Hantise

Partie I : Les prémices

Lundi 1er octobre

Tout commença en août. Dans l'après-midi du 29, Anaïs Deslandes fut contactée par mail par Mme Louvois, sa professeure de français au collège et principale en 4e, classe où Anaïs avait officié en tant que déléguée. Sa démarche, outre le fait de prendre des nouvelles de son élève, visait à lui proposer un partenariat. Cette année-là, Mme Louvois désirait rendre ses cours plus vivants et interactifs en invitant des intervenants dont l'objectif serait d'animer certaines de ses leçons avec présentation et débat.

Dans cette optique, Mme Louvois avait fouillé assidûment Internet. Après avoir saisi le terme écrivain dans la barre de recherches, elle était tombée sur le blog d'Anaïs affiché parmi les premiers résultats. Sûre que son ex-élève lui serait d'un grand soutien de par son métier d'auteure publiée, elle la contacta immédiatement via le formulaire en ligne. Elle attendait d'elle qu'elle intervienne sur son cours concernant les genres et registres littéraires.

La mission d'Anaïs était de présenter les romans et nouvelles de fiction à travers son propre travail, et au-delà, aux cinq classes de 3e, en accord avec les autres professeurs de français intéressés par le projet. En échange, Anaïs avait l'autorisation de proposer aux élèves d'acheter ses livres. La documentaliste du CDI comptait aussi s'en procurer auprès d'elle.

Anaïs pensait surtout que Mme Louvois était ravie à l'idée de la revoir. En français notamment, elle était l'un des meilleurs éléments du collège et du lycée. En plus, elles discutaient souvent sur le sujet de la littérature et Mme Louvois lui conseillait d'excellents romans à ajouter à sa bibliothèque personnelle. Elle avait été aussi présente quand Anaïs s'était mise à rédiger ses premières œuvres écrites, dont une en particulier que Mme Louvois avait accepté de lire. Elle y avait relevé quelques fautes et donné son avis général.

Le temps qu'Anaïs prépare son petit exposé avec diaporama sur vidéoprojecteur, ce qui lui avait demandé quelques recherches, le premier cycle scolaire étant loin derrière elle, qu'ils préviennent les élèves, calent une semaine à raison d'une classe par jour, il fallut compter environ un mois de délai.

Avant cette semaine d'intervention, Anaïs était également allée rencontrer sur place le directeur, M. Chassagne, en présence de Mme Louvois qui organisait tout. Elle leur avait présenté les notes de son intervention. Il n'était bien sûr pas question d'induire les collégiens en erreur en leur communiquant des informations incorrectes. Cela aurait pu les pénaliser en cours ou dans leurs devoirs et contrôles. En outre, il était aussi important que sa petite conférence soit en mesure d'attirer leur attention pendant une heure environ. En fin de compte, son exposé leur plut beaucoup et ne comportait quasiment aucune incohérence. Mme Louvois était enchantée. Anaïs avait été particulièrement bien accueillie et présentée par sa guide à chaque membre du personnel croisé, y compris en salle des professeurs.

Elle n'avait constaté qu'un seul point négatif concernant la structure en elle-même – ce n'était pas le collège dans lequel elle allait en cours, Mme Louvois avait été mutée entre-temps : bien entretenu, mais vieux, façade austère avec une sorte de crépi noir, le même genre de revêtement mural à l'intérieur, côté bureaux, mais un ton plus clair, un carrelage à dalles foncées... En résumé, il n'avait rien de très rassurant. Cette architecture particulière lui donnait quand même un certain charme. Il s'agissait aussi d'un établissement d'enseignement catholique.