Prologue

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La porte s'ouvrit doucement, et dans le silence pesant, elle fit son entrée. Une jeune fille, portant sur ses épaules frêles le fardeau de mille batailles, traversa la pièce avec une assurance glaciale. Ses traits étaient taillés dans la pierre, chaque ligne de son visage racontant une histoire de douleurs et de combats silencieux. Malgré sa jeunesse, son visage portait les marques indélébiles des épreuves endurées : des rides prématurées, des ombres profondes cernant des yeux d'un marron perçant, où l'on pouvait lire une insondable tristesse mêlée à une force inébranlable, la colère.

Elle avançait, chaque pas résonnant comme une déclaration de guerre à l'innocence perdue. Ses cheveux d'un noir de jais encadraient son visage anguleux, tombant en mèches désordonnées, témoins d'une vie indomptée et rebelle. Ses yeux, balayaient la salle, transperçant les âmes des recruteurs avec une froide indifférence. Il y avait en elle une distance palpable, un mur invisible mais infranchissable qui la séparait du reste du monde.

Ses lèvres fines, souvent serrées en une ligne dure, ne laissaient transparaître aucune émotion, sauf peut-être un dédain silencieux. Vêtue de manière austère, ses vêtements usés mais propres étaient les seuls témoins de sa dignité farouche. Elle portait en elle une beauté brutale, une force qui commandait le respect et suscitait la crainte. Autour d'elle, l'air semblait se figer, comme si sa présence avait le pouvoir de figer le temps lui-même.

Dans cette pièce où chaque regard était tourné vers elle, la distance entre elle et les autres était palpable. Elle se tenait là, telle une figure de marbre, inatteignable et solitaire. Chacun se demandait quelle était l'histoire de cette jeune fille au visage marqué, et quelles épreuves l'avaient menée ici. Mais personne n'osait briser le silence pour le découvrir, comme si s'approcher d'elle revenait à se brûler au froid le plus intense.

Parmi les journalistes, un homme retint son souffle en la voyant entrer. À première vue, il semblait aussi impassible que les autres, mais une lueur fugace d'effroi traversa ses yeux. Sa main trembla imperceptiblement, serrant les papiers devant lui avec une tension invisible. Il la connaissait. Ou plutôt, il connaissait ce regard, ce mélange de haine et de détermination. Il détourna légèrement le regard, comme pour échapper à une vérité accablante.

Il prit une profonde inspiration et regarda de nouveau, cette fois plus attentivement. C'est alors qu'il remarqua ce qu'il avait manqué au premier coup d'œil. Son œil droit, d'un marron perçant, était vif et glacial, mais l'œil gauche... L'œil gauche était voilé, aveugle, avec une cicatrice déchirant la peau autour, souvenir indélébile de violences passées. Ce détail le frappa comme un coup de poing. Un flot de souvenirs remonta à la surface, des souvenirs qu'il avait tenté d'enterrer. C'était elle. Il ne pouvait plus en douter. 

Le temps sembla ralentir, chaque seconde s'étirant comme une éternité. Un silence lourd et oppressant s'installa, le regard de la jeune fille posé sur lui exacerbait l'atmosphère déjà glaciale. L'homme tenta de se ressaisir, mais une sueur froide perlait déjà sur son front. Il savait que cette rencontre n'était pas le fruit du hasard. Quelque chose dans son attitude, dans la manière dont elle le scrutait , lui fit comprendre qu'elle l'avait retrouvé.

Prenant une profonde inspiration, il se leva, forçant un sourire qui ressemblait plus à une grimace. 

_Bienvenue, mademoiselle . 

Dit-il en avançant vers elle, tendant une main qu'il espérait ferme.

_ Je suis Monsieur Stone. Puis-je connaître votre nom ? 

Elle le regarda, un éclat froid dans les yeux, puis, avec une lenteur délibérée, prit sa main.

_ Enchantée, Monsieur Stone. Je m'appelle... Claire. 

_ Claire ?

Sa voix était douce, presque mielleuse, et son sourire exagéré contrastait cruellement avec la froideur de son regard. Adrian chercha quelque chose dans ses yeux, une lueur familière qu'il avait espéré ne jamais revoir. Il avait deviné qu'elle avait menti sur son nom, mais il n'était pas encore prêt à l'admettre.

Le contact de leurs mains sembla durer une éternité. Il sentit une vague de panique le submerger, mais il s'efforça de la réprimer, maintenant son masque de cordialité. 

_ Claire, alors...euh... Parlez-nous de vous. Qu'est-ce qui vous amène ici ? 

Elle relâcha sa main, et son sourire s'élargit encore, devenant presque cruel. 

_Oh, des raisons personnelles, vous savez ce que c'est .

Il hocha la tête, tentant de cacher le frisson qui lui parcourait l'échine. 

_Bien sûr, bien sûr. Nous sommes ravis de vous avoir parmi nous. 

Les autres recruteurs observaient la scène, inconscients de la tension sous-jacente. 

_ Plaisir partagé, Monsieur stone . Je suis sûre que vous trouverez mes compétences... impressionnantes. 

Il déglutit, conscient que chaque mot, chaque geste était imprégné de sous-entendus. Tandis qu'elle continuait de parler, son sourire trop parfait et sa voix trop douce accentuaient le malaise. La pièce entière semblait se contracter sous la pression de cette interaction, et même ceux qui ne comprenaient pas l'ampleur du problème ressentaient une tension palpable.

Pour lui, il ne faisait aucun doute : elle était là pour une raison, et cette raison résonnait comme une menace silencieuse dans l'air. 








William Shakespeare, du Marchand de Venise:

« Le monde est encore trompé par l'ornement,En droit, quel plaidoyer si sale et corrompu,

Mais, étant assaisonné d'une voix gracieuse,Obscurcit le spectacle du mal? En religion,Quelle erreur maudite, mais un front sobre La bénira et l'approuvera avec un texte,

Cacher la grossièreté avec un bel ornement? »

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⏰ Dernière mise à jour : Jun 20 ⏰

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Pseudomai: La fin du DestinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant