Iris pressa le pas. Elle venait d'apercevoir, au détour de la route pavée, les flèches supérieurs de la Haute Tour de Dinsérin s'élever dans le ciel.
Les rayons de soleil du printemps leur donnaient des airs de pointes de cristal fragiles, mais la jeune fille savait qu'il existait peu d'édifices aussi solides dans les Terres Siranes. Bâtie par magie,la Haute Tour avait résisté aux guerres, aux ravages du temps, à la chute de l'empire Siran.
Elle s'arrêta au sommet de la côte pour contempler la cité et lissa sa natte rousse d'un geste nerveux. Comme on le lui avait dit, le spectacle était saisissant.
C'était l'une des cités les plus anciennes du continent. Ceinte d'un haut mur de pierre blanches piqué de nombreuses tours, elle n'avait été prise qu'une seule fois depuis sa construction, alors que l'Empire Siran et la Confrérie des Tisseurs de Sorts n'en étaient qu'à leurs balbutiements.
La voyageuse garda les yeux rivés sur la Tour qui, en pleine lumière, paraissait presque transparente. Alors que la ville se rapprochait au rythme de ses pas, elle dut de plus en plus lever la tête pour en garder le sommet en vue et dut finir par abandonner l'idée de conserver dans son champ de vision l'imposant édifice. Les murailles, hautes de plus de vingt mètres, finirent par lui bloquer la vue.
Iris observa alors la foule de voyageurs, dont elle faisait désormais partie, qui avançait au pas vers les portes grandes ouvertes.
La jeune fille était heureuse d'être arrivée avant la nuit tombée. Entrer passée l'heure de fermeture des portes n'était jamais une chose facile.
« Bahnréza... »
Un voyageur à cheval fit un écart pour l'éviter après ce murmure méprisant teinté de crainte. Iris leva brièvement ses yeux rouges sur lui, une lueur de frustration les illuminant brièvement. Elle rabattit sa capuche tandis que les yeux du cavalier s'attardaient sur les légers renflements de ses lèvres, traitres témoins de la présence de ses canines acérées.
Elle referma également sa cape. Sa queue était enroulée autour de sa taille, camouflée par sa ceinture. Mais il lui serait tout de même difficile de la cacher à un examen approfondi.
SI ses yeux ne rebutaient pas les gardes, le reste le ferait assurément... sans compter que ses vêtements, riches et élégant squelques mois plus tôt, n'étaient plus que l'ombre de sa noble mise en miettes! Les couleurs étaient passée, sa chemise avait jaunit, son pourpoint de velours était râpé. Ne restaient confortables que ses bottes. Bien que fatiguées par la route, elles étaient toujours solides et épousaient parfaitement ses pieds.
La jeune fille se fondit dans la foule et s'éloigna du cavalier,espérant que celui-ci ne serait pas la source d'une rumeur inquiétante pour la foule.
Iris ne voulait pas d'ennuis.
Elle avait besoin d'un bain, d'un repas et d'une nuit de sommeil dans un véritable lit, fut-il d'une qualité moyenne dans une chambre d'auberge bon marché.
Les entrailles nouées, au bord de la paralysie, la jeune voyageuse s'approcha des portes. Les contrôles ne semblaient pas strict. La cité était en paix depuis longtemps. Mais les gardes refusaient le passage tant qu'ils ne voyaient pas le visage des passants.
Espérant passer inaperçue en passant sous la herse, Iris pressa le pas, capuche soigneusement baissée, tête basse.
« Halte! »
Le mot redouté fit s'arrêter la jeune fille, qui attendit que le garde la rejoigne.
« On montre son visage, la rouquine ! »
Iris serra les dents. Jamais, d'où elle venait on aurait osé l'apostropher de la sorte !
Mais c'est justement pourquoi tu es partie, non ?
La voyageuse refoula sa colère et sa peur. Alors que le soldat se plantait devant elle, son regard inquisiteur posé sur la jeune fille, celle-ci abaissa sa capuche d'une main tremblante.
S'il fut rebuté par son apparence, il ne le montra pas. Il l'observa attentivement et son regard s'arrêta aux points d'attention habituels : yeux rougeoyants, renflements suspects des lèvres. En terre humaine, la voyageuse n'échappait jamais à ces regards.
« Faites-vous recenser à la tour si vous restez plus d'une semaine. »
Et il retourna à son poste, sans autre commentaire.
La jeune fille ne se fit pas prier ! Soulagée au delà du possible, elle pressa à nouveau le pas et laissa derrière elle les portes de la Dinsérin.
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Banhréza
FantasyChassée de toute part, Iris parvient dans une ville qui accepte les êtres de sa nature. Exceptionnellement ouverte, la cité de Dinsérin lui semble tout d'abord un havre où, enfin, poser ses valises. Mais la cité est également terre d'intrigue et de...