La mélodie de l'âme

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Je m'appelle Peter Atana et j'ai 18 ans. Je suis né avec un don particulier : je peux entendre la mélodie de l'âme. Chaque âme produit une musique propre à chacun ; cette musique reflète les émotions des êtres. Plus elle sera lente et calme, plus la personne sera triste. Plus elle sera joyeuse, plus la personne sera contente et plus la musique sera forte, plus l'individu sera en colère. J'aime écouter les mélodies des gens, en plus de refléter les émotions il arrive que la musique change quand mon interlocuteur évoque un souvenir avec un sentiment très intense. Chaque mélodie montre un paysage, ce qui me permet de mieux comprendre la personne qui est en face de moi ; je peux même parfois réussir à l'aider.

-Peter ?

-Oui, qu'est-ce qu'il y a Candice ? répondis-je un peu perdu.

-Ça va ? Tu as l'air dans la lune, me dit-elle.

-Désolé, je pensais à quelque chose.

Candice est ma meilleure amie. En plus d'être belle, intelligente et très gentille, la mélodie de son âme est douce. Elle me transporte vers une plaine remplie de fleurs de toutes les couleurs. Le ciel est orangé et il y a une légère brise chaude. Ce paysage évoque pour moi la fin d'une après-midi d'été. Je rêve de pouvoir sentir l'odeur de ces fleurs et la chaleur du soleil rasant les plantes. Ce don me vient de ma mère. Elle m'a fait promettre de n'en parler à personne, car certains pourraient l'utiliser à mauvais escient. Grâce à ce don, je peux également savoir si les gens me cachent la vérité : quand ils mentent leur mélodie change.

-Bon, je vais te laisser, au revoir Candice, dis-je en lui faisant un câlin.

-A demain !

Je partis vers ma maison, quand en passant à côté d'un couple, j'entendis une musique déformée, forte et terrifiante. Je me figeai et me retournai précipitamment pour voir d'où venait la mélodie, mais rien, il n'y avait personne. Je courus chez moi pour voir si tout allait bien. Ma mère était bien là. Je me mis à pleurer tant j'avais eu peur. Entre deux sanglots, je réussis à lui expliquer la situation.

-Tu es sûr que cette mélodie était déformée ? me demanda-t-elle.

-Oh, oui j'en suis sûr, répondis-je en balbutiant.

-D'accord. L'as-tu vue ? demanda-t-elle très inquiète.

-Non. Quand je me suis retourné, il avait disparu.

-Cette personne est mauvaise. Si jamais tu entends à nouveau la mélodie, fuis et préviens la police. me dit-elle en attrapant mes épaules.

-Maman, ça va ? questionnai-je.

-« C'est un meurtrier. Seuls ceux ayant commis un meurtre, ont une mélodie détraquée ». me rétorqua-t-elle en baissant les yeux.

Ma mère travaillait dans la police. Elle avait côtoyé de nombreux criminels. Elle savait quand ils mentaient, alors elle avait vite gravi les échelons. Je ne savais pas comment elle faisait pour affronter des personnes avec une mélodie déformée tous les jours. Je ne l'avais entendue qu'une fois et ça m'avait glacé le sang.

Les jours passèrent sans que j'entende de nouveau la mélodie. Je ne savais même pas si c'était celle d'un homme ou d'une femme. J'essayais d'y penser le moins possible, mais depuis ce jour, je faisais beaucoup de cauchemars, toujours avec cette personne. Je continuais à aller en cours, mais j'étais dans l'incapacité de me concentrer. Mon esprit me jouait des tours, j'avais l'impression d'entendre cette musique à chaque coin de couloir. Comme s'il était dans le lycée, mais c'était impossible.

-Peter ? Tu sais qu'on a une nouvelle professeure ? me demanda Candice.

-Non, je ne savais pas. Comment s'appelle-t-elle ? demandai-je à mon tour.

-Madame Harle ; c'est la remplaçante de notre professeur de SVT, répondit Candice toute contente.

Il est vrai que notre professeur de SVT n'était pas revenu en cours depuis que j'avais entendu la mélodie de cet individu. Est-ce que cela pourrait être lui ? Du fait de ses nombreuses absences, on ne l'avait quasiment jamais vu. De plus j'éprouvais constamment un sentiment de malaise quand on avait cours avec lui... Sans compter qu'à chaque fois qu'il disparaissait, un corps était trouvé. Il fallait que j'aille voir la police en sortant du lycée.

La journée passa sans accroc malgré ma hantise de voir notre professeur de SVT apparaitre. Il n'aurait pas pu savoir, que j'étais au courant. Mais quand bien même. Cela aurait était dur de cacher mon anxiété. Je me suis dépêché d'aller au poste de police sans même un regard pour mon amie visiblement très inquiète de mon comportement.

-« Une fois qu'il sera en prison, promis, je te raconterai tout. » murmurai-je à voix basse.

-« Peter ! Attends-moi ! » cria Candice en m'attrapant le bras.

-« Candice, lâche-moi s'il te plaît, je suis pressé » dis-je.

Je me montrai plus froid que je ne l'aurais voulu, mais elle me relâcha. À peine m'eût-elle laissé partir que je me mis à courir à en perdre haleine. J'arrivai assez vite au poste. Je dûs prendre une bonne dizaine de minutes pour retrouver mon souffle. Un inspecteur vint me voir et m'interrogea. Par chance, il connaissait notre secret car c'était l'ami d'enfance de ma mère. Il me dit qu'il le suspectait déjà depuis un moment, mais que grâce à moi, il pouvait maintenant l'arrêter à son domicile. Quelques jours plus tard, mon professeur de SVT monsieur Laland, fut interpelé. Le lycée nous laissa le choix de venir en cour ou d'assister au procès. Il dura trois mois, dont deux mois de délibérations.

Monsieur Laland n'émit jamais le moindre regret. Il dit même qu'il était très fier de ce qu'il avait fait à ces enfants. Il fut jugé pour viol, coups et blessures et homicides volontaires. Sur les quinze victimes, dix avaient été tuées. Le juge le condamna à quatre-vingt-cinq ans de prison ferme sans possibilité de liberté conditionnelle. Avant de quitter le tribunal, le condamné dit à toute l'assistance :

« Enfermez-moi si cela vous chante, mais cela n'arrêtera pas les meurtres. Ça ne fera que les renforcer. Ne venez pas pleurer si à cause de mon emprisonnement il y a bien plus de morts. »

Il avait déclaré cela avec un tel détachement et une telle froideur que cela fit taire toutes les personnes dans la salle d'audience. C'était étrange... Quelque chose clochait. Etait-ce parce qu'il mentait ? Je ne maîtrisais pas assez mon pouvoir pour en être sûr. Je devrai demander à ma mère pour confirmer mon intuition. Une fois rentrée, elle me dit qu'elle aussi avait ressenti une sorte de malaise ; quelque chose ne tournait pas rond. Une erreur de notre esprit, d'après elle. Ce n'était pas tous les jours que l'un de vos professeurs s'avérait être un meurtrier.

Deux semaines plus tard le lycée retrouva son calme. Tout se passait bien. Vint le jeudi, où nous avions SVT. Une sensation de malaise ne n'avait pas quitté un seul instant. Je me sentais observé, suivi par un prédateur. Candice avait été mise au courant de mon don. Elle avait vu que je n'allais pas bien. Je lui expliquai que j'avais un sentiment étrange. Plus les heures me rapprochaient du cours de SVT, plus j'avais peur. Cela me rendait malade. Quand je franchis le seuil de la porte, tout allait bien. Je pensais que j'avais juste peur de voir monsieur Laland debout devant le tableau, alors que c'était impossible. Je pris place au deuxième rang. Je perçus des bruits de pas, de talons et cette mélodie terrifiante, déformée, la même que j'avais entendue ce soir-là. Lentement, notre nouveau professeur entra. Je compris à cet instant la terrible erreur que j'avais faite. Je me sentis mal, car ce n'était pas fini...Le cauchemar ne faisait que commencer.

-Bonjour, je suis madame Harle votre nouveau professeur de SVT.

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