1. La rencontre des détectives

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   La nuit venait de tomber sur l'immense ville de Tokyo, capitale du petit pays insulaire qu'est le Japon. Les petits magasins étaient fermés depuis belle lurette et les lampadaires s'allumaient petit à petit dans les rues, éclairant le bitume sur lequel roulaient quelques voitures. Le calme et le silence commençaient à régner dans les quartiers éloignés des endroits très fréquentés que le monde entier connaît. Pourtant, deux préfectures plus loin, le vrombissement et les crissements de pneus d'une voiture se faisaient entendre dans tout le col de Raiha, à Gunma. Tel un spectre blanc, une Toyota Sprinter Trueno AE 86 modèle panda dévalait le col à une vitesse démesurée. Quiconque aurait vu cela, en sachant que cette voiture était un vieux modèle de la fin des années quatre-vingts, aurait cru rêver. Elle dérapait avec une telle aisance que l'on aurait dit qu'elle ne freinait jamais, tandis qu'elle frôlait avec grâce le garde-fou.

   Les mains sur le volant se trouvait Hojô Johnny, manipulant ce dernier avec légèreté, jaugeant le frein avec minutie et maniant le levier de vitesse avec rapidité. Ce jeune homme de vingt-et-un ans était un détective privé. Il commençait à se faire connaître dans le 4ème et le 5ème district de Tokyo, la capitale. Il était même apparu quelques fois dans les journaux locaux pour avoir aidé la police dans certaines affaires.

   Il était grand, mesurant un mètre septante-huit, et pouvait facilement se faire passer pour un adolescent avec sa mince carrure. Ces yeux étaient d'un bleu ciel profond, ces sourcils noirs étaient assez épais et ses longs cheveux bruns, tombant sur son dos juste en dessous de ses omoplates, bouclaient par endroits. Il portait un costard noir, contrasté par sa chemise blanche ainsi que d'une cravate rouge. Ses chaussures noires, des mocassins, complétaient naturellement sa tenue.

   Cela faisait environ deux bons mois qu'il était arrivé au Japon et qu'il avait ouvert son bureau de détective privé. Naturellement, les premiers jours ne furent pas des plus palpitants. Mais les enquêtes commençaient à se présenter à lui de plus en plus fréquemment depuis trois semaines. Et, comble de bonheur, il avait enfin reçu sa toute première requête de la part d'un client. Auparavant, il n'avait fait que tomber sur des scènes de crimes par hasard, tandis qu'il visitait la ville.

   Pourtant, Hojô ne semblait pas enthousiaste de cette bonne nouvelle. Dans l'obscurité, il conduisait avec un air grave sur le visage. Son client, il ne l'avait jamais vu. Il ne lui avait pas non plus parlé au téléphone. Seule une lettre lui était parvenue, deux jours auparavant. Il ne se ferait en temps normal aucun soucis, l'ignorant tout simplement, si celle-ci n'était pas des plus inquiétantes:

   "Cher monsieur Hojô,

   Je vous prie tout d'abord de recevoir toutes mes félicitations. Bien que vous ne soyez arrivé au Japon que depuis quelques temps, vous vous êtes déjà fait une petite réputation dans la capitale. Je me dois d'avouer que je suis l'un de vos plus grands fans. Quelle fut ma surprise lorsque j'appris votre présence dans mon pays natal. Je vous suis depuis votre toute première affaire ici et quel plaisir de pouvoir être témoin de votre intellect quand vous exposez vos déductions aux forces de l'ordre. C'est pour cela que j'ai choisi de faire appel à vous. Dans deux jours se déroulera une série de meurtres dans un manoir perdu dans les montagnes de Gunma. Votre mission, en tant que défenseur de la justice, sera de faire tout votre possible pour arrêter le coupable afin de minimiser le nombre de victimes. Ne vous en faîtes pas, vous ne serez pas seul. Deux autres détectives aussi talentueux que vous seront présents eux aussi. J'espère de tout cœur que vous vous entendrez bien et que vous saurez coopérer. Une carte accompagne ce message, elle vous indiquera l'emplacement du manoir et l'heure à laquelle vous devrez vous trouver sur place.

   Je préfère vous prévenir, monsieur Hôjô. Une absence de votre part signifiera la mort de toutes les personnes se trouvant au manoir. Il serait préférable pour un détective tel que vous qu'aucune personne ne meurt par votre faute.

Matricule 81452002 Le manoir de l'isolementOù les histoires vivent. Découvrez maintenant