Chapitre 1

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Tu adorais l'eau.

Tu aimais la sensation de fraicheur sur ta peau mâte. Et j'aimais tellement voir tes cheveux blonds constament en bataille se fonçer et te coller au visage.
Je te trouvais si beau, quand tu souriais en sautant par dessus les vagues.
C'était ton jeu quotidien, et je te disais pour rire que si tu touchais une des vagues que tu étais sensé éviter tu devais m'embrasser. Et tu l'as fait, une centaine de fois, parce que tu mourais d'envie que nos lèvres se rencontrent, tout comme moi.

Ton jeu est devenu mon jeu, notre jeu.

Je n'oublierais jamais ces bulles que j'ai vu disparaitre.
Je ne parle pas de cette bulle dans laquelle nous étions constamment, rien que nous deux.
Je parle de ces bulles qui devaient te maintenir en vie, me prouvant que tu t'amusais juste sous l'eau. Mais tu ne t'amusais pas. Et je m'en veux d'avoir rigolé en pensant que tu faisais exprès de te noyer. Tu te noyais vraiment.

Quand j'ai sauté à l'eau pour te rejoindre, il était déjà trop tard. Ton corps pâle remontait à la surface. Tu flottais, la tête immergée sous l'eau. Je t'ai pris dans mes bras et j'ai posé mes mains sur ton visage, froid, inexpressif.

Tu ne riais plus comme tu riais cette après midi.

Tu ne riras plus.

Mes larmes se mélangeaient avec l'eau trouble dans laquelle nous flottions. Je criais intèrieurement, tellement fort que j'aurais cru pouvoir faire exploser mon coeur, dont il ne restait plus que des morceaux ensanglantés.

Personne n'est venu te sauver, pas même moi.

J'en fais des cauchemars.
Je me noie, et je ne peux pas remonter à la surface, car le poids de ton corps sur mes épaules m'empêchent de faire ne serait-ce qu'un mouvement. Alors je me laisse couler, sûrement pour te rejoindre. Et je me réveille en hurlant, sentant l'eau s'engouffrer dans ma gorge comme elle a dû le faire avec toi.

Mais ce n'est pas vrai, c'est un cauchemar pas la réalité.

Alors ce cauchemar recommence jusqu'à ce que j'arrête de dormir.
Jusqu'à ce que mes yeux soient mangés par les cernes.
Jusqu'à ce que je n'en puisse plus.
Jusqu'à ce que mes journées deviennent un obstacle infranchissable.
Jusqu'à ce que les remarques m'accusant de ta mort ne fassent qu'agrandir le vide en moi.
Jusqu'à ce que je devienne la personne que je ne voulais surtout pas devenir.
Jusqu'à ce que je me retrouve seul, sans rien, sans toi.
Jusqu'à ce que j'en finnisse finalement par moi-même.

All the waters are the color of drowningOù les histoires vivent. Découvrez maintenant