The Shadows near me

Chapitre I

Ma famille et moi étions au gala des Lowell, où la fête battait son plein. Mon père parlait affaire avec le père Lowell, ma mère racontait des ragots à sa femme Eleanor en enchaînant les verres, tandis que je dansais avec Louisa et Stella en sirotant une coupe de champagne. J'ai toujours aimé faire la fête, et mes amies savaient rendre des galas ennuyeux très intéressants. Celui-ci était en l'honneur du contrat que Victoire Lowell, le père de Stella, venait de signer avec le mien ; c'est comme si nos familles ne faisaient qu'un maintenant, soudées par ce contrat. Au loin, j'aperçus Liam, en train d'accompagner sa petite sœur au buffet. « Il est très mignon », pensais-je en mon fort intérieur. Stella suivit mon regard et compris ce qui se tramait.
« -Va lui parler », dit-elle entre deux gorgées.
-Je ne vois pas pourquoi j'irais, dis-je timidement, je n'ai aucune raison d'aller le voir.
-Tu vois, Luna, c'est ça ton problème. Il faut savoir prendre les devants, avec les types comme lui. Allez, tu n'as rien à perdre ! Et tu es tellement jolie dans cette robe ! Il serait fou de te laisser passer. »
Elle a raison, j'ai mis des heures à me préparer pour ce gala en sachant qu'il serait là. J'avais soigneusement préparé ma tenue, une belle robe nacrée, que j'avais accordée avec un collier de perles et des boucles d'oreille assorties. Mes cheveux tombaient en cascade jusqu'à ma taille soulignée par la robe mordorée. Je me sentais.. divine.
« -Je n'ai rien à perdre avec lui, tu as raison ! Woah, le champagne doit me faire beaucoup d'effet. Je vais l'inviter à danser !
-Ah ! là, je te reconnais bien, Luna. Je t'attendrai ici, dit-elle, souriante. »
Et sur ces mots, je m'élança vers Liam, sans réfléchir. Il faut dire que j'avais bien trop profité du champagne pour faire marcher mes méninges, et Stella était très généreuse, et une très bonne hôtesse. Mais je m'en fichais ; j'avais bien trop pensé à ce moment. Et alors, je le vis ; ses yeux rieurs, ses fossettes adorables quand il sourit, son regard chaud et aimant. Confiante, je décida de l'inviter à danser, quand un slow commença. J'étais morte de honte, comme si j'avais prévu le coup. Mais Liam me sourit simplement, prend ma main, et m'emmène sur la piste de danse. C'était... irréel. Il se rapproche de moi, et pose une main hésitante au niveau de ma taille, et commence à rougir, faisant battre mon cœur nettement plus rapidement. Son autre main vient s'enrouler autour de ma taille, brûlant ma peau par la même occasion. Quelque part, cela me rassurait de voir qu'il était aussi timide et hésitant que moi. Peut-être que Stella avait raison, et que j'avais une chance avec lui ! L'air se faisait rare dans la pièce et la température grimpa de 10°C. J'avais tout ce que j'ai toujours désiré... Voilà déjà 6 mois que Liam avait intégré notre classe, mais jamais je n'avais trouvé la force de lui parler, étant assez timide de nature. Non pas que je n'ai pas confiance en moi ; simplement, je suis d'un naturel réservé, et vais rarement vers les gens, ayant plutôt tendance à rester dans mon coin, pensive, attendant qu'ils viennent à moi. Je bouillonnais quand la musique s'arrêta. Du coin de l'œil, je vis Stella, le pouce en l'air, me fixant à l'autre bout de la réception. Mais un sentiment de déception monta en moi, alors que le danse se terminait. Puis Liam se pencha vers moi, et me murmura à l'oreille :
« -Je veux une autre danse avec toi. Une seule, ce n'est pas assez. Puis-je.. »
Il n'eut pas le temps de finir sa phrase que je mis mes bras autour de son cou, l'entraînant dans un nouveau rythme. C'était peut-être l'alcool qui parlait, mais il me prodiguait tellement d'assurance, jamais je n'aurais été aussi entreprenante en temps normal. La fête battait son plein, les danses avec Liam s'enchaînaient, alors que je me découvrais plus confiante que jamais. Stella et Louisa nous rejoignirent dans le but de danser jusqu'au bout de la nuit, riant aux éclats, sans se soucier du lendemain.
Ce soir là semblait.. magique. Irréel. Le rêve de mes parents, mes amies, Liam... tout était si parfait. Jusqu'à ce qu'elle n'arrive. Celle qui a tout gâché, qui a mis fin au règne de mes parents. Celle qui a bafoué ma famille en sacrifiant mes parents sur l'autel de la fortune et de la notoriété.
Annabelle.
L'assistante de mon père.
Au moment de prononcer un discours de remerciement, mon père se vit voler la vedette par cette vipère en quête de célébrité. Elle monta sur l'estrade et lui attrapa le micro des mains. La tension était à son comble, on n'entendait pas un bruit dans la pièce, comme si tout le monde retenait son souffle. Elle prit alors la parole :
« Mesdames et messieurs, bonsoir. Je suis sûre que vous connaissez tous Paul Astrophel ici présent. Oh, je peux même voir sa ravissante femme et sa fille de là où je suis ! Vivien. Bonsoir, Luna. Quel beau monde ! Oh, j'en oublie mes bonnes manières ; je suis Annabelle Cooper, l'assistante personnelle de Monsieur Astrophel. Mais je suis bien plus que cela, vous savez, dit-elle amèrement. J'ai également été son amante. »
Le silence laissa alors place à des murmures choqués provenant des quatre coins de la pièce. Mais sa maîtresse était loin d'en avoir fini avec lui :
« Silence, je vous prie ; je suis loin d'en avoir fini avec vous, Paul. Vous savez très bien ce que je m'apprête à dire. Et à votre place, je ne tenterai pas de faire le moindre mouvement pour m'en empêcher. Non seulement assistante, mais amante de Paul Astrophel, je peux vous assurer que je connais pas mal de choses à son propos, comme le fait que, contrairement à ce qu'il vous pousse à croire, il n'a rien du loyal, de l'honnête homme auquel vous semblez tous faire confiance. Il vous mène en bateau depuis le début, vous et les fonds que vous lui accordez, qu'il détourne dès que vous avez le dos tourné, dans l'unique but de s'enrichir sur votre dos. Cela fait maintenant des années qu'il blanchit de l'argent sous vos yeux. Et vous, aveuglés par la confiance que vous avez en lui, ne vous êtes rendus compte de rien. Vous n'êtes rien d'autre que des sots. »
Et soudain, ce fut la cohue. Ma mère se précipita en dehors de la salle, et je lui emboîta le pas. Je ne cessais de penser au mal que son petit speech allait produire, et aux répercussions que cela aurait sur ma famille. Sur notre vie. Dans le couloir, j'entendais encore la voix nasillarde de cette cruche attirer l'attention sur elle. Je ne savais pas à qui j'en voulais le plus ; à mon père, ou à sa maîtresse ? Je ne savais plus ou donner de la tête. Comme toute jeune fille, mon père était mon héros, une figure de bienveillance, de stabilité et de réussite, comme un roc dans une tempête auquel l'on s'accroche. Il représentait les seules choses qui ne me paraissaient pas fausses, il n'avait pas recours à des moyens frauduleux dans le but de gagner de l'argent. Il était franc, fort, vrai ; et c'est ce qui plaisait aux gens, et les inspirait à faire de même. Mais ce soir là, je découvris un homme lâche, infidèle, malhonnête, et criminel, qui avait sali son image pour des plaisirs éphémères. Voilà comment une affaire de famille se transforme en affaire publique.