Chapitre 1

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- Eh Sanemi !

Le dénommé "Sanemi" releva doucement la tête.

- Mitsuri veut nous parler ce soir, continua son interlocuteur. Tu viendras ?

Sanemi baissa la tête sans répondre.

Habitué au mutisme de son ami, le garçon aux cheveux bordeaux en face de lui souris, et lança :

- A ce soir alors !

Puis il tourna rapidement les talons.

Même lui ne supporte plus ma compagnie...

Sanemi soupira.

Genya...

Il leva la tête vers le plafond de bois.

Déjà six mois que tu es mort...

Pourtant...

Rien n'avait changé. Le monde n'avait pas cessé de tourner, les oiseaux de chanter, les démons de tuer.

C'était... Comme si rien ne c'était jamais passé.

Qu'il n'était jamais mort, au cours de cette nuit là.

Comme si un drame n'avait pas eu lieu.

Car en fait, Genya...

Tu n'était rien.

Ta mort ne changera pas le sens du vent.

N'arrêtera pas le cours du temps.

Ta mort...

Ne veut absolument rien dire.

Tu serait resté vivant que rien ne serait différent à aujourd'hui.

Mis à part la douleur.

Celle ressentie par ceux qui t'aimaient Genya.

Au bout de 6 mois, Sanemi avait fini par comprendre.

Comprendre que son petit frère ne reviendrait pas.

Qu'il ne réapparaitrait pas comme par magie.

Qu'il était bel et bien mort.

L'enterrement de Genya avait eu lieu deux semaines après sa mort.

Mais Sanemi savait, que son petit frère ne voulait pas être enterré.

Alors il avait récupéré le corps, et il l'avait brûlé, avant de rependre ses cendres dans une forêt, non loin des restes de leur maison.

Ça faisait longtemps que Sanemi n'était pas revenu ici...


Flash back


Sanemi marchait, le corps inanimé de son frère dans ses bras.

Il ne savait pas où exactement Genya voulait être enterré.

Alors il avait erré dans la forêt.

Jusqu'à se souvenir d'une clairière.

Ses pas l'avait guidé instinctivement jusqu'à ce lieu.

Et, alors que le blanc restait figé devant l'espace herbeux planté d'un rocher en son centre, les souvenirs remontèrent.

Lui et son petit frère, courant, l'herbe grasse pliant sous leurs pieds.

Lui, retrouvant Genya en pleurs, et le réconfortant.

Une larme perla sur sa joue.

Elle tomba sur la poitrine sans vie de son frère.

- Sanemi ?

Le blanc sursauta, surpris.

Giyuu était assis sur le rocher.

- Giyuu ?

Le premier tourna la tête, comme pour masquer ses yeux pleins de larmes.

- Qu'est ce que tu fais ici... lui demanda-t-il dans un souffle rauque.

- J'enterre Genya.

Le pilier de l'eau le regarda.

Ses yeux gonflés étaient pleins de peine et de douceur.

Puis il hocha la tête, avec lenteur.

- Tu sais, lui souffla-t-il, ici, c'est la tombe la plus grande qui ait jamais existé. Une légende dit que ceux qui sont enterrés ici sont des gens qui occupaient une place très particulière dans le cœur de quelqu'un. Elle dit que les personnes au cœur pur viennent ici enterrer l'être qui leur était le plus cher...

Sanemi souris.

Jamais Giyuu n'avait vu un sourire si... plein de peine, si brisé.

- Et toi ? Qui as-tu enterré ici, Giyuu ?

Stupéfait, l'autre releva la tête.

- Comment... As-tu su ?

- Tu n'es pas ici pour rien, Giyuu.

L'autre souris tristement, les yeux baissés.

- Sabito... souffla-t-il. Mon premier et seul ami... et amour...

Sanemi hocha la tête.

- Il est enterré là, continua Giyuu en pointant un sabre planté dans le sol. C'était "notre" sabre... On l'avait créé ensemble, avec l'aide d'un forgeur. On s'entrainaient ici avec.

- Et dis moi... Sabito... C'était ton âme sœur... pas vrai ?

- Oui... Et Genya ?

- Oui... Il n'y a rien de pire que de perdre son âme sœur.

Giyuu hocha la tête, avant de la détourner.

Mais Sanemi avait eu le temps d'apercevoir des larmes dans ses yeux couleur océan.


Fin du flash back


Les yeux de Giyuu...

Sanemi aurait pu s'y perdre, comme si son regard si envoutant était son esprit, labyrinthe emplis de ses propres larmes et doutes.

Le cœur de Giyuu était au moins aussi brisé que celui de Sanemi.

Au fond, les deux étaient semblables.

Leurs yeux hurlaient la même douleur, la même envie de vivre, la même peine.

La même douceur.

Car, même si, l'un comme l'autre n'avaient pas l'air ni sociable ni gentil, leur rédemption et leur gentillesse dépassait l'entendement.

Pourtant, les autres piliers et pourfendeurs les jugeaient.

Se permettaient de juger deux hommes brisés.

Perdus dans le labyrinthe de désespoir qu'était leur âme.

Les insultes résonnaient comme un écho démoniaque punitif dans leur esprit perdu.

Ils tombaient, toujours plus loin dans l'Abysse.

Mais leurs yeux avaient depuis longtemps séchés.

Sanemi se leva.

Il s'étira avec douceur, et  ferma les yeux.

Comme toujours, le sourire de son petit frère surgit de ses souvenirs.

Sanemi rouvrit brusquement les paupières.

- Laisse moi tranquille ! hurla-t-il. Laisse moi, vas-t-en ! Je t'en supplie, laisse moi Genya ! Pars ! Mais ne me laisse pas seul ! Non, vas-t-en ! Mais reste ! Je te hais ! Mais je t'aime ! PUTAIN J'EN AI ASSEZ !

- Seigneur Sanemi ! paniqua une voix.

Mais l'homme n'écoutait déjà plus.

Il avait sauté d'une fenêtre qu'il venait de briser.

Terrifié mais en colère, il s'enfuis dans la forêt.

Laisse moi, laisse moi, laisse moi, mais ne part pas je t'en supplie !

𝖨 𝖭𝖤𝖤𝖣 𝖸𝖮𝖴 ━ 𝖲𝖺𝗇𝖾𝗆𝗂/𝖦𝖾𝗇𝗒𝖺Où les histoires vivent. Découvrez maintenant