La lavande fleurit entre juin et août. Les fleurs violettes ont souvent une odeur douce et peuvent, comme je l'ai appris dans mon enfance, venir en aide contre l'insomnie. Elles ont aussi un effet calmant. En France, la lavande est souvent trouvée en Provence, il y a d'immenses terres couvertes de lavande, qui toujours éveillent en moi de nombreux souvenirs, chaque fois que j'y passe.
C'était août 1943. Je l'ai rencontrée sur les champs de lavande. Elle, une jeune femme française, moi, jeune soldat allemand de 23 ans, stationné en Provence dans la Deuxième Guerre Mondiale. Je parlais français, je l'avais appris à l'école pour quelques ans. C'est pourquoi le déploiement en France me convenait bien. J'ai été envoyé en Provence avant que les troupes allemandes aient envahi la France. C'est pourquoi notre ordre était de ne pas se faire remarquer. Avec mon français pas parfait, ne pas se faire remarquer était relativement difficile, donc je ne sortais pas beaucoup et restait dans le logement mis à disposition aux soldats. Pour chasser les horribles images de guerre dans ma tête qui me persécutaient dans mes rêves, je me suis quand même décidé à me promener des temps en temps à travers les magnifiques paysages et je marchais dans les Hautes-Alpes et près de la Barre des Écrins.
En passant par champs un soir, sentant l'odeur de la lavande soufflée par le vent frivole, j'ai vu un corps délicat. La lavande frissonnait à la direction du vent, qui faisait onduler aussi doucement sa robe d'été, blanche comme les nuages qui suivaient le soleil au crépuscule. Elle était couchée là, sur un des petits sentiers entre les fleurs violettes, et semblait dormir. Ses longues boucles d'or, environnant sa tête comme une couronne, donnaient l'impression d'un ange, tombé sur terre pour nous sauver de cette guerre affreuse. Ces joues roses, ce petit nez, ces lèvres bien dessinées. « Elle est merveilleuse », je pensais, incapable de détourner mon regard d'elle. Il y avait à côté de sa tête une corbeille avec de la lavande cueillie. Soudain, elle a ouvert ses yeux. C'était comme si je regardais le ciel. Ses yeux étaient plus bleus que le ciel d'été au-dessus de nous, plus bleus que l'eau de l'océan. Il me semblait que je voyais une histoire dans ses yeux, un passé, un avenir. Des émotions infinies me traversaient alors qu'elle me regardait avec un regard confus. J'ai voulu reculer d'un pas, mais j'ai trébuché dans mon excitation et suis tombé dans la lavande. Et, pour la première fois, j'ai entendu sa voix. Elle rigola et me demanda si tout allait bien. « Oui », bégayais-je, en prenant sa main tendue. De l'autre main, elle s'est mis une boucle de cheveux derrière son oreille et me fit un sourire.
« Vous ne vous êtes pas blessé, non ? » « Non, je vais bien. Comment allez-vous ? » Je me suis comporté comme un idiot. « Je vais bien, merci. Je m'appelle Camille, et vous ? » De nouveau, elle me tendit la main. Sans la regarder directement dans les yeux, je lui ai dit mon nom. « Enchantée, Levin ! » J'ai senti mes joues se réchauffer. Après avoir marché un peu, elle me demanda : « Levin, », la façon qu'elle dit mon nom était comme de la musique à mes oreilles, « vous ne venez pas d'ici ? » De peur qu'elle me haïsse, j'ai caché un petit détail.
« Honnêtement, je viens d'Allemagne. » J'ai continué de lui raconter un peu de moi, sans lui dire que j'étais soldat.
« Mais, vous n'êtes pas un de ces nazis ? » Elle me regardait, en attendant ma réponse attentivement. « Non, pas du tout. Je ne comprends pas ces idées nazies. Pourquoi tuer tant de personnes innocentes ?»
Nous continuions à parler de différents sujets jusqu'à ce que l'obscurité arrive.Ça ne me dérangeait jamais qu'elle était juive. Camille aussi n'avait aucun problème avec le fait que j'étais allemand. Nous parlions peu de nos origines, de la guerre. Quand nous étions ensemble, quand je la regardais et elle me regardait, il n'y avait que Camille et Levin, deux âmes innocentes, deux des nombreux prisonniers d'un monde injuste et gris. La seule chose qui donnait de la couleur à notre monde incolore et déséquilibré était les quelques moments limités et réels, où nous nous rencontrions secrètement, nous parlions, nous nous aimions comme si c'était la dernière fois qu'on pouvait se serrer dans les bras.
VOUS LISEZ
La fille sur les champs de lavande
RomanceUne histoire courte de la Deuxième Guerre Mondiale, jouant en France. Un amour pratiquement interdit, plein d'obstacles. Mais malgré toutes les tentatives, le destin a d'autres plans pour Camille et Levin. Salut! J'espère que mon histoire vous plai...