entendre sa voix grave de marbre;

" - Tu ne dors pas ?

Non. Je n'y arrivais pas. Je ne saurais dire si c'était à cause de l'excitation, ou de la peur. Je m'attendais à en voir surgir de nulle part pour me trancher la gorge et se repaître de mon sang chaud, me laissant agoniser dans une longue souffrance. Je répondit d'une voix blanche;

- les ronflements d'Isaiah m'empêche de dormir.

Je le vis arquer son sourcil gauche, sans me croire. On ne pouvait pas lui cacher grand chose, surtout moi. Mais il ne fit aucun commentaire, et redirigea son regard devant lui, silencieux. Je posais ma tête contre la fenêtre, laissant défiler les étoiles et les arbres. L'envie de discuter me secoua.

- Est-ce que tu penses que j'en suis capable ? demandais-je en brisant le silence.

Oncle Alfred garda ses yeux immobiles.

- Tu as été bien entraînée, répondit-il. Il y aura toujours des imprévus, bien sûr. Mais avec les reflexes que tu as acquis, tu devrais t'en sortir. Pourquoi penses-tu à ça maintenant ?

- Je sais pas... je ne veut pas vous décevoir. Ou mourir dès le début, haha...

- Moi aussi j'étais nerveux la première fois.

J'étais intriguée; je ne lui avais jamais posé la question auparavant. 

- Comment ça c'est passé pour toi ? hésitais-je en me redressant sur le siège.

Il marqua une pause, détendant ses épaules.

- J'avais la frousse, c'est certain, souria t-il furtivement. Mais je n'étais pas seul, et cette chose oui. La traque avait duré un moment, la forêt était dense et le sol couvert de neige, c'était compliquer de repérer ses traces malgré cela. Mais mon père a eût un bon coup de fusil, et on en est tous ressorti en un seul morceau.

Je m'étais avancée et appuyé sur le siège avant où somnolait Jake, tout ouïe.

- A quoi elle ressemblait ? demandais-je dans un souffle.

Il serra le volant, une expression étrange sur le visage; il semblait se retrouver devant elle, après tout ce temps. Il continua d'une voix mystérieuse;

- Celle-ci ressemblait à un homme. Une apparence quelconque, un corps presque pitoyable. Mais son regard... il était de ceux qui vous marquent la première fois. Les pupilles rouges sang, affolées par l'excitation de la chasse... Il n'y avait rien d'humain dans ces illusions charnelles, seulement de la bestialité et une folie meurtrière.