Représentation de l'auteur en dehors de son temps d'écriture

L'auteur fictif 2

Il allume le feu sous la poêle, jette un peu d'huile d'olive et de thym, puis les légumes coupés en cube avec les oignons et l'ail écrasé. Le vieil homme place un couvercle pour laisser mijoter son plat à petit feu. Il retourne dans son salon prendre le journal et s'installe au soleil, sur sa terrasse, avec un café bien serré, laissant les premiers rayons estivaux réchauffer sa peau flétrie et le chant des cigales bercer sa lecture.

Quelques minutes passent, il a juste eu le temps de lire la page des sports quand l'interphone retentit. Avec douleur et difficulté, il se lève et va ouvrir la porte.

Derrière, son petit-fils qu'il attendait, l'air souriant, sort de l'école avec son gros sac sur le dos. « Coucou mon grand ! Entre et pose tes affaires sur la table. » L'enfant s'exécute et déballe ses cahiers dans le salon pour faire lire à son grand père ses derniers écrits.

L'un d'eux détonne avec le reste de ses textes d'habitude en proies d'un lyrisme et d'envolés poétiques des plus touchants. Il fait état de violence, de sang, de mort et d'assassinat de la liberté. Il est sans doute inspiré de ce qu'il a pu, lui aussi, voir au journal télévisé.

Pour ce vieux monsieur qui n'a connu que la douceur de l'après-guerre et est toujours resté en retrait de la vie politique, vivant une vie simple et ravie, ces mots n'ont pas de sens. La révolte qui semble vouloir s'en échapper n'a pas de fondement.

Mais quand bien même, c'est son petit-fils, son étoile, son sourire, et de toute manière, lui, il se sent dépassé par une époque où tout change et se bouleverse si vite. Sans un commentaire sur cette pensée, il l'encourage, fait étalage de louanges à son égard avant de lui demander de se laver les mains « fais vite, on va manger, je t'ai fait de la ratatouille pour midi ».