3- Sybille

190 39 2
                                    

Je ne suis pas du matin

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou mettre en ligne une autre image.

Je ne suis pas du matin. Tel un oiseau de nuit, je préfère rester cachée la journée et m'éveiller dans la pénombre crépusculaire. Je prends alors mon envol et me laisse guider par les faibles lueurs de cet astre nocturne qui éclaire la voûte céleste. Tapie dans l'ombre, je reste à l'affût de la moindre étincelle venant perturber la quiétude de ma vie. Et je m'adapte. L'adaptation est le secret de ma survie.

Une étincelle, vive, lumineuse, furtive mais éclatante, a jailli lorsque mon téléphone a sonné à trois heures du matin. Plus précisément, au moment où j'ai lu le nom affiché sur l'écran digital. Une fusée de détresse illuminant les ténèbres depuis mon océan de sérénité, mettant tous mes sens en alerte. Ma matinée n'en est que plus difficile encore. Après avoir été réveillée par l'autre connard, je n'ai pas réussi à me rendormir. Depuis que sa voix a fusé de mon haut-parleur, mon cœur tachycardise à chaque évènement imprévu. Une porte qui claque, ma voisine qui m'interpelle dans le couloir, le tram qui s'arrête en plein milieu des voies, un passager qui trébuche sur moi au démarrage, une bourrasque de vent, la sonnerie de mon téléphone qui retentit pour me signaler l'arrivée d'un nouveau message. Je suis une boule de stress, en manque de sommeil, qui sursaute à chaque fois qu'une nouvelle personne s'adresse à moi ou me frôle d'un peu trop près.

La douche brûlante, sous laquelle je suis restée jusqu'à ce que l'eau tiédisse, m'a fait du bien sur le moment. L'espace d'un instant, le jet d'eau martelant mon dos a réussi à délier les tensions qui s'y étaient accumulées. Mais, alors que les minutes passaient inlassablement, de nouvelles interrogations sont venues encombrer mon esprit. Mon passé et mon présent s'entremêlaient sans que je ne réussisse à distinguer la réalité de mon imaginaire. L'inconnu de ce qui m'attend aujourd'hui a emplit ma tête d'appréhension et de questionnement. Un autre stress a pris possession de mes entrailles, mais je sais comment l'appréhender. Il me suffit de plonger tête baissée dans mon travail et de donner le meilleur de moi-même. Rien ni personne ne pourra se mettre en travers de ce stage et de ma réussite.

Deux arrêts avant ma destination, je commence à jouer des coudes dans la rame bondée, si je veux une chance d'atteindre la sortie avant que les portes ne se referment sur moi. Prendre les transports en commun, à huit heures un lundi, relève de l'exploit. Ou de la folie ! Une chance que je ne sois pas ochlophobe. Même si ce n'est jamais agréable de se retrouver collée à un torse flasque et très odorant — d'autant plus un lundi matin — je m'en sors relativement sans difficultés, malgré ma petite taille, dans ce parcours du combattant. J'arrive devant les portes au moment où le tram entame sa décélération pour ma station. Le vent s'engouffre dans l'habitacle lorsque l'ouverture automatique libère le passage. Je m'élance alors au dehors et m'engage en direction de mon lieu de stage.

A peine arrivée devant ce bâtiment, où je vivrai la majeure partie de mon temps pour les six prochains mois, je suis prise dans un tourbillon de consignes. Un géant de plus de deux mètres me saute dessus pour que je confirme mon identité. Il me passe un badge STAGIAIRE autour du cou et me pousse vers un petit groupe de personnes qui ont l'air tout aussi perdues que moi.

Black MoonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant