Prologue d'une tragédie perdue

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L'amant de Sylla a disparu. Elle est partie derrière lui ; elle s'est enfuie, négligeant tout. La nuit tombe. Elle s'arrête devant le terme de Dionysos phallique, autel déserté. Il faut qu'un bon génie l'entende.


J'irais encor de nuit, que mon corps le permît ;

Mais Morphée m'attire, gagne sur mon ami.

Aux Dieux on obéit, et les hommes attendent

Pour leur service que soient rendues les offrandes

À ce plus grand parti qui recueille nos vœux.

Depuis l'aube je cours après ce que je veux.

Mais le doute m'emplit ! Alors l'âme était sûre...

Maintenant elle s'effraie ! Et j'hume une rumeur sure

Qu'a laissée ma folie ; las ! elle m'a transie d'heur

Et honteuse serai si à l'instant ne meurs.

Que partais-je d'ennui ! Mes jours s'enroulaient, tendres

Et ignorants des feux, je m'ébattais, tout prendre

Se pouvait adoncques ; ma patrie m'agonit

Ce soir d'amers reproches, sis au foyer bruni

Nul ne s'inquiète plus, Mère même renie.

Là-bas, plus donc d'alliés, que la cire jaunie,

Empreinte de ces mots que l'ami me dédiait.

Hier je le trouvai à l'heure où irradiait

Comme sûrement demain, d'Hélius la claire cime.

Avant, je dormirai, car mes forces s'éliment.


Le ciel glisse dans l'ombre des ténèbres. Sylla s'allonge dans la mousse.

Quelques amoursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant