Acte III

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4 septembre, 20h

Bérénilde savait pertinemment qu'elle regretterait ses actes dès que les premières heures de la matinée seraient passées mais elle ne pouvait plus résister.

Pour une fois, rien que pour une fois, elle ne voulait plus de masques, plus de retenue, plus de secrets. Bérénilde ne voulait plus chercher une raison de faire ce qu'elle faisait ; elle voulait le faire, tout simplement.
Alors elle fit.

5 septembre, 6h

Leurs cheveux d'or formaient une auréole embrouillée autour de leurs têtes. Archibald regardait Bérénilde et Bérénilde contemplait Archibald. La transparence opérait entre eux avec douceur.

-Hmm. Je suppose que j'avais raison, donc.

Bérénilde contint de justesse le sourire exaspéré qui faillit franchir ses lèvres.

-Ce qui m'étonne, murmura-t-elle, c'est ce besoin de parler, ici et maintenant.

-Certes, nous pourrions faire autre chose.

En tant normal, Bérénilde aurait laissé échapper ce rire de la limpidité qu'elle avait tant travaillé, au fil des années. Elle fit tout autrement et, profitant de leur transparence, vint se blottir contre lui. Archibald avait beau n'avoir jamais été psychologiquement proche de ses conquêtes, il fit une entorse pour elle et la laissa se consoler contre lui.

Comme il emmelait doucement ses doigts dans ses cheveux, il chuchota à son oreille :

-Tout n'est pas perdu, Bérénilde. Allez donc le voir, je suis sûre qu'il aura déjà oublié pourquoi il vous en voulait.

-Le risque, commenta-t-elle avec amertume, c'est qu'il m'ait complètement oubliée...

-Farouk a beau avoir une mémoire désastreuse, il n'aurait pas oublié une telle chose. Et si c'était le cas, je peux vous assurer que je démissionnerai immédiatement de mes fonctions d'ambassadeur.

5 septembre, 8h

La Jetée Promenade était toujours aussi vide et pâle, quoique quelques illusions reprenaient faiblement leurs droits, teintant les murs crasseux d'un demi soleil ou d'une plage sans océan au bout. Bérénilde entra dans l'antichambre, puis dans la chambre de Farouk, sans que le garde ne lui en refuse l'entrée. Tout semblait fidèle aux habitudes.

Sauf cet homme -si c'était un homme-, dont les deux mètres de hauteur et quasiemt autant de cheveux, s'étalaient sur le grand lit du centre de la pièce.
L'esprit de famille ne leva même pas les yeux sur elle. Bérénilde eut beau se racler la gorge plusieurs fois, elle n'eut pas le droit à un regard. Rien que cette phrase, désespérément désarmante.

-Je vous attendais.

Sa voix n'avait eu aucune inflexion de colère, ni de souffrance, ni même de gentillesse. Elle avait juste sonné très très vide.

-En fait, je vous attend depuis que vous êtes partie hier soir. Pour être franc, je pensais que vous seriez revenue presque immédiatement après avoir quitté mon antichambre.

Il avait dit ''mon antichambre'' en insistant beaucoup sur son appartenance, comme s'il s'était agi d'un trésor précieux ou d'un lieu particulièrement intime ou accèder relevait d'une certaine chance.

Elle hésita pendant ce qui devait être une fraction de seconde, durant lesquelles mille hypothèses et sensations de confondirent dans son esprit. Elle luttait entre l'envie contradictoire de se blottir contre lui et de partir très loin.

-Mon seigneur...

-Ce qui m'étonne, murmura-t-il, c'est que vous ayez encore des mots à dire alors même que vous savez pertinemment pourquoi je vous attendais.

Bérénilde fut quelque peu perplexe après ces mots, si semblables à ceux qu'elle avait dit à Archibald un peu plus tôt. Elle les comprit néanmoins avec beaucoup de profondeur quand Farouk l'accueillit contre lui, étouffant toutes ses excuses et tous leurs différends.

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⏰ Dernière mise à jour : Feb 21, 2022 ⏰

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