Arrivée

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Mars 1926


J'etais quelquepart. Pas ici.


Son d'un sifflethurlant, fracas mecanique de l'arret du train, il etait arrive garede Lille. Un pied, un pas, le voila plonge dans sa ville d'enfance.Cette ville qu'il avait quitte brutalement en entendant l'appel de laguerre, qu'il avait renonce pour vivre a Paris les tumultes du centredu monde. Paris! Paris, possible envolee vers un autre destin quecelui legue par sa famille, pour finalement retourner en haut de sonpays. Deuxieme pas. Maintenant il devait retrouver le chemin du foyerfamilial. Sac jete sur l'epaule contenant quelques vetements, unlivre offert avec les doux mots d'un etre aime et ses pauvresrecoltes de la vie parisienne, il traversait la ville sans jeter unoeil aux echauffadages et nouveaux batiments de l'apres guerre. Ilavait vu la reconstruction de Paris pendant plus de huit ans, celafaisait parti de son paysage quotidien. Bruit des enjambes sur lepave, bruits des sabots ferrés, bruits de la rue, hurlementd'enfants s'echappant des mains de leurs parents.

Gerard s'arreta devantl'immeuble. Une porte, des murs vieillis, plus sombres, plus sales,contrastant avec le ciel clair sans nuage. Un frisson lui parcourutl'echine, sa crispation lui indiquait que l'image du batimentsemblait erronee. Ce n'etait pas seulement l'inquietude de voir lepassage du temps, non, quelque chose n'allait pas. Il vit s'ouvrirune fenetre du second etage, son etage, la tete d'une jeune inconnueen sortit. Ses parents n'habitaient plus ici. Depuis combien de tempsetaient-il partis? Les nouveaux locataires savaient-ils ou etaitpartis les anciens? Alors qu'il s'appretait a grimper les etages pourrencontrer les nouveaux habitants, quelqu'un l'appela derriere luid'une voix etouffée, temoignant d'une sideration. Il se retournarapidement, et vit un jeune cure vetu de sa traditionnelle robe noireetouffante. Le cure de l'eglise Saint-André de Lille. Albert.C'etait donc ca le choix de vie d'Albert.

"Gerard, toi... vousici?

- Monsieur le cure, mesrespects... Ravi de vous revoir.

- Depuis quandetes-vous la?

- Depuis une heure toutau plus. Je viens de la capitale.

- La capitale...

Le cure hesitait achoisir ses mots, ses questions. Il gardait ses bras ballants, lelong de ses cotes, son corps semblait en trop. Gerard ne rencontraque furtivement son regard, l'homme de l'eglise paraissait vouloirfuir l'echange tout en la maintenant de sa faible voix et de sonsilence evocateur. Une seconde discussion faite de non-dit et deposture se jouait entre les deux hommes ; tout spectateur de cettescene temoignerait de la gene et du manque de justesse.

"Dis-moi, monsieur lecure, savez-vous ou logent mes parents?

-Oh... Oui nous sommes devant leur ancien logement. Maintenant ilshabitent au cite-jardin de Lille-La Délivrance.

- Pardon ?

- Deslogements batis pour les cheminots par la Compagnie. Reprenez lechemin de la gare, un train vous y amenera... Vos parents habitentpres de l'ecole pastorale. Vous les trouverez facilement, leur jardinest magnifique.

- Tres bien... Mercimonsieur le cure. A bientot certainement.

- Oh.. Legrand..Comptez-vous rester ici quelques temps parmi nous ou est-ce seulementune visite aupres de vos anciens?

- Je n'ai pas encore dereponse. Cela dependra de bien de choses. Bonne journee.

- Oui. Que Dieu vousbenisse."

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⏰ Dernière mise à jour : May 23, 2022 ⏰

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