Une lettre destinée à elle, reine de la lumière et de la tempête

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J'écris ces mots sur mon lit de mort, la main tremblante. Ces mots sont destinés à mes enfants et petits-enfants car même plus de soixante-dix  ans après je n'ai pas oublié ce jour où moi jeune mousse fut témoin d'un miracle le jour où nous avons vu la véritable reine de la tempête.  

Nous étions au milieu de l'océan pacifique,  aucune terre en vue ni même un autre bateau.  Nous avions quitté le port il y a un mois déjà, la mer avait été clémente jusqu'alors mis à part quelques orages rien de bien inquiétant. Au début du deuxième mois, nous avions dû faire demi-tour à cause d'une prévision météo peut rassurante.  Quelle erreur notre capitaine a fait ce jour-là... Notre traversée ne serait que plus longue et éprouvante. Les plus anciens marins semblaient inquiets et anxieux à l'idée de naviguer dans ses eaux là. Dans mon innocence j'écoutais les conversations entre eux durant mes corvées, ils ne faisaient guère attention à un jeune nouveau comme moi de plus très timide à l'époque. Ils parlaient de cet endroit avec crainte, je ne me souviens pas de tout ce qu'ils disaient exactement.

"Cette partie de l'océan  est le domaine de Vein, roi des tempêtes qui punira tout arrogant qui viendra naviguer sur ses eaux"  répétaient-ils.

A cette époque, je ne croyais pas à tous ces contes et légendes  de marin les trouvant exagérés et anciens. Né dans une ville portuaire de sud de la France, je fus habitué aux mythes et légendes de la mer, des histoires pour faire peur aux enfants et les éduquer sur les danger de l'océan mais... étrangement je me souviens qu'un sentiment m'avait pris à les entendre. Ils étaient bien convaincus que ce roi était bien réel et je peux même avouer que moi cartésien dans l'âme je commençais à stresser à l'approche de cet endroit. Une angoisse m'envahit. La mer commençait à devenir agiter et des nuages menaçant se formaient au loin, rien de bien inquiétant. Cela changea au cinquième jour, à peine la Frontière de Vein franchit le ciel bleu disparut sous un rideau de nuages d'orage qui nous menaçaient d'exploser en un typhon à tout moment. Les vagues elles commençaient à libérer leur fureur tapant contre la coque de notre navire qui tremblait à chaque fois d'une secousse, mais cela n'était que le début. Peu de temps au deuxième jour que nous avons pénétré cette mer interdite, une pluie sans fin s'abattit sur nous mêlée à  des rafales de vent qui rendaient tout déplacement sur le pont quasiment impossible, Le risque de tomber par-dessus bord était bien trop grand et une chute dans ce lieu déchainé serait une mort assurée, le corps frêle et fragile d'un homme serait broyé sous la puissance des flots et finirait par sombrer dans les insondables abysses sur lesquelles nous naviguons.  A peine quelques heures après, nous étions pris au milieu d'une tempête apocalyptique. Le navire se soulevait  sur les vagues alors que d'autres venaient se fracasser contre nous, leur force étaient si grandes qu'une partie de nos containers avaient été arrachés du pont et les antennes de communication connurent le même sort.  Notre radio devint silencieuse, juste un bruit blanc régulier. La majorité de l'équipage pensait sincèrement que la mort allait s'abattre sur nous pour punir l'arrogance d'un capitaine. Je me souviens que certains avaient pensé de manière fugace à une mutinerie réfléchissant à comment calmer le dieu Vein. Même moi, je commençaient à croire à cette légende. Jamais je n'avais vu au paravent une telle violence de cette nature. Je me souviens encore parfaitement de ces immenses vagues se formant pour venir frapper telle des mâchoires qui ne voulaient que déchiqueter leur proie, un véritable miracle que notre navire ait tenu aussi longtemps face aux assauts incessants.  Notre cap avait dérivé, quelque chose dans cette tempête nous attirait plus loin dans le cœur du cyclone, alors, tous priaient pour la quitter au plus vite. Le miracle allait se produire dans peu de temps ...

Pris dans la zone la plus violente de la mer, le capitaine fit une choix, une personne allait devoir sortir sur le pont et guidé le bateau après la mort de tous nos instruments de navigation. Bien sûr, ne se porta volontaire. Un vote fut organisé et évidemment tous votèrent pour le jeune mousse donc moi. Je fus pris de désarrois, j'allais devoir sortir avec ses vents qui avaient arraché des containers, aves des vagues capables de réduire mon squelette à un puzzle de mille pièces. Malgré mes protestations je fus trainé de force à la porte, une solide corde de métal me fut passé autour de  la taille. Quand un des marins ouvrit la porte le bruit du vent et de  la pluie me vrilla les oreilles, on me poussa dehors, les bourrasques de vent rendait ma progression des plus difficiles, j'avais l'impression de marcher à contre-courant. Arrivé à la moitié du pont alors que les gouttes d'eau froide fouettaient mon visage, surgit à ma droite une vague qui vint s'écraser sur moi. La sensation de mon corps plaqué au sol en métal ne me quittera jamais, durant une demi-seconde j'ai cru mourir. Je ne pouvais pas lutter contre une telle force, une telle rage. Je ne pouvais que me laisser faire et prier. Pour la première fois de toute ma vie je priais pour ne pas mourir. Ma vie fut sauver uniquement grâce à la corde de métal et à la balustre que j'avais percuté empêchant mon être de tomber à la mer. Je me relevais péniblement trempé gelé jusqu'aux os, totalement désorienté, trainant des pieds et luttant contre les vents. Quelque chose en moi s'était éveillé, une envie de vivre et de survivre. Si je devais mourir sur cet océan alors j'allais donner un combat des plus féroces. J'agrippai la balustre au bout du navire faisant face aux éléments qui se déchainaient devant moi, comme c'est étrange... au moment où aucun espoir n'est visible on décide de tout donner pour vivre s'accrochant à l'insensé. Je scrutais tout autour de nous dans l'espoir de trouver un endroit calme ou quelque chose même infime pour nous aider mais il n'y avait rien et les éléments se déchainaient toujours plus et c'est là que je l'ai vu, un futile mais rapide rayon de lumière proche de nous et surement dans la folie j'agitai mes bras pour que le capitaine se dirige vers lui. Il sera notre salvation ou notre damnation mais je voulais y croire. Nous primes le cap, je refusai de revenir dans la sécurité du bateau, je voulais être sûr que notre cap se reste sur la lumière.

Au bout de plusieurs heures enfin, nous arrivâmes sous le rayon de lumière où un autre apparut peu de temps après, puis un autre telle des lances qui venaient percer les sombres nuages d'orages. Quelque chose au-dessus d'eux agissait en ce moment même. Ils avaient  quelque chose d'absolument magnifique en eux puis je crus entendre au loin un hurlement aigu porté par le vent mais je me trompais .... il venait d'au-dessus de moi bien d'au-delà de ce que je pouvais voir. Loin dans le ciel un autre cri étrange se fit entendre....Je ne peux empêcher ma main de trembler à l'écriture de ses mots ... Elle apparut devant moi. Ce fut d'abord une déflagration qui fit trembler tous les nuages d'orage pour venir ensuite frapper la mer, toutes les vagues furieuses furent chasser, l'instant d'après une puissante explosion dispersa la tempête et les nuages dans une boule de lumière et dans un cri des plus nobles le ciel s'était embrasé d'un feu qui me fut si puissant et si doux à la fois. Je pouvais voir les yeux à demi fermés une créature émettre cette lumière, je n'arrivais à peine à distinguer que peu de détails mais je me souviens avoir vu une paire d'ailes, chacune plus grande que la tour Effel, son corps deux fois plus grand que le plus grand pétrolier jamais construit par l'homme. Elle ressemblait à un papillon. En temps normal, j'aurai dû être terrifié par une telle chose mais là ... oh mais là comment l'être devant une telle créature. Je pouvais ressentir sa puissance et sa noblesse mais aussi sa bonté à travers cette lumière qui me réchauffait et les cris qu'elle produisait étaient un mélange entre une déclaration avec une prestance d'une reine et le fracas d'une force de la nature. Elle n'avait aucune intention belliqueuse envers nous, elle combattait la tempête la soumettant de ses ailes et tenant à distance les nuages de son cri et lumières. Ce n'est pas un roi furieux qui dirige cette mer mais une reine noble et majestueuse. Sans plus de cérémonie, elle disparut dans le ciel au loin. Je restai sur le pont à contempler le ciel, choqué et époustouflé de ce qui venait de se passer. Sans surprise, nous sommes rentrés au port. J'appris que bien plus tard que la légende Vein comptait une suite qui disait :

Cette partie de l'océan est le domaine de Vein, faux roi des tempêtes qui punira tout arrogant qui viendra naviguer sur ces eaux mais si  vous suivez la lumière Shinvalt véritable reine de la mer viendra vous aider contre l'usurpateur .

Shinvalt, tel est le nom de la créature qui nous a sauvé ce jour-là...Durant tout le reste de ma vie, j'ai espéré pouvoir la revoir une dernière fois avant ma fin mais je suppose que l'avoir vue une fois est suffisant alors sur ces derniers mots, je lègue à mes chers enfants ma rencontre avec elle et rend un dernier hommage à Shinvalt véritable reine de la tempête et de la lumière. 

signé : Théodore B 

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