La guerre des Loups

Chapitre IV

Le jour de leur départ les deux camarades quittèrent la Gueule du Dragon à l'aube et prirent le chemin du Hall des Alaris. Le bâtiment était plongé dans les ombres mais la lumière naissante leur permit de voir un groupe de quatre Alaris les attendant en silence. Ceux-ci se mirent au garde à vous quand ils approchèrent d'eux et Kaen put alors voir leurs visages. Le premier d'entre eux était gigantesque. Il vit alors qu'il n'était pas humain, l'être qui se dressait devant lui était entièrement en pierre. Le golem faisait plus de deux mètres et avait été taillé pour ressembler à un homme immense à la musculature surdéveloppée. On lui avait ciselé un visage dur et sévère dépourvu de tout cheveux ou barbe. Ses yeux de pierre inexpressifs lui donnaient l'air étrange et hors du monde commun à tous les golems. Le mage qui l'avait créé l'avait représenté nu et asexué, ce qui était un choix assez inhabituel par rapport aux standards de création des mages humains. Kaen s'interrogea sur les raisons qui avaient poussé le général à leur donner l'homme de pierre comme compagnon. A côté de lui se tenait une jeune elfe au visage finement ciselé. Ses longs cheveux lui tombaient dans le bas du dos et ses yeux gris laissaient voir certains reflets indiquant qu'elle avait été initiée aux arts des arcanes. Contrairement à ses compagnons elle ne portait pas l'armure de l'ordre mais une tenue de tissu plus légère qui soulignait les formes de son corps svelte. Près d'elle se tenait un homme assez petit et large d'épaule au visage sec et dur. Son teint basané devait être dû à des années passées sous le soleil brulant du sud. Ses cheveux et sa barbe, tout deux coupés court, commençaient à devenir poivre-sel et ses yeux d'un vert pâle semblaient sonder l'âme de son interlocuteur. Le dernier membre du groupe appartenait à la race des hommes-lézards. Comme les autres représentants de sa race il était impossible pour un humain normal de distinguer s'il était de sexe masculin ou féminin avant d'entendre sa voix. Ses écailles étaient d'un vert oscillant entre le vert clair ou sombre selon les zones du corps. L'iris au centre de ces pupilles jaunes était fendu rappelant l'œil d'un serpent. Sa longue queue se balançait lentement dans son dos laissant transparaitre son calme. Quand les deux amis se tinrent en face d'eux ils se présentèrent chacun leur tour. La voix rauque et sifflante de l'homme lézard nommé Rakash l'identifia comme étant un mâle. L'homme parla avec voix basse et un fort accent des montagnes de Sera, une région frontalière au sud du royaume. Il se nommait Vaal. L'elfe répondait au nom d'Alana et avait une voix douce et les intonations chantantes caractéristiques de son peuple. A la grande surprise de Beleg le golem prit à son tour la parole avec une voix grave et grondante que son créateur ne lui avait pas donné de nom mais qu'il s'était nommé lui-même Omega. Kaen et Beleg se présentèrent à leur tour et après les avoir mis au courant de leur mission ils mirent le pied à l'étrier et quittèrent la grande cité en direction de l'est. 

Ils voyagèrent plusieurs jours pendant lesquels ils apprirent à se connaitre les uns les autres. Omega se révéla étonnamment doux et plein d'humanité. Il leur apprit que contrairement à la plupart des golems il disposait d'une âme. En effet le magicien qui lui avait donné la vie avait voulu transférer sa propre âme dans le corps de pierre afin de prolonger sa vie. Le rituel avait échoué et le géant s'était éveillé, détenteur d'une âme neuve devant le cadavre du vieux sorcier. Il avait compris les circonstances de son éveil en étudiant les livres qui se trouvaient dans l'antre où il était né. Il était inexplicablement né doué de la parole et sachant lire. Au cours des longues années qui s'étaient écoulées depuis il avait vu nombres de ses congénères démunis d'âme être envoyé au massacre et était donc conscient de sa chance incroyable et par conséquent il donnait un très grand prix à la vie et ne tuait que lorsqu'il en était obligé et ce même si sa force le rendait presque invincible. Il s'était d'ailleurs engagé au début de la guerre afin de sauver des vies grâce à cette force. Comme aucun cheval ne pouvait le porter il courrait à côté d'eux soutenant sans peine l'allure des chevaux. Malgré son apparence intemporelle cela faisait près de trois siècles qu'il arpentait Arolan et les royaumes avoisinants. Il aimait beaucoup raconter ses expériences passées et passait beaucoup de temps à discuter avec Vaal.