“Il n’y a que les ennemis qui se disent la vérité ; les amis et les amants mentent sans cesse, pris au piège dans la toile du devoir.” a dit Stephen King.
J’essaie de me persuader du contraire depuis que j’ai douze ans. Cette année-là a changé ma vie.
Les adultes tentent toujours de nous persuader que nous pouvons nous confier à eux. Les hommes sont pareils. Ils te font croire que ce n’est qu’un jeu, que ce que nous faisons est tout à fait normal. Ce n’est pas le cas, et je l’ai compris trop tard.
Stephen King a aussi dit “Le temps efface tout, et à la fin, il ne reste que les ténèbres.”
“Un homme qui hurle est un homme qui a perdu le contrôle.”, c’est le même auteur qui l’a dit.
Je l’ai compris l’année de mes seize ans, lorsque pour la première fois, j’ai hurlé avec mon frère. Je ne parlais pas beaucoup, étant plus jeune. Les mots s’emmêlaient sur le bout de ma langue, sans jamais trouver la sortie. Peut-être était-ce l’effet des banalités que l’on me balançait, du style “Putain, réfléchit avant d’ouvrir ta gueule Evy.” “Tout ce qui sort de ta bouche, c’est de la merde.”
Mon premier copain m’a dit ça, une fois. J’allais sur mes dix-huit ans, et c’est Gale qui a dû sécher mes premières larmes. Je n’ai plus jamais pleuré pour un homme devant lui après cet évènement. La honte d’avoir franchi une règle me nouait le ventre à cette époque.
Règle numéro quatre : Ne jamais montrer ses émotions.
Je t’emmerde, papa.
Lorsque j’étais petite, nous nous asseyons à même le sol dans une pièce dépourvue de meubles. Il n’y avait qu’une fenêtre, petite, avec des barreaux. Il nous y enfermait pour nous punir d’une quelconque bêtise. Caleb était claustrophobe à cause d’un traumatisme qu’il a vécu suite à un évènement qui remonte à quinze ans, maintenant. Alors je prenais la responsabilité de ses erreurs enfantines à chaque fois pour que plus jamais il n’ait à subir une telle souffrance. Je n’ai jamais regretté ces actes, et jamais je ne lui en voudrais. Nous n’étions que des enfants.
Règle numéro cinq : toujours rester immobile dans le donjon du pêcheur.
Papa l’appelait ainsi parce qu’à ses yeux, nous n’étions que des pêcheurs. Je ne pense pas être une mauvaise personne, mais comment croire au contraire lorsqu’à votre plus jeune âge, vous n’êtes qualifié qu’ainsi ? Je n’ai jamais trouvé la réponse, et j’ai d’ailleurs cessé de chercher. Je ne suis que ce que les autres veulent que je sois, n’est-ce pas ?
Pathétique.
Je suis pathétique.
Il est trois heures du matin lorsque je me glisse sous le pommeau de la douche. L’eau qui entre en contact avec ma peau est brûlante, mais j’ai cessé d’y faire attention. Elle ne me cause même plus assez de douleur pour qualifier ça d’échappatoire à la souffrance mentale. Mes mains rencontrent la vitre couverte de buée, et je me penche en avant, les larmes aux yeux. J’assume pleurer sous la douche parce que personne ne peut voir mes larmes et je ne peux les sentir rouler sur mes joues. Mes cheveux trempés pendent de part et d’autre de mon visage et collent à mon dos nu.
Pleurer me rend faible, je suis bien d’accord sur ce point, Papa.
Le sommeil ne me vient pas et j’ai beau être exténuée, rien n’y fait. Les jours s’enchaînent sans que rien ne se produise. Megan a disparu de la circulation, tout comme Gale, et je dois avouer que la situation me fait rire. Vous connaissez ce rire nerveux ? Celui qui vous prend aux tripes lorsque plus rien ne va. Il faut croire qu’ils se sont donnés les mots pour m’abandonner un par un. Mais je n’ai pas le droit de leur en vouloir. Ils n’ont pas à rester collés à moi et je ne peux m’accrocher à eux comme si ma vie en dépendait, parce que ce n’est pas le cas. Je suis le genre de personne qui peut très bien vivre dans la solitude sans jamais chercher la présence de quelqu’un d’autre. Même si cette présence rassurerait mon cœur meurtri au fil des ans.
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ATLANTIS.
RandomTic. Tac. Les aiguilles de la pendules tournent sans s'arrêter. Vivre dans un monde dépourvu d'humanité est une chose bien difficile. Mais y survivre l'est encore plus. Alors qu'elle pensait avoir tout perdu, les fantômes du passé refont surface...