Chapitre 1 - Maxence

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Je me réveille grâce aux rayons du soleil qui transpercent la peau fine de mes paupières. Une boule, nichée au creux de mon estomac me fait grimacer. On me traite souvent d'idiot à cause de cela mais je suis du genre à me fier à mon intuition, et ce, en toutes circonstances. Cette journée va être merdique, je suis certain. Après avoir pousser un grognement, je sors du lit, toujours emmitouflé dans ma couette, dont je me sers comme d'une armure.

Passage dans la salle de bain oblige, je me fixe dans le miroir. Mes grands yeux noirs sont décorés par de vilaines cernes, seuls vestiges de mes nuits blanches à répétition durant les quelques derniers jours. Ma peau est pâle, symptôme de mon hibernation continue alors que mes lèvres rouges, elles, sont la seule touche de couleur sur mon visage blafard. Pour couronner le tout, mes cheveux d'un châtain tout ce qu'il y a de plus commun atteignent mes épaules, ébouriffés par la nuit que je viens de passer.

Mon regard se détourne du miroir. Je n'aime pas mon visage, et encore moins mon corps. Ce dernier est trop maigre, presque squelettique, héritage de mon enfance tout sauf heureuse, de même que les cicatrices qui peuplent mon dos et mes jambes. C'est d'ailleurs pourquoi, malgré l'endroit où j'habite, je ne me mets jamais de débardeur ou de short. Et je me promène encore moins torse nu, même chez moi.

Je quitte la pièce et me dirige vers la cuisine, où je fais couler du café. Il me faudra bien ça pour affronter la journée qui s'annonce. Un rapide coup d'oeil à l'horloge digitale du four me signale qu'il est bientôt sept heures. Pourquoi diable est-ce que je n'arrive pas à faire de nuit complète? J'ai été dormir à quatre heures passées... Quoique, cela m'épargne de nouveaux cauchemars. C'est peut-être un mal pour un bien tout compte fait.

Une fois la tasse bouillante entre mes mains, je me rends à mon bureau où j'allume l'antiquité qui me sert d'outil de travail. Cela fait bien huit ans que j'ai acheté cet ordinateur, déjà vieux à l'époque. En vérité, c'est le premier « plaisir » que je me suis fais après avoir quitté le domicile de mes parents. À l'époque, j'étais chez une amie, en attendant de trouver un toit, un endroit rien qu'à moi. Qui voudrait louer un appartement à un gamin, à peine majeur, sans emploi et qui ressemblait à un de ces enfants gothiques, habillé tout de noir, avec du khôl sous les yeux? J'aurais été propriétaire que je ne l'aurais pas fait, alors espéré que quelqu'un le fasse par bonté d'âme, fallait pas rêver.

Après quelques minutes de chargement, la bête est allumée et en état de marche. J'ouvre alors mes mails. Quelques publicités, deux relances de clients, et un mail pour un nouveau projet. Ça aurait pu être pire.

J'attrape la boite de médicament qui traine sur le coin de mon bureau, en prend un et le met dans ma bouche. Une petite gorgée de café plus tard et il a disparu. Un soupire lasse s'échappe de mes lèvres entrouvertes alors que je m'enfonce dans le cuir de ma chaise de bureau, toujours emmitouflé dans ma couette de lit.

L'alarme de ma montre manque de me faire sursauter. Il est sept heures.

Je me frotte les yeux. Par quoi vais-je commencer?

L'heure passe assez rapidement; mes clients ont reçu leurs réponses, deux devis ont été fait et j'ai même pu faire un peu de publicité sur les réseaux. Bien que ce soit quelque chose que je n'apprécie pas particulièrement de faire, c'est indispensable si je veux attirer de nouveaux clients. Etre à son compte a beaucoup d'avantages, comme la liberté de bosser quand on le veut, mais cela a aussi des inconvénients. Le salaire proportionnel au travail fourni en est un. Le fait que les clients ne tombent pas du ciel en est un autre.

Une fois l'ordinateur en veille, je quitte ma chaise de bureau, ma couette toujours autour de mes épaules, comme une cape. Je suis frileux, c'est comme ça.

Une fois dans ma chambre, je m'empresse de choisir une tenue confortable; un sweat-shirt blanc qui a vécu des jours meilleurs et un pantalon cargo noir, lui aussi passé de mode depuis longtemps. Je file alors dans la salle de bain, tout en me saisissant d'une serviette de bain.

J'ouvre la vanne d'eau de ma douche après avoir vérifié que la porte était convenablement fermée. Un peu parano sur les bords, je suis au courant mais c'est sans aucun doute cette paranoïa qui m'a sauvé la vie quelques fois. Elle est limite maladive mais je l'accueille dorénavant comme une partie intégrante de ma personnalité, même si elle ne plaît pas à tout le monde et qu'elle m'ennuie régulièrement.

Quand le miroir est recouvert de buée, je me déshabille et pénètre dans la cabine de douche. Je ferme les yeux et savoure la pression du jet d'eau sur mon dos, la tête légèrement en arrière. C'est un de mes seuls plaisirs quotidiens.

Je penche d'avantage ma tête en arrière et l'eau tombe directement sur mes cheveux, que je commence à masser. Une petite dose de shampoing plus tard, je m'amuse à faire mousser le savon. Mes cheveux, c'est ce que je préfère sur moi, même si à la base, je refusais de les couper pour une toute autre raison. C'était d'avantage pour cacher la brulure que j'ai au niveau du cou que pour des raisons esthétiques.

Me sortant de mon moment, le bruit de la sonnette retentit dans l'appartement. Fais chier... Cela ne peut être que trois personnes; le propriétaire, qui ne vient jamais, le facteur, un homme charmant, ou ma voisine du bas, une vraie garce. Le genre dame âgée, maquillée à outrance, avec un chien de petite taille qui aboie non-stop, habillée en mini-jupe et talon aiguille mais qui se donne des airs de bourgeoise. Je respire par la bouche à chaque fois que je la vois, le parfum bon marché dont elle s'asperge me donne la migraine.

Je coupe l'eau, sors de la douche et enfile en troisième vitesse le peignoir blanc qui pend à un crochet. Après avoir vérifié par deux fois qu'il était bien attaché et qu'aucune cicatrice ou brulure n'était visible, je souffle un bon coup. Je déteste les gens. Enfin, pas eux en tant que tel mais le fait de devoir voir du monde. Même parler me file la chaire de poule. C'est une des raisons pour lesquels je suis infographiste indépendant; je peux bosser de chez moi, sans sortir. Même pour les courses je ne bouge pas. Je bénis l'inventeur des courses en ligne.

Le froid du couloir me fait frissonner, mes poils se dressent sous la fraicheur qui règne dans le reste de mon appartement. La porte d'entrée est rapidement atteinte. Je jette un oeil par le judas; un visage inconnu. Il a l'air plutôt jeune, la petite vingtaine. Dans ma tranche d'âge en réalité. Son visage porte encore quelques rondeurs enfantines, ses yeux sont noirs charbons et sa peau est basanée.

L'étranger s'apprête à appuyer à nouveau sur la sonnette quand je me décide à ouvrir la porte, non sans prendre une profonde inspiration. 

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⏰ Dernière mise à jour : Sep 06, 2022 ⏰

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