Rat de guerre.

Lettre 1

Le premier jour.

Mes parents m'ont nommé Célestin, Célestin Gabin. J'ai 19 ans et je m'en vais en guerre. Certains diront que 19 ans est un âge trop jeune pour mourir et pourtant, je suis assez âgé pour être enrôlé. Je suis en route pour le combat; un combat que je n'ai pas choisi de mener et qui aura sans doute raison de moi. Mais je m'y rend avec la ferme intention de ne pas me rendre. Je ne suis pas seul, nous nous dirigeons vers la Belgique; repousser l'envahisseur. Comme nos ancêtres autre fois mais cette fois ce ne sont pas les mêmes gens ni les mêmes raisons qui nous y poussent.

Je n'ai jamais été en dans le nord de mon pays, les gens y sont sympathiques d'après les dires. La Belgique non plus je n'y ai jamais mis les pieds. Les frites, la bière, le chocolat, le tabac moins cher; ce sont ça mes clichés de ce petit pays. Pourquoi je souris, je vais probablement mourir à peine débarqué. On est tous entassé.e.s dans le train; le « TGV » pour « Très Grande Vitesse » il parait. Je ne suis pas si pressé que ça; pas la peine de se brusquer... D'ailleurs, j'écris ces quelques lignes sur le dos d'un de mes compagnons. Je ne connais pas son nom mais il m'a dit que je pouvais, que ça ne le dérangeait pas. Alors voilà. On est tous débout, tous droits, comme des pions. Je nous vois comme les fous d'un échequier ceux-là même que l'on sacrifie en premier pour ne pas perdre la dame. La dame ici c'est la France, alors j'imagine que ça vaut de se sacrifier. J'espère juste que ce sera utile.. Nous sommes arrivés apparemment.

On a quelques instants le temps que tout s'organise alors j'écris encore. Le soleil est chaud sur ma peau... J'ai toujours cru qu'il faisait froid dans le nord, qu'il pleuvait toute l'année durant. Mais la chaleur environnante -bien qu'inhumaine- me réconforte. Un peu. Pourquoi je souris?.. Je vais certainement mourir. J'observe autour de moi, ces têtes qui me sont toutes inconnues. Pourtant nous sommes là pour le même but. Certains ont des chansons en tête et les fredonnent d'autres ont tout simplement des gueules de déterrées alors qu'elles n'ont pas encore étaient six-pieds sous terre. C'est désolant. La terreur dans toute sa splendeur. Ça recommence à bouger. Pourquoi je ne souris plus est-ce déjà l'heure? Tout s'agite autour de moi. Je range tout en écrivant comme je peux.

Nous marchons vers un camp de base finalement. Peut-être le dernier couché avant l'éternel sommeil. Moi aussi je dois avoir l'air terrifié maintenant. Qu'elle gueule est ce que j'ai? Une gueule d'enterrement ou bien de déterré. On est arrivé au campement. Y'en a déjà un qui s'est fait réprimander parce qu'il a laissé sa torche allumer. Mieux vaut ne pas se faire remarquer dès le début.